La mort “Flamboyante”

Un renouvellement de l’image de la mort.

di Valentina Salierno

Do not go gentle into that good night,
old age should burn and rave at close of day ;
Rage, rage against the dying of the light.
DYLAN THOMAS

Quand l’homme perçoit la fin, il n’en est pas conscient du tout ; au contraire, il s’enflamme encore et encore dans la vie, en espérant que la cyclicité à laquelle il est destiné ne soit pas encore arrivée à sa fin : il est porté à aimer la terre avec démesure.
Le problème de la mort est depuis toujours un problème historique, même si on ne la pense que dans les moments de crise, parce qu’elle élimine tout. Mais l’homme meurt tous les jours et on est en contact depuis la naissance. Pourquoi devient-elle un objet d’étude quand elle s’entremêle aux grands phénomènes historiques ? Ou, encore, on se pose une question que d’autres historiens se sont déjà posés : la mort est-elle un bon « objet » d’étude ? On répondra comme Jacques Chiffoleau :

(…) la morte rimane «un buon oggetto del pensiero»: intorno ad essa si manifestano le tensioni, le fratture, le evoluzioni che agitano tutti i sistemi di credenze e, per la discontinuità che introduce nella storia umana, essa invita ad analizzare sempre sottilmente i processi fondamentali di riproduzione sociale[1].

Dans un moment de crise de la conscience collective, comme celle des années du Grand Schisme (1378-1417), on veut contribuer avec ce travail à mettre en évidence comment la crise schismatique et les autres crises qui ont frappé l’Europe du XIV ͤ siècle n’ont pas signifié une césure « drastique » par rapport aux siècles précédents en ce qui concerne l’histoire de l’art, alors qu’ils ont signifié une grande fracture dans d’autres cas. Lire l’histoire du XIVème comme l’ont fait les historiens économiques ou politiques, comme liée seulement aux dates incontestables de la crise démographique par rapport aux pandémies et aux conséquentes crises économiques, fait que certains facteurs (ceux économiques ou politiques) sont privilégiés par rapport à d’autres, en oubliant que ce siècle-là a été un moment très animé pour l’histoire sociale, artistique et littéraire.

C’était plutôt la naissance d’une nouvelle perception « dramatique » de la vie qui a fait que l’iconographie, surtout celle liée à la mort, commence à se faire de la place. La tension dramatique qui commence à être représentée dans les  peintures  du  XIV ͤ  siècle  fera  fleurir,  au  XV ͤ  siècle,  une  iconographie  liée  à  la  mort  et  à  la souffrance du vécu. Selon la thèse d’Émile Mâle, dans une des études les plus importantes pour l’histoire de l’art du Moyen Âge, cette nouvelle iconographie est liée au théâtre religieux, qui a le plus contribué à ce drame représenté qu’on retrouve dans les peintures du XV ͤ [2]. Au XIII ͤ siècle, il est très rare, par rapport à la représentation du pathétique, que l’art consente à représenter la douleur et la mort :

A Notre-Dame de Paris, saint Étienne, mourant sous les coups de ses bourreaux, semble une figure de l’innocence et de la charité ; couchée sur un linceul que soutiennent deux anges, la Vierge morte semble dormir du plus doux sommeil. La Passion de Jésus-Christ, elle-même, n’éveille aucun sentiment douloureux[3].

C’est  à  la  fin  du  XIV ͤ  siècle,  quand  les  artistes  qui  mettent  en  scène  la  vie  de  Jésus-Christ  ne demandaient plus leurs inspirations aux Évangiles ou à la Légende dorée, mais – plutôt – aux Méditations sur la vie de Jésus-Christ de Saint Bonaventure[4] ; un livre qui a tout changé pour les metteurs en scène : ils y trouvaient soit la mise en scène, soit le dialogue. Les études de l’historien de l’art sur le théâtre et l’iconographie concernent surtout sur Les Mystères et sur le renouvellement qu’a apporté le livre de Saint Bonaventure aux poètes contemporains et, après, aux artistes. Il souligne, dans sa thèse, comment les Méditations ont été très utiles aux metteurs en scène du théâtre, mais aussi aux artistes qui y collaboraient[5]. Il ne semble pas considérer les manifestations spectaculaires de la ville, qui offraient, encore plus – on croit – une façon de participer au drame et au jeu du spectacle à toute la communauté. Des manifestations où travaillaient aussi les artistes de la cité. On appelle “metteurs en scène” les artistes et les artistes metteurs en scène, parce que, dans le moment où on parle de manifestations urbaines, comme les processions ou les fêtes, il n’y a pas de pièces – pour le cas avignonnais qu’on analyse – qui peuvent témoigner un jeu théâtral[6] comme celui des Mystères. Mais on croit, quand même, qu’ils peuvent avoir influencé l’iconographie autant qu’un jeu théâtral avec texte, auteur et joué devant un public.
Les historiens ont souvent associé ce sentiment d’incertitude de l’homme vécu pendant les crises du siècle et aussi après, aux images de la mort qui ont connu, après le XIV ͤ siècle, une augmentation. L’art exprime toujours les sentiments humains et permet de s’exprimer et de faire respirer toutes les peurs du cœur, mais reléguer l’art à l’histoire des crises est une façon de la dévitaliser et de la faire dépendre d’une composante politique et économique. Alors, on essaye demander : est-ce que le théâtre[7] a pu vraiment influencer une iconographie de la mort plus que les crises et les épidémies que les hommes du XIV ͤ et XV ͤ siècle ont vécu ?
En fait, le théâtre était toujours un véhicule politique efficace : cérémonies, processions, pièces de théâtre ont légitimé un pouvoir : entre le XII ͤ et XVI ͤ siècle il a été un des « luoghi cruciali della negoziazione politica fra governanti e governati »[8]. Mais, encore, comme on verra, il était un moyen à travers lequel exprimer un sentiment social, un souci et – comme dans le cas analysé des cortèges funéraires – un moyen pour « exorciser » la fragilité humaine.
La crise qui a frappé tout le XIV ͤ siècle, en effet, a été si évidente, qu’elle a fait que les historiens se réunissaient autour d’une idée de “Crise du XIV ͤ siècle”, en faisant qu’il devenait presque naturel de parler de ce siècle comme d’un siècle de crise, sans mettre en lumière les aspects positifs qui en ont résulté[9]. À l’appui de cette thèse il y a la littérature eschatologique qui est produite à partir de la fin du  XIV ͤ  et  au  début  du  XV ͤ  siècle,  dans  laquelle  « l’attendre  de  la  fin »  est  le  leitmotiv  d’une communauté entière[10].
Un des plus beaux exemples que l’histoire de l’art offre pour comprendre qu’on ne doit jamais juger l’art en stricte relation avec les autres changements est l’exemple du Triomphe de la mort de Buffalmacco au Campo Santo de Pise (fig.1) et sa datation démontrée par l’historien de l’art Luciano Bellosi. À un moment où tous les historiens de l’art disaient que la datation de l’œuvre était à situer entre les années de la Grand Peste, Bellosi a démontré de façon inexpugnable et en offrant de précieuses contributions pour l’histoire de la mort, qu’il fallait la placer avant la Grand Peste et que cette iconographie n’avait rien à voir avec l’épidémie[11].
On veut démontrer ici – parce qu’il le croit fortement, peut-être en se trompant – que l’iconographie de la mort n’est pas un phénomène lié (ou moins pas du tout) aux grandes crises du XIV ͤ   siècle et que ce crises n’ont pas vraiment frappé la sensibilité humaine en deux, comme le sous-entend une partie de l’historiographie ; elle est – au contraire – une iconographie liée à une nouvelle prise de conscience de l’individu face à la mort, qui ne peut être attestée que dans un processus plus long et par l’introduction de ˝cérémonies˝ urbaines, les cortège funèbres et les processions, qui sont témoignés par l’écriture, la seule qui change avec la société entière. Et par le théâtre, le seul qui est joué pendant tous les jours de nos vies où tous jouent un rôle.


1

« BELLOS OBSEQUIES »[12] :
La mort en procession comme au théâtre.
Avignon au XIV ͤ et XV ͤ siècle.

Perché, Padre, talora mi domando, l’incarnazione è tra gli uomini, /
perché non in altra specie / tra quelle tue creature visibili /
e che pure ti testimoniano: gli uccelli / i pesci, le gazzelle, i daini…
In Via Crucis, MARIO LUZI

En pleine crise schismatique, le cardinal La Grange se fait construire une tombe monumentale, aujourd’hui conservée mutilée au musée du Petit Palais (fig.2). Il s’agit d’une œuvre qui cache en elle-même les traces de l’inquiétude du moment que la ville d’Avignon, et toute la chrétienté, vivait : « Ai piedi del loculo giaceva un « transi » [13], un cadavere, una scultura inquietante, tetra, scarna, che spingeva a meditare sull’ultima ora e sulla fragilità umana»[14]. S’écartant de ce qui est l’image donnée par l’histoire de l’art – qu’on analysera plus tard – l’historien Jacques Chiffoleau souligne comment déjà en 1320 les habitants des villes les plus importantes avaient redécouvert le testament romain et ses clauses, pour arriver à une large diffusion et utilisation, même dans les campagnes et dans les bourgs, bien que l’usage devienne commun seulement entre 1270 et 1350[15]. Le testament laisse, comme le soulignent les études du médiéviste Pierre Toubert[16] pour le cas toscan, une marge plus large de souplesse et permet à l’individu testamentaire une certaine individualité dans les choix, peut-être même linguistiques, qui n’apparaissent pas dans des documents comme les actes notariés. L’acte notarié est au contraire un acte unilatéral, qui n’a pas besoin du consentement d’autres personnes, mais c’est la volonté du testateur qui va déterminer l’héritier, sans qu’il soit fait aucune référence à la consuetudo familiale. L’historien identifie dans ce changement de perspective entre le testament “romain” et l’acte notarié un renouvellement qui contribue aussi à un changement d’attitude envers la mort ; il écrit en effet :

La democratizzazione del testamento, dando all’individuo un posto che fino a quel momento non aveva avuto, contribuisce dunque ad imporre un’immagine della morte differente da quella esistente due secoli prima, al tempo degli obituari e delle donazioni pro remedio anima[17].

Il s’agit d’un moment où la « mort de soi », pour utiliser une expression de l’historien Philippe Ariès, ne coïncide plus avec la mort du pater familias et de son auctoritas, garante d’une continuité sociale et – donc – d’un héritage, mais plutôt – en continuant à prendre comme référence la pratique testamentaire du XII ͤ  siècle, lorsque les liens sociaux sont remis en cause « dalla rivendicazione di nuovi diritti, dallo sviluppo di una morale dell’intenzione »[18] – un moment de renouvellement de l’image de la mort, avant même les épidémies mortelles et les crises.
Cependant, les testaments et les formules utilisées ne changent pas jusqu’au milieu du XIV ͤ siècle. Un nouveau langage, qui devait se dépouiller de celui des sententie des Pères de l’Église du XII ͤ siècle, commença à apparaître à l’intérieur des testaments, se remplissent de nouvelles formules – jusque-là inconnues – et de nouvelles références, dans un « collage » qui finit par engendrer une nouvelle peur : mourir sans testament plutôt que d’attendre l’Apocalypse ; une crainte qui « viene espresso nei locis comunes evocanti lo judicium terribile »[19].
Toutes ces images qui faisaient partie de l’Ancien Testament, comme l’affirmation de la fragilité devant Dieu, laissent de plus en plus place à de nouvelles formules, non plus cristallisées – comme on pourrait le croire – mais qui vont de pair avec l’art et la littérature[20].
En fait, d’après l’analyse testamentaire, il apparaît que la chronologie des crises qui ont touché le XIV ͤ siècle et la sociologie du phénomène font que le rapport entre la dépression démographique à laquelle on se rendait et les changements des structures mentales étaient très complexes.
L’image de la mort, qui commence à changer dès 1180-1220 avec la ” mort de soi”, bien qu’il y ait eu une évolution des termes et des formules entre 1340 et 1430, ne peut pas être entièrement associée à une influence directe des grandes épidémies. Ce ne sont pas seulement les formules juridiques qui le rappellent – étant l’écriture d’un processus qui prend du temps – mais aussi les dispositions pour la pompe funéraire que l’acte testamentaire prévoyait, qui – en réalité – ne changent pas. On ne veut pas nier l’impact très fort que certains événements ont certainement eu, mais les testaments ne signalent ce traumatisme qu’avec du retard[21].
Les pompes funèbres occupent de plus en plus, à l’intérieur des testaments, une place importante. C’est à cela que l’on voit et que l’on remarque un changement concernant le passage d’une conception de la mort à l’autre.
L’historien Chiffoleau insiste particulièrement sur les processions, moment considéré comme l’accompagnement du mort du voyage terrestre au voyage céleste. Vers 1330 commencent à augmenter, à Avignon et à Orange, des demandes de torches, de drapeaux, de clercs et de pauvres accompagnateurs.
Les figures qui apparaissent à l’intérieur de ce nouveau cadre sont aussi nouvelles : « figurants », c’est le terme par lequel elles sont appelées à l’intérieur du cortège[22] : clercs, pauvres, enfants, mendiants, s’apprêtent à suivre le mort, bien qu’elles ne fassent pas partie du vécu de l’homme. Il ne s’agit pas de figures qui apparaissent seulement pour des personnages importants, mais elles sont également présentes à l’occasion de la pompe funéraire des artisans et des riches paysans. Il ne s’agit pas non plus d’une coutume – celle de s’occuper de ses propres funérailles – qui concerne seulement les élites : à Avignon, les artisans s’en occupent exactement comme les classes les plus aisées, comme les marchands et les clercs, bien qu’avec des funérailles moins majestueuses.
En ce qui concerne le cas avignonnais, il est fréquent pour les habitants d’appartenir à plusieurs confréries, de sorte que chacune d’entre elles est tenue d’envoyer sa propre délégation aux processions. Les funérailles deviennent de véritables processions que les testateurs s’amusent à penser : des couleurs des drapeaux, avec une prédilection pour le blanc, aux vêtements des porteurs de torches[23].
La dernière promenade avec ses proches est considérée comme le dernier acte de la vie, un événement qui doit être aussi “esthétiquement beau”. Il est, en effet, mis en évidence une certaine théâtralité liée à ces longues processions, qui s’engagent totalement à être spectaculaires. Le décès est offert comme un spectacle aux vivants, qui doivent participer à la mise en scène.
Dans le Comtat Venaissin il y a, beaucoup moins qu’à Avignon, une tendance à théâtraliser son cortège funèbre, avec un cérémonial presque baroque, que Chiffoleau appelle « flamboyant » [24]. Ce qui n’est pas le cas dans la campagne, laquelle reste très liée à la tradition. C’est précisément dans la ville que commence à se faire place le macabre et non pas du fait des épidémies, mais plutôt de la crise démographique qui « turba le relazioni tra il quaggiù e l’aldilà, tra i vivi e i morti »[25].
La relation entre les vivants et les morts est également analysée à travers le lieu où ils sont ensuite déposés : le Campo Santo. C’est aussi grâce à ce lieu que s’établit une connexion avec ceux qui ont été dans le passé, ce qui est une transformation dans l’image de la mort[26].


2

AVIGNON EST UNE FȆTE[27] :
La fête ambulante au service de l’art.

En parlant du somptueux cortège funèbre et de la quasi-prétention du testateur d’aller théâtraliser sa propre mort, Jacques Chiffoleau lit un narcissisme exacerbé ; une façon de se libérer – et de se rebeller – de la fragilité humaine, comme si c’était une protestation[28]. Dans cette protestation, il n’y a pas d’amour passionné pour l’existence ou une conséquente augmentation des images de la mort, mais plutôt – pour citer une nouvelle fois Ariès, – « le sens aigu de la fin individuelle », celui de la fin d’un homme qui meurt dans la solitude et qui ne peut pas rejoindre les paters. Les lamentations de ces hommes sont concentrées dans les pompes funèbres du XV ͤ siècle.
Dans l’iconographie chrétienne des XII ͤ et XIII ͤ siècles, les seuls symboles connus sont ceux de la mort ; sûrement ceux du memento mori, du dit des trois morts et trois vifs et du Triomphe de la mort [29]. C’est aussi important de mettre en évidence qu’à partir du moment où l’homme médiéval et la chrétienté se rendent compte qu’il y a des péchés qui, soit par leur nature (alors appelés véniels au XII ͤ), soit pour la condition de mort du pécheur, peuvent être expiés après la mort, au Purgatoire,  entendu comme l’espace  de  croyance  chrétien qui naît alors ;  plus  tard,  vers  le  XIV ͤ  siècle,  on assiste à la naissance d’une iconographie du Purgatoire[30].

Au XV ͤ siècle, la représentation de la mort subit de sérieuses variations ; il s’agit toujours d’une prise de conscience de l’état psychologique après la mort : les cadavres se moquent des vivants, ils dansent, ils rappellent que les prochains seront semblables à eux. Mais ils agitent leurs os tous seuls, en proie à la solitude individuelle qui frappe chacun et dont on ne peut se sauver. Ce sont les vivants qui assistent aux spectacles et c’est pour eux qu’ils sont joués.
Si les représentations du Triomphe de la mort deviennent un phénomène plutôt italien[31], c’est La  Danse  des  mort  –  phénomène  commun  à  l’Europe  du  XV ͤ  siècle  –  qui aide  à  comprendre comment (et pourquoi) le théâtre – et les processions – peuvent avoir influencé l’iconographie. L’iconographie de La danse de la mort commence à apparaître à partir des années 1400 avec des premières danses dont on a connaissance, comme celle du cimetière des Innocents à Paris (1425)[32]. C’est une iconographie différente, qui met en place un véritable cortège de vies et des morts.
En référence à ce qu’on a dit avant, la procession était un moment où les vivants et les morts se trouvent « liés », en connexion, en un acte qui veut célébrer la mort et les morts. Comme dans la réalité, de même que dans l’iconographie de la danse, on trouve les morts et les vivants qui marchent et dansent entre eux. Les processions développées à l’occasion d’un cortège funèbre devraient être – clairement – un moment moins heureux que ce qui on voit représenté par les artistes, mais c’est aussi vrai que – comme le souligne le médiéviste Jacques Chiffoleau – la mort est offerte aux vivants comme un spectacle :

il decesso è solamente e magnificamente offerto come spettacolo alla società dei vivi. È la «morte di sé» che è esaltata e la morte del corpo è data ai vivi come una lezione macabra: memento mori[33].

Il s’agit d’un moment que la mort laisse à la communauté entière qui doit être là pour se rappeler la fugacité de la vie. Mais qui dit qu’il doit forcément être un moment d’introspection très dramatique et pas un moment où réfléchir à travers le jeu du théâtre en mettant en scène un spectacle de la mort ?
On oublie trop souvent que l’homme médiéval n’avait pas une idée de mort entendue comme fin. La mort était un passage. C’est la mort seule, loin de ses ancêtres, qui va peser de manière beaucoup plus pressante sur le rapport à la mort. Le sens de la mort grandit dans la conscience des hommes du XV ͤ siècle et, toujours en plus, la vie quotidienne prend une place plus grande, mais « ils cherchent toutefois, sous l’influence de leur mentalité religieuse, à ne pas rompre les liens entre l’existence physique et la survivance spirituelle »[34].

Les coutumes sont abandonnées ; il ne reste que la solitude de l’homme qui atteint les ténèbres seuls. Les morts protestent, donc, à travers des cortèges funèbres plutôt baroques, à cette identification par eux-mêmes auxquels ils sont forcés. Cette même mélancolie de la fin du Moyen Âge dont Huizinga a parlé, ne trouve pas – par conséquent – une corrélation directe avec l’obsession du macabre. Chiffoleau souligne que les épidémies, la crise démographique et les grands bouleversements n’ont pas contribué à accentuer un sens du macabre, un goût pour la mort, mais – au contraire – ont rendu évidente une réalité vraie, une réflexion mélancolique, sur le vécu : une image de la mort bouleversée, ainsi que la relation avec les pères et la tradition. C’est en ce moment même que l’on crée l’idée d’individu, en tant que personne. Les testaments témoignent que la grande mélancolie de la fin de siècle ne se produit pas sans une absence tragique : « È così, nella crisi, nel lutto e nella malinconia che nasce l’uomo, la religione, la razionalità moderna ».
En ce qui concerne la société avignonnaise et les longues processions pour les pompes funèbres, on voudra dire que la ville provençale n’a jamais été étrangère à ce genre de représentation :

Au XIVe siècle, les réjouissances publiques se manifestent par des processions. Les joculatores, ministrales ou tubatores, les musiciens, étaient l’accompagnement inséparable de ces fêtes[35].

Des demandes de torches, de longues processions, marquent depuis toujours le vécu avignonnais et ce, de plus en plus au XV ͤ siècle. On ne sait pas comment se passent les pompes funèbres, mais on doit imaginer qu’ils n’avaient pas des ménestriers qui apparaissent toutes les fois qu’on célèbre un événement joyeux. Mais, on peut le supposer, la mise en scène des spectacles ne devrait pas être très loin de celles faites pour les fêtes religieuses. Même en plein schisme, moment rappelé pour la fragilité de chaque homme, est jouée en 1388 devant l’église des Dominicains une représentation qui met en scène la Prise de Troie. En présence du duc d’Anjou, le spectacle est rappelé pour ses fastes et pour sa participation collective[36] :

Nous assistons, à la fin du Moyen Âge, a une augmentation de la théâtralisation, qui concerne aussi bien l’individu (par exemple face à la mort avec la mise en place, à partir de 1340, des cortèges peuplés de prêtres, de pauvres habillés de blanc ou de noir, de pleurants encapuchonnés, de cierges, de bannières et de cloches) que la communauté, qui se reconnait de plus en plus grâce à l’enracinement dans un espace bien précis[37].

La société avignonnaise n’est pas étrangère aux longues processions et aux représentations théâtrales. Il s’agit d’une société “théâtralement” vivante, qui revit dans ces actes sa liberté : c’est comme si la communauté entière tenait à être participative de tout mouvement culturel et artistique, non pas parce qu’on en reconnaît la valeur, mais aussi parce que le jeu théâtral est vu – et vécu – comme un acte social auquel “il faut” participer pour faire partie de la communauté. C’est presque comme si le jeu du théâtre prenait la voix de cet art dont parle Jérôme Baschet : un art qui occupe une place dans l’histoire humaine non pas comme témoin d’une mentalité d’époque, mais comme impliqué dans les actes sociaux[38].
Depuis  la  deuxième  moitié  du  XIV ͤ  siècle,  on  assiste  à Avignon  à plusieurs  manifestations,  filles d’une tradition bien enracinée des spectacles, soit de nature laïque, soit de nature religieuse. Mais ce qu’on voit pour le XV ͤ siècle est une augmentation majeure des processions et des spectacles : arcs de triomphe, spectacles et mises en scène, sont joués dans les lieux de la cité, surtout ceux liés aux ordres mendiants. Sur les 38 spectacles réalisés entre 1350 et 1400, presque la totalité est jouée aux alentours des couvents des ordres mendiants[39].
Ce qu’on a pu constater jusqu’à présent à ce stade de la recherche c’est que, pour le XV ͤ siècle, apparaissent de plus en plus à l’intérieur de la documentation, non plus des demandes de décor des processions aux artistes de la cité, mais des demandes de la noblesse avignonnaise ou des cités voisines, ou – plus importantes encore – des églises et couvents (entre tous les couvents des Célestins), qui commencent à demander aux artistes des retables pour leur en conserver la mémoire. Il est possible que dans la deuxième partie du XV ͤ siècle, les cortèges funèbres ne soient pas réservés qu’aux grands personnages, et que les riches préfèrent – à la différence du siècle précédent – utiliser l’art du retable plutôt qu’organiser leurs propres cortèges.
On apprend que dans quelques testaments il y a la volonté de laisser à ses héritiers la tâche de faire peindre par des artistes les retables : Jean Chabert, opérant à Avignon entre 1485-1493, établi dans son testament que ses héritiers fassent peindre par le meilleur et par le plus ingénieux peintre d’Avignon deux retables : un pour l’église de Barbentane, plus semblable à celui qui fait le testament, et un pour l’église Saint-Agricol[40]. L’historien local, le Dr. Pierre Pansier, qui est un des érudits utilisés pour l’étude, rapporte qu’il était exprimé que dans le retable de Barbentane, le peintre doit être représenté sous les vêtements du Saint (le plus ressemblant possible) et qu’il doit être entouré par Sainte Catherine, Saint Antoine de Padoue et d’autres saints vénérés dans l’Église. Celui-ci sera présenté par San Jeronimo à la Vierge tenant l’Enfant et il aura dans sa main une banderole avec trois vers écrits :

Quem tua sancta furunt complexum brachia natum/
et cui dederunt lac ubera posce beatum/
Ut me peccatis solvat societque beatis.

Mais s’il est vrai, c’est aussi vrai que le théâtre à Avignon devrait être toujours présent. Une certaine théâtralité dans les images représentées est présente au point qu’il semble que tous les personnages des retables que l’on voit, pour ceux encore visibles, sont en train de jouer une pièce. On peut le supposer au regard des études portant sur le retable Du portement de croix (fig.3) de Francesco Laurana (1478), lesquelles sont le fruit des travaux de l’historienne de l’art Rose-Marie Ferré-Vallancien. Elle dit, en fait, que le retable voulu par René d’Anjou, renvoie à une scène présente dans le Mystère de la Passion du metteur en scène Arnoul Gréban, « même si l’image ne peut pas rendre compte de la progression du récit, sa composition et la disposition des personnages découlent précisément de ce que dit le texte »[41]. Ou encore, le triptyque de Nicolas Froment, pictori abitatori Avinion, qui travaillait au théâtre des arcs de Triomphe, pour la cathédrale d’Aix-en-Provence, le Triptyque du Buisson ardent (fig. 4), pourrait être inspiré des “Arcs de Triomphe” qu’il a réalisés pour la ville, toujours en forme de triptyque[42]
Une des études fondamentales en histoire de l’art pour percevoir le rapport existant entre l’iconographie et le théâtre – on l’a déjà dit – est celle de l’historien Émile Mâle, qui souligne que le XV ͤ siècle est le moment où Les Mystères naissent. Si l’art du XV ͤ siècle doit beaucoup aux Méditations de Saint Bonaventure de Bagnoregio, au XV ͤ siècle beaucoup de scènes qui commencent à être représentées dans l’iconographie religieuse ne peuvent plus être expliquées et il faut donc penser à l’invention d’autres mystères[43].
Les études du français mettent en évidence à quel point le rapport entre les artistes et le théâtre est non négligeable. Les Mystères influencent l’iconographie médiévale tout au long du XV ͤ siècle, et les artistes, très souvent, se trouvent à faire partie des créations des décors et de la mise en scène des spectacles théâtraux. L’historien de l’art souligne que dans les fresques italiennes du XV ͤ siècle il y avait des références aux fêtes, comme dans le cas de l’Adoration des Mages (fig. 5) de Gentile da Fabriano ou dans celles de Pisanello, Antonio Vivarini dans la chapelle Médicis[44]. En France, « car les textes sont muets », on ne sait pas s’il existait des chevauchées de ce genre et on ne sait pas si des miniatures comme celle du Voyage et de l’Adoration de Mages dans les Très Riches Heures de Chantilly s’inspirent vraiment ou non d’un cortège royal. De même, on ne sait pas si l’iconographie avignonnaise répond à des images déjà vues.
Nous savons, cependant, qu’il y avait certainement beaucoup de processions qui ont investi la ville d’Avignon et beaucoup d’artistes ont travaillé à la fois au théâtre et aux retables, presque à la même date. Ceci fait en sorte qu’une certaine influence est présente entre les deux arts, qui auront couramment communiqué entre eux.
Le travail de Chiffoleau sur les cortèges funèbres a certainement ouvert un nouvel intérêt et un cas d’étude, qui met en lumière comme le caractère dramatique d’un événement comme la mort et la présence “due” de la communauté, a certainement contribué à développer une certaine sensibilité à ces manifestations, qui sont – à Avignon – extraordinairement présentes et importantes.
Il faut souligner qu’en réalité, ces processions n’ont pas changé du XIV ͤ au XV ͤ siècle, de sorte que l’on suppose que la crise n’a pas entièrement affecté ces manifestations. Ce qui change, ce sont les lieux des processions, qui à partir du  XV ͤ siècle commencent à se déplacer également autour du couvent des Célestins, qui est supposé être – à l’état actuel des études – un pôle dans lequel gravitent les artistes et se contactent ceux-ci pour les prix des œuvres.

***

Dancez donques vivans à
l’instrument/ et advisez comment
vous le ferez Après dancer viendrez au
iugement[45]

On a voulu analyser un sujet comme la mort parce qu’il est croyance commune de la croire – dans l’iconographie – strictement liée aux crises du XIV ͤ siècle. On ne le croit pas du tout ; et des autres l’ont déjà démontré (comme Jacques Chiffoleau avec l’écriture testamentaire, Luciano Bellosi avec l’iconographie du Triomphe de la mort). On a essayé de se référer à ces deux historiens pour analyser les cas des processions à Avignon et leur lien avec l’art du théâtre. Nous ne possédons toutefois pas, à ce stade de la recherche, des informations plus détaillées sur l’argument qui peut faire penser que les artistes qui travaillent aux processions en avaient été influencés à tel point de « repenser » leur art, aussi autour d’un argument comme la mort. On sait qu’Avignon a eu une grande tradition des spectacles et que toute la communauté, comme corpus, participait aux processions et à la mise en scène.
C’est ce composant « théâtral » qui, on peut le penser, donne au XV ͤ siècle un moyen de se séparer de la tradition qui voit la mort comme un moyen de toucher la sensibilité du pécheur. C’est que les processions, comme l’a bien décrit Jacques Chiffoleau, servaient de memento mori aux vivants. C’est pour ça qu’on ne peut pas être d’accord avec ceux qui avancent que l’iconographie de la mort est toujours  liée  aux  crises  qui  ont  caractérisé  le  XIV ͤ  siècle.  L’historien Alberto Tenenti met en évidence un des études qui ont cherché à ramener les représentations de la mort entre les XIII ͤ et XV ͤ siècle à une racine commune, celle de l’historien de l’art Henry Thode[46], fait ʺfausse route ̋ dans le moment où il les considère comme des allégories qui doivent leurs sources à François d’Assise ; c’est une constatation fausse, considérant que les franciscains ont aussi contribué à la diffusion des images macabres, mais qu’ils ont exercé une influence limitée à la fin du Quattrocento[47]. On pense que – parfois – l’histoire de la société et l’histoire de l’art se poursuivent dans une direction “isolée” par rapport aux moments de grandes crises et de forts changements, si bien qu’un moment qui peut être considéré comme un « jour d’après » politique et social, ne peut pas être entièrement attribuable à une nouvelle iconographie introduite dans la société. Les changements iconographiques sont trop lents et ils ont besoin de temps pour s’affirmer et entrer dans la société. Ils ne vivent pas à la vitesse des changements politiques et économiques. On ne nie pas – parce que ce serait impossible – qu’ils subissent ces changements, mais ils n’en dépendent pas totalement. Quand l’art change, on ne doit pas penser que ce changement est forcément lié aux crises des siècles, mais il se modifie doucement en un processus trop long – comme l’a démontré Jacques Chiffoleau pour le cas avignonnais – pour affirmer qu’elle a sûrement eu un « jour d’après » suivant les grandes crises.

di VALENTINA SALIERNO
valentina.salierno@studio.unibo.it


BIBLIOGRAPHIE

P. ARIÈS, Essais sur l’histoire de la mort en Occident du Moyen Âge à nos jours, éditions du Seuil, 1975

S. BALOSSINO, “Vie citadine, vie religieuse aux alentours des Célestins : un vide théâtral ? » communication à la journée d’étude « Théâtre dans le patrimoine : Les Célestins » du13 juin 2019, à paraitre chez éditions universitaires d’Avignon ».

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TABLEAUX

(Fig. 1) Buffalmaco, Trionfo della morte, Campo Santo de Pise, 1336-41.
(Fig. 2) Monument funéraire du Cardinal De La Grange, Transi, Musée du Petit Palais, Avignon, 1403. «Spectaculum facti sumus mundo ut majores et minores in nobis clare videant ad quem statum redigentur, neminem excludendo, cujusvis status sexus vel ætatis. Ergo miser cur superbis, nam cinis es et in cadaver fetidum, cibum et escam vermium ac cinerem, sic et nos, reverteris»
(Fig. 3) Francesco Laurana, Portement de Croix, 1478, église de Saint-Didier, Avignon.
(Fig. 4) Nicolas Froment, Triptyque du Buisson ardent, 1475-76, Aix-En-Provence.
(fig.5) Gentile Da Fabriano, Adorazione dei Magi, 1423, Uffizi, Florence.

NOTES

[1] J. CHIFFOLEAU, Perché cambia la morte nella regione di Avignone alla fine del Medioevo (1982). Il est une étude reprise dans un discours du XI Convegno internazionale di Lovanio su La Morte nel Medioevo (21-23 mai 1979) et dans un séminaire qui a eu lieu à l’Université de Bari, en février 1980. L’historien étudie la mort dans la région avignonnaise et dans le Comtat Venaissin au XV siècle à travers une analyse de 600 actes qui était près l’Archive avignonnais et du comtat Venaissin. Ils sont capables, selon l’historien, de donner un imaginaire plus « vrai » du changement de sentiment vers la mort. La raison de l’étude n’est pas d’aller contribuer à l’histoire de la mort, mais d’assumer « la morte come rivelatrice del ruolo specifico della religione nella vita sociale ».

[2] É. MÂLE, L’art religieux de la fin du Moyen âge en France, étude sur l’iconographie des Inscriptions et Belles-Lettres, Armand Colin éditeur, 19087, Chapitre II, L’ART ET LE THEATRE RELIGIEUX, p. 35-84.

[3] Ibidem, p. 89.

[4] Ibidem, p. 36.

[5] Ibidem, p. 42.

[6] On se réfère au cas des processions ou de fêtes. On a témoignage du récit des farces, ou moralité, mais on n’a pas de pièce.

[7] Avec le mot “théâtre” on entend tous les manifestations : dépouillés de l’idée de théâtre qui est aujourd’hui commune, on entend toute les manifestations, processions ou spectacles, impliquant deux acteurs : un public et un acteur, entendu non pas comme un acteur professionnel, mais comme le protagoniste d’un acte.

[8] P. VENTRONE, Simbologia e funzione delle feste identitarie in alcune città italiane fra il XIII e XV secolo, in «Teatro e Storia» n.s. 34, 2013, p. 285.

[9] En 1378, peu après l’élection du pape Urbain VI, au siècle Bartolomeo Prignano, par la volonté des cardinaux désaccords et réunis à Fondi, fut élu Robert de Genève sous le nom de pape Clément VII. Le grand débat qui naquit immédiatement après la double élection papale ne concernait pas tant l’autorité et le pouvoir de l’Église que la suprématie de celui qui le détenait. Cela devint bientôt un prétexte aux luttes pour la domination en Europe entre la France et l’Empire et pour les luttes en Italie entre républiques et seigneuries. Cette instabilité, qui conduisait à ne pas pouvoir identifier avec une certitude absolue qui était le Pasteur de la Chrétienté engendra un choc collectif, qui se manifesta – surtout – dans une diffusion toujours plus prépondérante d’une littérature apocalyptique qui donnait voix à l’incertitude manifeste dans laquelle toute la société était tombée. Mais, surtout, il avait eu lieu des autres crises, qui avaient frappé l’Occident : la grande famine de 1315 avait dévasté certaines zones européennes, et l’avait destiné à une crise qui déchira la population tant au niveau social qu’économique; la grande pandémie, connue sous le nom de “peste noire” de 1348, avait signifié un effacement des équilibres sociaux et politiques et avait donné naissance à un état d’urgence ; la guerre de Cent Ans (1337-1453) qui a vu comme acteurs principaux les deux monarchies nationales de France et d’Angleterre. C’est surtout la peste noire qui est rappelée comme cause déclenchante de toutes ces crises, qui amène une partie des historiens à la considérer comme une “césure” entre l’époque médiévale et l’époque moderne. La Peste noir, précédée dans la région de la France et de l’Italie par la famine du 1346-47 est présenté comme un phénomène terrifiant, « distruggere il mondo intero », selon le poète Petrarque, et défini par le chroniste Matteo Villani « lo isterminio della generazione umana ». Des études intéressantes pour avoir un autre point de vue sur la question sont ces de deux historiens de l’Université de Bologne: F. ROVERSI MONACO, «Le audacie del pensiero»: letteratura e storiografia sul Grande Scisma d’Occidente, in B. Pio, a cura di, Scritti di storia medievale offerti a Consiglia de Matteis, Fondazione centro italiano di studi sull’alto medioevo, Spoleto, 2011. B. PIO, Un secolo in chiaro scuro: il Trecento tra crisi e rinnovamento, in B. Pio, Parmeggiani, R., L’università in tempo di crisi. Revisioni e novità dei saperi e delle istituzioni nel Trecento, da Bologna all’Europa, Bologna, CLUEB, 2016. L’analyse faite par l’historien est intéressante par la lecture qu’il fait de la “Crisi del Trecento”. Il analyse les crises comme des phénomènes “in chiaroscuro” pour souligner comment ces crises ont été un moment où des institutions, comme celle universitaire, ont vécu un moment de renouvellement. En ce qui concerne le phénomène de la “Peste nera”, la mesure précautionneuse que les territoires ont pris était beaucoup. Pour l’Italie, une des mesures prises était concernant le commerce d’outre-mer, surtout pour des villes comme Gênes et Venise. L’historien Lorenzo Pubblici dit que la ville de Gênes avait perdu environ 40% de sa population, tandis que Venise passe de 120000 (1338) à 65000 habitants (1351). Malgré cette baisse de population, les deux villes réussirent à ne pas s’agenouiller et à rester deux des puissances maritimes les plus importantes. Pour un approfondissement, on signale l’étude de Lorenzo PUBBLICI, Venezia e il Mare d’Azov: alcune considerazioni sulla Tana del XIV secolo, Archivio Storico Italiano Vol. 163, No. 3 (605) (luglio-settembre 2005), pp. 435-483, Leo S. Olschki Editore, Firenze, 2005.

[10] Depuis le début de la christianité, les réflexion sur le sens de la mort et de la fin du monde ont caractérisé la plupart des œuvres et discussion des écrivains ecclésiastiques, au point que, selon l’historien R. RUSCONI, (L’attesa della Fine, Crisi della società, profezia ed Apocalisse in Italia al tempo del grande scisma d’Occidente (1378-1417), Istituto Storico italiano per il Medio Evo, Studi Storici – Fasc. 115 – 118, Roma, 1979), on peut faire rentrer dans l’« eschatologie » toute la pensée de la tarde antique et celle du Moyen Âge. En effet, depuis le VIIe siècle jusqu’au début du XIVe siècle, commence à s’animer une littérature eschatologique-apocalyptique par des clercs et des intellectuels, qui reflète non seulement les préoccupations de la partie savante de la société, mais une mentalité enracinée et généralisée, qui appartient désormais à toute la société médiévale. Une littérature de ce genre n’est pas la seule à alimenter cette période : l’exigence du réalisme caractéristique de la mentalité médiévale aussi dans la religion, avait besoin de déterminations concrètes. Alors que dans la littérature eschatologique ils descendaient deux informations : i signa de la fin du monde et les dramatis personae, qui sont les protagonistes des événements de l’histoire. C’était la tentative de lire l’histoire du futur en illuminant le présent et le passé. L’Apocalypse est le texte sacré qui est lu avec les mêmes intentions pour lesquelles il a été écrit, une « révélation » à laquelle s’associent d’autres écrits de nature biblique, dont le Nouveau et l’Ancien Testament et les sermons eschatologiques des Évangéliques synoptiques ; ces écritures et leur applicabilité dans le quotidien donnent vie à un imaginaire symbolique, un répertoire inépuisable d’images qui prennent appui sur toute la société.

[11] L. BELLOSI, Buffalmacco e il Trionfo della Morte, Einaudi, Torino 1974; R. BARTALINI, “Bonamicho excellentissimo maestro”. Sul Buffalmacco di Luciano Bellosi, Prospettiva, luglio-ottobre 2016, No. 163/164 (luglio-Ottobre 2016), pp. 76-87. https://www.jstor.org/stable/10.2307/26706025

[12] L’expression est reprise dans l’étude de Jacques Chiffoleau. On reporte la référence : expression de l’auteur anonyme du Chronicon parvum avinionense de schismat e et de bello, édit par F. Ch. Carrieri in « Annales d’Avignon et du Comtat Venaissin », 1916, p. 173.

[13] Le transi est identifié par Ariès comme l’un des phénomènes qui se manifestent dans l’histoire de l’art au moment où l’homme médiéval se retrouve face à la mort : il est remarquable que dans l’art la représentation de la mort sous les traits d’une momie, d’un cadavre à demi décomposé, est moins répandue qu’on ne le croit. Elle se trouve surtout dans l’illustration de l’office des morts des manuscrits du XV siècle, dans la décoration pariétale des églises et des cimetières (La Danse des Morts)., p. 38.

[14] Jacques CHIFFOLEAU, Perché cambia la morte nella regione di Avignone alla fine del Medioevo (1982) , p. 449.

[15] Ivi, p. 450.

[16] La référence est donnée par Jacques CHIFFOLEAU, ouv. cit. : P. TOUBERT, Les structures du Latium Médiéval, Paris, Bibliothèque des Écoles françaises d’Athènes et de Rome, 1973, tome I.

[17] Ivi, p. 450.

[18] J. CHIFFOLEAU, ouv. cit., p. 450.

[19] Ivi, p. 452.

[20] C’est utile de rappeler ici qu’il y a des images produites pendant ces années qui sont toujours liées à la crise que les hommes ont vécue. C’est important poser l’attention sur des imagines comme celle élaborée par Eustache Deschamps.

[21] J. CHIFFOLEAU: «È difficile negare ogni esistenza allo choc provocato dall’arrivo della peste, ma nei testamenti questo trauma non si fa sentire che con ritardo ed in forma indiretta. Le allusioni esplicite sono rarissime, le pompe funebri non cambiano affatto; tutt’al più si può osservare, in certi casi, una leggera crescita, non duratura, delle offerte ai chierici e ai religiosi (facilitata forse dalla sparizione di eredi potenziali)», p. 456.

[22] Ivi, p. 454: «Tutto avviene come se la presenza della famiglia e dei vicini non bastasse più per compiere il rito di separazione (a meno che quei «figuranti» non assumano la funzione di parenti assenti o defunti)».

[23] Ibidem, «Lungo tutto il secolo XV, ad Avignone, il numero delle torce che, perfino in pieno giorno, devono circondare il defunto cresce in maniera regolare, tanto fra gli artigiani che fra i notabili e i mercanti. È esclusivamente intorno e in funzione della salma che si organizzano le pompe funebri «flamboyantes».

[24] Ivi, p. 456.

[25] Ibidem.

[26] Ivi, p. 460: «Ciò che fa paura soprattutto è la morte solitaria, la morte senza rito. Non solo perché si rischia di non andare in paradiso, ma anche perché in questo modo una tradizione, una continuità rassicurante sta per essere frantumata. Ora, la funzione fondamentale dei riti funerari è precisamente, ricordiamocene, quella di dare ai morti un posto, «il loro» posto tanto nello spazio loro riservato (cimitero, chiesa), quanto nella memoria collettiva e individuale dei viventi».

[27] Le titre remarque celui de E. HEMINGWAY, Paris est une fête, Éditions Gallimard, Paris, 1964.

[28] Jacques CHIFFOLEAU, ouv. cit., p. 461.

[29] A. TENENTI, La vie et la mort à travers l’art du XV ͤ siècle, Éditions Allia, Paris, 2018, Introduction, p. 11.

[30] J. LE GOFF, L’imaginaire médiéval, éditions Gallimard, Paris, 20133, p. 120 ; p. 171.

[31] A. TENENTI, ouv. cit, p. 19 – 40. L’historien met en évidence comme tout une iconographie sur la mort et son triomphe sur la vie, commence à être représentée à partir du XIV siècle. Une intéressante confrontation est faite avec la scène imaginée par Pétrarque, avec les Triomphes (écrits de 1356 à 1374) et la fresque de Pise, qui marque une nouvelle étape dans la représentation de la mort.

[32] A. TENENTI, ouv. cit., p. 41.

[33] J. CHIFFOLEAU, ouv. cit., p. 454.

[34] A. TENENTI, ouv. cit., p. 115.

[35] P.  PANSIER,  Le  débuts  du  théâtre  à  Avignon  à  la  fin  du  XV ͤ  siècle,  in  Annales  d’Avignon  et  du Comtat Venaissin, 1919 p. 5-52 , cote P 754, Bibliothèque Ceccano, Archivés départementales de Vaucluse, p. 5

[36] S. BALOSSINO, “Vie citadine, vie religieuse aux alentours des Célestins : un vide théâtral ? » communication à la journée d’étude « Théâtre dans le patrimoine : Les Célestins » du 13 juin 2019, à paraître chez éditions universitaires d’Avignon » : « En 1382 le conseil de ville, en plein grand schisme, organisé sur le parvis de l’église des dominicains un jeu qui met en scène la prise de la ville de Troie. Ce spectacle, en présence du duc d’Anjou, est rappelé par le faste dans la mise en scène et la participation citadine ».

[37] Ibidem.

[38] J. BASCHET, L’iconographie médiévale, Éditions Gallimard, 2008, trad.it. di Fabio Scirea, L’iconografia medievale, Editoriale Jaca Book spA, Milano, 2014., p. 9.

[39] S. BALOSSINO, ouv. cit.

[40] P. PANSIER, Les Peintres d’Avignon aux XIVème et XVème siècles. Biographie et documents, cote 4° 15774, Bibliothèque Ceccano, Archives départementales de Vaucluse, p. 53.

[41] Rose-Marie Ferré-Vallancien, De la théâtralité des images : l’exemple du retable du Portement de croix de Francesco Laurana pour le roi René (1478), in Chantal Connochie-Bourgne, Valérie Gontero-Lauze (dir.), Les Art et les Lettres en Provence au temps du roi René, p. 197-208. Article disponible en ligne : Les Arts et les Lettres en Provence au temps du roi René – De la théâtralité des images : l’exemple du retable du Portement de croix de Francesco Laurana pour le roi René (1478) – Presses universitaires de Provence (openedition.org).

[42] P. PANSIER, Le débuts du théâtre à Avignon à la fin du XV ͤ siècle, ouv. cit, p. 9 : « En 1477, c’est le peintre Nicolas Froment qui élève le cadafau ou escafaux de la Fête-de-Dieu. Sa mise en scène est très compliquée. Il paraît l’avoir combinée en forme de triptyque ».

[43] É. MÂLE, L’art religieux de la fin du moyen âge en France, étude sur l’iconographie des Inscriptions et Belles-Lettres, Armand Colin éditeur, 19087, p. 51.

[44] Ibidem, p. 70.

[45] P. MICHEAULT, La Danse des aveugles, [Bréhant-Loudéac] s.d. ; fol. Cv (B. N. P., Rés. P. Ye. 230) référence en Alberto TENENTI, ouv. cit., p. 46.

[46] Henry THODE, Saint François d’Assise, et les origines de l’art de la Renaissance en Italie, 1910.

[47] A. TENENTI, ouv. cit., p. 118.

«Lutum magnum et turpe inficiens»

Une affaire de pollution à Avignon à la fin du Moyen Âge

Di Emilien Segantini

Résumé

En ville, nul besoin de chercher pour trouver des résidus de l’activité et de la consommation humaines. Des canettes de bières aux chewing-gums, des mégots de cigarettes aux cartons d’emballage ou plastiques de toutes sortes, nombreuses sont les sources de pollution de l’espace urbain. Mais qu’en était-il au Moyen Âge ? Trois actes, rédigés entre la fin du XIVème et le début du XVème siècle, conservés aujourd’hui aux Archives départementales de Vaucluse, permettent d’en savoir un peu plus sur la question. Cette contribution, prenant la forme d’une étude de cas, se veut tout à la fois stimulante, pédagogique et propédeutique. Elle cherche, d’une part, à montrer comment lire, comprendre et interpréter un document médiéval et, de l’autre, à éveiller l’intérêt du lecteur pour des problématiques qui méritent d’être approfondies.

Riassunto

In città, non c’è bisogno di cercare per trovare dei residui dell’attività e del consumo umano. Dalle lattine di birra ai chewing-gum, dai mozziconi di sigaretta ai cartoni di imballaggio o plastiche di qualsiasi tipo, ci sono tante fonti di inquinamento dello spazio urbano. Ma com’era la situazione durante il Medioevo ? Tre atti notarili, realizzati tra la fine del Trecento e l’inizio del XV secolo, attualmente conservati negli Archivi dipartimentali di Vaucluse, ci danno qualche risposta. Questo contributo sviluppato sotto forma di un caso di studio, vuole essere stimolante, pedagogico e propedeutico a studi futuri. Si cerca, infatti, da un lato, di mostrare come leggere, capire e interpretare un documento medievale e, dall’altro, a suscitare l’interesse del lettore verso problematiche che meritano di essere approfondite.

Rendez-vous chez les morts

            L’intérêt des chercheurs pour ce thème de la pollution médiévale, considéré alors comme un objet d’étude spécifique, est en fait assez récent[1]. Plusieurs types de sources, des actes de la pratique aux œuvres littéraires en passant par les productions iconographiques, sont depuis lors réétudiés à l’aune de ces questionnements. L’attention notamment portée à la terminologie employée, aux détails qui pouvaient à première vue paraître anecdotiques, révèlent souvent la « gravité d’une pollution domestique et collective », mais aussi quotidienne et permanente, affectant ces sociétés urbaines médiévales[2]. Sur ce point, il faut d’ores et déjà noter que les actes étudiés ici ne sont en rien extraordinaires. Au contraire, ils font partie des sources bien connues de ces historiens. La teneur même de ceux-ci connaît, à quelques variations près, de multiples équivalents. Néanmoins, il semble intéressant de mener une analyse qualitative, dans le détail de ces trois règlements, et d’y chercher les formes que peuvent prendre cette pollution urbaine et les éventuels moyens curatifs mis en place pour y remédier. Se faisant, il faut également interroger la structure des documents, l’identité et le rôle des acteurs qui y sont présentés, les différentes étapes de la procédure engagée.

            De prime abord, l’analyse d’un acte rédigé en latin n’est pas chose facile. Plusieurs barrières peuvent en effet freiner la compréhension de celui-ci ; identifier les lettres et les mots selon la qualité de rédaction du scribe ou tout simplement l’état de conservation du document, décrypter les nombreuses abréviations parcourant le texte – surtout à la fin du Moyen Âge –, traduire enfin les termes et notions parfois propres à une période, à une localité, à un contexte spécifiques. Fort heureusement, les règlements de cette époque respectent toutefois une certaine logique du point de vue de leur structure[3]. C’est notamment le cas des trois manuscrits avignonnais retenus ici. En ce sens, la mention du nom et du titre des actants, celle du jour mais aussi du lieu à l’intérieur duquel ils se réunissent, formulent le contenu de l’acte et enfin apposent leurs sceaux en bas du document, sont autant d’informations capitales qu’il s’agit de déceler en premier lieu. Par ce biais, il est alors possible de recontextualiser le récit à l’aune de la conjoncture d’antan.

            La date de rédaction d’un document médiéval – tout au moins au cours de ces derniers siècles – peut être insérée aux deux antipodes du corps du texte, c’est-à-dire au tout début ou à la toute fin de celui-ci. Sur ce point, l’acte de 1395 est un peu différent en ce sens qu’il est en fait l’addition de trois événements – sur lesquels il faudra bien sûr revenir par la suite. Par conséquent, il faut prendre garde de ne pas relever la date afférente à cette troisième section et de considérer l’information comme valable pour l’ensemble du document. Une lecture attentive permet néanmoins de relever, en plein cœur du texte, la partie de phrase suivante : « anno a Nativitate Domini millesimo trecentesimo nonagesimo quinto indictione tertia cum eodem anno sumpta die vero lune intitulata quartadecima mensis junii pontificatus sanctissimi in Christo Patris et Domini nostri domini Benedicti divina providentia pape tertii decimi anno primo ». Si la première partie de l’extrait donne une date complète, à savoir celle du 14 juin 1395, les derniers mots en confirment l’année. En effet, le cardinal Pedro de Luna devient pape sous le nom de Benoît XIII en 1394[4]. Eu égard au fait qu’il s’agisse ici de l’« anno primo » de son pontificat, l’année 1395 est donc bien confirmée. Trois mots, inscrits dans les premières lignes du texte, viennent par ailleurs compléter ces connaissances et affiner la chronologie à l’échelle des heures : « tunc hora vesperorum ». L’expression, signifiant littéralement « à l’heure des vêpres », ne laisse en effet aucune ambiguïté quant au bornage d’un intervalle de temps au cours duquel se tient cette réunion. En tant que dernière heure canoniale de la journée, les vêpres correspondent à la fin de l’après-midi, lorsque le soleil commence à décliner.

            Par ailleurs, l’évocation du lieu d’établissement de l’acte, qui peut sembler à première vue anecdotique, est en réalité fort intéressante. En effet, l’événement se déroule dans le cimetière de l’église Saint-Pierre d’Avignon. La réalité de ce détail est en fait toute médiévale ; le cimetière, espace dans lequel reposent les morts de la communauté, est également champ de vie, place publique, lieu de sociabilité. Intégré géographiquement dans le tissu urbain, omniprésent à l’intérieur des murs d’Avignon dans des dimensions parfois considérables, il l’est aussi socialement par les usages et les pratiques qui se développent en son sein[5]. Pour sa part, l’église Saint-Pierre est entourée sur trois côtés (nord, est, sud) par un cimetière[6]. C’est à l’intérieur de celui-ci que se tient, tous les samedis au moins jusqu’à son interdiction en 1306, le marché aux bestiaux[7]. Plusieurs règlements de plaintes, conservés dans le fonds du chapitre de Saint-Pierre, confirment par ailleurs cette utilisation profane du cimetière dans la première moitié du XIVème siècle[8]. Sur un autre plan, des réunions officielles sont de même convoquées en ces lieux. Ainsi, les maîtres des rues s’y réunissent, par exemple, en 1395 et encore plusieurs fois au XVème siècle, comme en témoignent d’autres documents d’archives[9]. Non loin du couvent des Augustins et de la rue polluée dont il sera question plus tard, c’est donc ici que siègent un certain nombre d’hommes sur lesquels il faut maintenant s’arrêter.

            Après avoir situé la rédaction de l’acte dans le temps et dans l’espace, il faut chercher à déterminer le nom des acteurs engagés dans l’affaire, ainsi que leurs titres et rôles à jouer dans celle-ci. Ici, il s’agit, à quelques exceptions près, des mêmes protagonistes dans chacun des trois documents étudiés. L’acte de 1395 en présente huit. D’une part, le prêtre (« presbytero »), chanoine (« canonico ») de l’église Saint-Agricol d’Avignon et directeur des travaux du palais apostolique (« operum sacri palatii apostolici directori ») Jean Bisacii[10] et le portier (« ostiario ») de la « Porte de fer » Jean Juliani[11] ; d’autre part, le damoiseau (« domicello ») Bertrand Gaufridi, le bourgeois d’Avignon (« burgensi Avinionensibus ») Jean Artaudi et le bachelier en lois (« bacallario in legibus ») et citoyen de la même ville (« civi Avinionensi ») Jean de Ponte de Laude.La présentation de ces protagonistes en deux groupes distincts n’est pas anodine car, en réalité, une divergence – qui pourrait être qualifiée de hiérarchique – les distingue. En effet, les deux premiers, membres du clergé ordinaire, sont nommés « pro corthesanis » par l’archevêque de Narbonne (« archiepiscopum Narbonensem ») et camérier du pape (« domini nostri pape camerarium ») François de Conzié, tandis que les trois derniers, laïcs, sont choisis « pro civibus » par le damoiseau (« domicellum ») et viguier (« vicarium ») Pierre de Balaysono ou Baylaysono selon les actes. Un ultime personnage vient clore cette liste nominative. Il s’agit en fait du principal intéressé, de celui qui soumet sa demande aux protagonistes susmentionnés et espère y trouver satisfaction : Jean Robberti, frère du couvent des Augustins d’Avignon.

            Au total, cinq hommes sont élus. Mais quelle forme revêt leur investiture ? Et à quelle fin sont-ils convoqués par le frère d’un couvent mendiant ?

Acte de 1395 témoignant d’un cas de pollution à Avignon (Archives départementales de Vaucluse, 1H7/5). Cliché de l’auteur

Un parfum de mauvaise odeur

            D’après les mots mêmes du texte, ces cinq personnages deviennent « magistris vicorum, carreriarum seu transituum ac appendentiarum curie Romane seu civitatis Avinionis ubi curia Romana residebat ». Plus simplement, ils sont en fait élevés au rang de « maîtres des rues » d’Avignon. Cet office municipal, institué au cours des siècles précédents, charge trois officiers de la surveillance des voies publiques, dans leur utilisation comme dans leur entretien[12]. C’est notamment eux qui veillent à la propreté et au nettoyage des rues, à l’installation de constructions particulières sur le réseau viaire de la cité ou au contraire à la destruction de celles pouvant obstruer le passage. Mandatés par le conseil de ville, ces maîtres des rues ont autorité pour imposer leurs décisions. L’acte de 1395 est, à cet égard, révélateur. En effet, la troisième partie du document rapporte le contenu de lettres patentes investissant de leurs fonctions les deux maîtres des rues nommés pour les courtisans d’Avignon, Jean Bisacii et Jean Juliani. Il est même précisé, un peu plus haut dans le texte, que ces lettres datées du 29 novembre 1391 sont rédigées sur parchemin (« in pargameno ») et marquées du sceau pendant de cire rouge de l’office caméral. D’après la teneur de celles-ci, ces officiers doivent jurer de prescrire, ordonner, décréter, réformer, contraindre, connaître, définir et faire tout ce qui appartient à la charge qui leur est confiée. Le camérier du pape, sous l’autorité duquel sont rédigées ces lettres, demande également à tous les officiers pontificaux, à tous les autres tant citoyens que courtisans, clercs ou laïcs, monnayeurs et personnes de quelque condition que ce soit, d’obéir auxdits maîtres des rues. De même, l’auditeur de la curie pontificale, le maréchal de la curie romaine, l’official, le viguier de la cour temporelle et les autres juges et officiers ecclésiastiques ou laïcs exerçant une quelconque autorité ne doivent en aucune manière empêcher ou perturber l’exercice de leurs fonctions. Au contraire, ils sont tenus de leur obéir efficacement et de leur apporter aide, conseil et assistance quand cela est nécessaire. Ces élus ont donc, au moins en théorie, une marge de manœuvre assez large en ce qui concerne la gestion des rues de la ville. Et si le frère du couvent des Augustins fait appel à eux, c’est qu’il existe un problème relevant justement de leurs attributions. En ce sens, l’acte du 14 juin 1395 permet d’en apprendre davantage.

            Peu avant la rédaction de cet instrument, peut-être quelques jours voire quelques semaines plus tôt comme semble l’indiquer l’expression latine « nuper », Jean Robberti expose une requête aux cinq maîtres des rues réunis dans le cimetière de Saint-Pierre. Représentant à cette occasion le couvent auquel il appartient, le frère augustin souhaite en effet élever deux tables dans un lieu angulaire ou une place (« loco angullari sive platea ») situé devant l’une des portes de l’église conventuelle. Plus précisément encore, la zone serait comprise entre deux piliers porteurs de l’édifice appelés vulgairement « achoas » – un terme probablement local pouvant renvoyer à l’idée de contreforts. Une brève digression concernant la situation géographique des Augustins semble nécessaire à ce stade. Probablement arrivés à Avignon dans les années 1260-1270, ils s’installent une vingtaine d’années plus tard aux abords de la rue Carreterie, hors des remparts de la ville[13]. Faisant face à un autre couvent mendiant, celui des Carmes, ils prennent alors pied sur le territoire de la paroisse Saint-Pierre, tandis que leurs confrères sont implantés sur la paroisse voisine de Saint-Symphorien. En 1395, soit près d’un siècle après leur établissement définitif, leur couvent est déjà doté d’un grand clocher, lequel est toujours visible aujourd’hui. De plus, le frère désire également protéger ces tables par l’apposition d’un toit convenable (« tegimento condecenti »). L’opération achevée, ce local jouxtant l’église des Augustins pourrait alors être loué par des « mechanicis » – sans doute faut-il entendre ici des artisans.

Photographie de la rue Carreterie avec vue sur le clocher des Augustins en arrière-plan. Cliché de l’auteur.

            D’un autre côté, Jean Robberti souhaite voir la mise en place d’une calade (« calatam ») s’étirant « usque ad medium carrerie ». Prenant la forme d’une voie de communication pavée à l’aide de galets simplement fichés dans le sol et sur champ, la calade est en réalité typique de la région provençale. Un article, tiré des statuts d’Avignon au XIIIème siècle, précise même qu’il devait s’agir de petites pierres, « de lapidibus minutis[14]». Améliorant la circulation ainsi que l’image même de la cité, cette entreprise d’assainissement des voies publiques retient de plus en plus l’attention des autorités urbaines médiévales à partir du XIVème siècle[15]. Et cela est d’autant plus important en ce lieu que la rue Carreterie constitue un axe de circulation fréquenté ; prolongée hors de l’enceinte par une route menant à l’Isle ou à Carpentras, c’est sur elle que débouche le portail Saint-Lazare. Loin d’être abandonnée avec le temps, l’installation de calades est encore monnaie courante dans certaines villes comme Avignon. Ainsi, une telle forme de pavage est par exemple identifiable place de l’Horloge. Une rue Calade existe déjà au XVIème siècle et une rue de la Petite Calade lui est voisine[16] – autre preuve de l’importance des données toponymiques dans la connaissance du passé d’une ville. Jusqu’en 1395, aucun chantier de pavage n’avait été entrepris rue Carreterie, notamment du fait de la cavité existante devant cette place ou ce lieu angulaire mentionné plus haut.

            L’autre raison avancée pour justifier une telle absence fait précisément intervenir la pollution jonchant le sol de la rue du couvent. Selon ce qu’en dit l’acte, le rejet de fumiers, de boues, d’ordures et d’autres immondices (« projectionem stercorum, lutorum, sterquiliniorum et aliarum immundiciarum ») provenant des tavernes, étuves et autres hospices alentours et l’impossibilité de leur écoulement avait produit un immense bourbier (« lutum magnum ») infecte et polluant de manière inconvenante la rue, les voisins et empêchant charretiers et cavaliers de la traverser. La puanteur (« fetor ») qui se dégage de cette fange est d’ailleurs telle que personne ne peut demeurer sans difficulté dans la rue ou dans l’église du couvent, cela même lorsque les frères célèbrent le divin office. Pour appréhender l’ampleur de cette pollutio urbaine, il faut prendre du recul et considérer son environnement direct, autrement dit la rue médiévale. Indubitablement différente de celle d’aujourd’hui, dans ses dimensions comme dans son occupation, cette dernière est le terrain de déambulations humaines et animales régulières, répétées. Avec elles, c’est tout un agrégat composite qui s’accumule et stagne à ciel ouvert : les détritus alimentaires, les eaux usées, les matières fécales, sans compter les aléas climatiques pouvant être à l’origine d’écoulements boueux par exemple. À ce tableau quotidien pour les hommes de la fin du Moyen Âge, il ne faut pas non plus négliger les mauvaises odeurs ambiantes[17]. Un exemple local suffit à résumer le propos et à souligner l’importance de ce phénomène. En 1390, soit peu de temps avant l’affaire qui occupe ces quelques lignes, il faut plus de deux mois à la ville d’Avignon pour nettoyer la rue Palapharnerie « si grande était la masse des immondices accumulées » en ce lieu[18].

            Ainsi donc, le frère augustin sollicite le consentement et l’autorisation desdits maîtres et assesseur présents afin de ne pas être empêché dans la mise en application de ce projet qui, comme il est bien rappelé, ne doit en aucun cas porter préjudice à quiconque. Les bénéfices de cette entreprise, probablement avancés par Jean Robberti et retranscrits par la suite dans l’acte du 14 juin, seraient multiples : un ou deux « mechanicis » bénéficieraient alors d’un espace de travail protégé, ces nouvelles constructions décoreraient la « res publica » de la ville et, enfin, le lieu infecté pourrait être débarrassé des ordures qui le jonchent et des odeurs qui en résultent. Pour appuyer ses dires, il invite même les maîtres des rues à se rendre sur les lieux du désagrément. De cette manière, ils pourraient constater le problème de leurs propres yeux, déterminer si le chantier ne porte pas préjudice à la ville et confirmer l’utilité ainsi que le potentiel décoratif de celui-ci. La suite de l’acte permet de savoir que les juges de cette affaire répondent favorablement aux demandes du frère. Mais ne font-ils vraiment que consentir ?

            Dans un deuxième temps, l’acte rapporte le verdict des maîtres des rues prononcé le 14 juin 1395. Après avoir constaté de leurs propres yeux les problématiques soulevées par le frère Jean Robberti et vérifié que ces dernières n’entrent pas en conflit avec les statuts provinciaux et municipaux, les cinq officiers en charge de la surveillance et de l’entretien de la voirie d’Avignon peuvent statuer. La réponse, positive, permet au couvent des Augustins d’édifier ou de faire édifier dans le lieu désigné deux tables avec un toit convenable pour les louer ou les utiliser d’une autre manière. La première doit être placée dans la partie supérieure ou à l’est au détour de la taverne vulgairement appelée « de Petra ». En outre, sa longueur est fixée à quatre palmes. En ce qui concerne la seconde table, disposée à l’inverse dans la partie inférieure ou à l’ouest, elle doit faire face à l’hôpital Notre-Dame de la Majour[19] ou au Portail Matheron. Plus réduite que l’autre, ses dimensions se limitent à deux palmes et demi de long. Il est ajouté que la largeur des deux tables ne doit pas dépasser un fil ou une droite allant d’un pilier à l’autre de l’église, l’espace restant devant être maintenu tel quel afin de permettre l’accès à la porte près de laquelle elles seraient installées. L’accord reconnaît également la possibilité de faire élever une calade jusqu’au milieu de la rue, à condition toutefois que le couvent s’occupe de l’entretien et de la réfection de celle-ci tant qu’existent les deux tables et afin que la rue reste propre et en bon état. En cas de négligence dans l’exécution de cette tâche, les bénéfices réalisés à ces tables doivent alors revenir à la communauté de la cité d’Avignon. Telles sont donc les prérogatives reconnues par les maîtres des rues au frère Jean Robberti et, par extension, au couvent des Augustins de la ville.

            D’un commun accord, les parties – plaignant et juges de l’affaire – demandent enfin au rédacteur d’établir autant d’actes que nécessaire. Sans doute en reçoivent-elles toutes deux un exemplaire. Les informations relatives à ce personnage chargé de la mise par écrit des décisions sont toujours inscrites à la fin du document. En quelques lignes, lesquelles sont par ailleurs détachées du corps du texte par un espace, l’identité de ce protagoniste, ses fonctions, l’autorité qui l’engage et son rôle dans la procédure sont ainsi déclinés. En 1395, il s’agit de Pierre Jacobi. Parlant, comme souvent, à la première personne, il se présente comme étant clerc d’Avignon (« clerico de Avinione »), notaire par autorité impériale (« auctoritate imperiali notario ») et scribe des maîtres des rues (« magistrorum carreriarum scriba »). Après avoir mis par écrit les tenants et aboutissants de cette procédure, il appose enfin son seing. Prenant la forme d’une illustration plus ou moins travaillée, celui-ci atteste de la véracité des faits retranscrits et authentifie le document produit. C’est, d’une certaine manière, l’ancêtre de la signature moderne[20].

Seing manuel de Pierre Jacobi, (Archives départementales de Vaucluse, 1H7/5), clichè de l’auteur.

            L’histoire, toutefois, ne s’arrête pas en 1395. Deux actes, élaborés quelques années plus tard et aujourd’hui conservés dans le fonds des Augustins d’Avignon, sont là pour en témoigner. Quels éclairages supplémentaires apportent-ils donc sur cette affaire ?

Pierre d’achoppement, échoppe de pierre

            Le second acte relatif à ce cas de pollution urbaine médiéval est établi au tout début du XVème siècle. Il s’ouvre sur l’exposition des protagonistes présents lors de la réunion antérieure dans le cimetière de Saint-Pierre et des demandes du frère augustin pour le compte de son couvent. Ainsi que le rappelle le notaire du document, toutes ces informations sont déjà relatées dans l’« instrumento publico » du 14 juin 1395, c’est-à-dire celui justement analysé plus haut. Rédigé pour sa part le 10 novembre 1407, ce règlement prend forme sous le pontificat du même pape que précédemment, à savoir Benoît XIII. Néanmoins, de nouveaux maîtres des rues viennent remplacer ceux de 1395. Sans compter la présence du licencié en lois (« licenciato in legibus ») et cosyndic (« consindico ») d’Avignon Foresio Nini(?), il s’agit du damoiseau (« domicello ») Georgio Hugonis et du bourgeois (« burgense ») Berengario de Comps, lesquels sont reconnus maîtres des rues pour le compte des bourgeois de la ville. À ceux-ci, il convient encore d’ajouter le bachelier en lois (« baccallario in legibus ») et assesseur des maîtres des rues (« assessore ipsorum magistrorum carreriarum ») Jean de Ponte de Laude, qui intervient sous mandat du pape et du conseil de la cité. En vue de la résolution du problème soulevé quelques douze années plus tôt par Jean Robberti, ces derniers se réunissent cette fois-ci sur le lieu même du désagrément, là où la pollution de rue perturbe la vie sociale et religieuse du couvent.

            Le frère augustin, représentant une nouvelle fois les intérêts de son établissement, présente l’autorisation qu’il avait reçu des anciens maîtres des rues. Celle-ci lui permettait notamment d’élever deux tables avec un toit dans le but de les louer ou de les utiliser d’une autre manière. Outre l’emplacement et les dimensions de ces dernières, il rappelle aussi le droit obtenu pour dresser une calade devant le couvent. Par ailleurs, le frère entend encore améliorer cette échoppe et construire dans les limites de ce même lieu une petite maison – il est précisé « domum seu domumculam ». En réalité, le texte semble laisser entendre que cette construction est déjà commencée, voire presque terminée au moment de la réunion de 1407. Circonscrite à l’intérieur du locus problématique, elle viendrait en fait pérenniser ces étales, les faisant peut-être passer du simple bois couvert à la pierre de maçonnerie. Une transformation qui, semble-t-il, est assez fréquente à l’époque[21]. Après avoir écouté les dires de l’augustin et vu de quoi il en retourne concrètement, le cosyndic, les maîtres des rues et l’assesseur de ces derniers permettent finalement au couvent d’édifier cette maison près de leur église et à l’intérieur de la zone maintes fois sujette à discussion. Devant une foule de témoins, parmi lesquels des citoyens et des habitants de la ville, l’accord résultant de ces échanges est, en dernier lieu, lu et promulgué officiellement. Et le seing de Pierre Jacobi, déjà présent en 1395, se retrouve une nouvelle fois à la toute fin de l’acte « in fidem premissorum ».

            À ce stade, pourquoi un troisième acte ? La réponse ne peut qu’être trouvée dans le contenu du document en question. Bien plus court que les deux autres, celui-ci s’ouvre sur le résumé des demandes émises et des décisions prises lors de l’entrevue de 1395. Alors que la date de rédaction de ce règlement est inscrite à la suite, elle dénote et surprend. Logiquement, le classement des archives suit un ordre chronologique ; l’acte coté 1H7/5 date du 14 juin 1395, celui coté 1H7/7 est mis par écrit le 10 novembre 1407. Pourtant, le document suivant est du 04 novembre 1407. Ici, une erreur de cotation semble expliquer une telle rupture. Et si l’exception confirme la règle, cela prouve l’importance que revêt cette donnée – mais le lieu ou l’identité des acteurs pourraient l’être également – dans la compréhension d’une affaire déployée sur plusieurs actes. Dans le cas présent, il s’agit donc maintenant de lire ce document tout en gardant à l’esprit qu’il précède de quelques jours celui du 10 novembre 1407.

            Le 04 novembre 1407, un groupe d’hommes se réunit à Avignon « ad sonum campane ». Composé du vicaire général des Augustins, de près d’une vingtaine de frères du couvent d’Avignon et de trois bacheliers, ce chapitre de réguliers statue à propos de l’accord de 1395. Jean Robberti avait en effet promis de faire confirmer l’entente trouvée par son couvent, sans quoi celle-ci aurait perdu toute valeur juridique et n’aurait pu être mise à exécution. En conséquence, le chapitre réuni à cette date consent aux décisions prises par les maîtres des rues et s’engage à les respecter. Les frères promettent notamment de renoncer à tout droit, exemption, privilège, statut et coutume qui entrerait en conflit avec les termes fixés par les arbitres de l’affaire. Ils jurent même « ad modi religionis ponendo manus ad pectora » de ne pas y contrevenir. Cette forme de serment se retrouve en fait fréquemment dans les actes de composition faisant intervenir des communautés religieuses[22]. Dans d’autres cas, les parties posent la main sur les Évangiles[23]. Par le biais de ces mouvements rituels, ils engagent leur parole, leur honneur, leur intégrité morale – le texte parle d’un serment fait « sub cuius juramenti virtute ». En outre, ces derniers demandent au « notarium publicum » de dresser plusieurs actes stipulant les différentes clauses convenues lors de la composition. Cette fois, la réunion se déroule dans le réfectoire – ou grand tinel (« magno tinello ») – du couvent des Augustins. Le rédacteur n’est plus Pierre Jacobi mais Aymone de Monterotundo, notaire par autorité apostolique et impériale. En réalité, ce dernier apparaît déjà dans la liste des témoins de l’acte précédent. Son seing, tracé au même titre que celui de son confrère dans la partie inférieure gauche de l’acte, est un peu plus complexe et rapporte, même si de façon abrégée, son nom de famille.

Seing manuel de Aymone de Monterotundo, (Archives départementales de Vaucluse, 1H7/8). Cliché de l’auteur

            En guise de conclusion, il convient de résumer le propos et de souligner l’intérêt historique de ces trois actes. Pour sa part, le premier document révèle une affaire de pollution à Avignon, laquelle implique différents acteurs en 1395 pour tenter de résoudre un problème affectant le couvent des Augustins de la ville. Après confirmation des solutions trouvées par le chapitre des Augustins, ainsi qu’en témoigne un second acte daté de 1407, un troisième et dernier règlement pérennise le projet des frères de construire deux tables, une maison de pierre protégeant ces étales et une calade devant leur établissement, laquelle permettrait de réguler l’amoncellement des déchets dans la rue. La procédure est lente ; plus d’une dizaine d’années s’écoule entre la mention de la plainte et la reconnaissance officielle des mesures à entreprendre. Bien que cette histoire puisse sembler banale et anecdotique, elle n’en demeure pas moins instructive. Toutes proportions gardées, elle permet de s’immiscer dans le quotidien de ces hommes de la fin du Moyen Âge, de découvrir un semblant de topographie urbaine, d’entrevoir quelques-unes des problématiques, ici dues à la pollution des rues, auxquelles ils doivent faire face mais aussi les moyens curatifs qu’ils développent pour y remédier. Et, derrière ces documents rédigés dans une langue dite morte, c’est la vie d’une époque qui se laisse approcher, décrypter, recomposer au fil des actes. Quelques échos, parfois lointains, trouvent même une résonance particulière dans le contexte actuel. Et, en ce sens, l’histoire, perpétuellement réactualisée, est encore toute à écrire…

Sources et bibliographie

Sources imprimées et tapuscrites :

Archives départementales de Vaucluse, 195J294. Notes d’Anne-Marie Hayez sur les couvents mendiants d’Avignon.

MAULDE René (de), Coutumes et règlements de la République d’Avignon au XIIIème siècle, Paris, Larose, 1879.

Sources manuscrites :

Archives départementales de Vaucluse, 1H7. Privilèges accordés au couvent des Augustins d’Avignon :

  • 1H7/5. Verdict des maîtres des rues d’Avignon suite aux demandes du frère augustin Jean Robberti concernant la construction de deux tables et d’une calade devant le couvent auquel il appartient (1395).
  • 1H7/7. Verdict des maîtres des rues d’Avignon suite aux nouvelles demandes du frère augustin Jean Robberti pour l’élévation d’une maison de pierre dans le même lieu (1407).
  • 1H7/8. Confirmation de l’autorisation de 1395 par le chapitre des Augustins d’Avignon (1407).

Bibliographie :

ACHARD Paul, Guide du voyageur ou Dictionnaire historique des rues et des places publiques de la ville d’Avignon, Avignon, Seguin aîné, 1857.

CHIFFOLEAU Jacques, La comptabilité de l’au-delà. Les hommes, la mort et la religion dans la région d’Avignon à la fin du Moyen Âge (vers 1320 – vers 1480), Paris, Albin Michel, 2011 [1980].

GIRARD Joseph, PANSIER Pierre, La Cour temporelle d’Avignon aux XIVème et XVème siècles, Paris/Avignon, Champion/Roumanille, 1909.

GIRARD Joseph, « Les maîtres des rues d’Avignon au XVème siècle », dans Annales d’Avignon et du Comtat Venaissin, 1917, n. 5, p. 43-80.

GOURON André, « Diffusion des consulats méridionaux et expansion du droit romain aux XIIème et XIIIème siècles », dans Bibliothèque de l’école des chartes, t. 121, 1963, p. 26-76.

GUYONNET François, TRUEL Magali, « Le couvent des Augustins d’Avignon. Approche historique et archéologique », dans Annuaire de la Société des Amis du Palais des Papes, vol. 75, 1998, p. 99-141.

HAYEZ Anne-Marie, « Les environs de l’église Saint-Pierre d’Avignon au XIVème siècle », dans Annuaire de la Société des Amis du Palais des Papes, 1984-1985, n. 61-62, p. 25-44.

HAYEZ Anne-Marie, « Préoccupation d’“environnement” à la fin du XIVème siècle », dans Avignon au Moyen Âge. Textes et documents, Avignon, Aubanel, 1988, p. 185-188.

HAYEZ Anne-Marie, « La paroisse Saint-Pierre au temps des papes d’Avignon », dans Annuaire de la Société des Amis du Palais des Papes, 1999, n. 76, p. 11-38.

HIGOUNET-NADAL Arlette, « Hygiène, salubrité, pollutions au Moyen Âge. L’exemple de Périgueux », dans Annales de démographie historique, 1975, p. 81-92.

JEAY Claude, Signature et pouvoir au Moyen Âge, Paris, École des chartes, 2015.

LAUWERS Michel, Naissance du cimetière. Lieux sacrés et terre des morts dans l’Occident médiéval, Paris, Aubier, 2005.

LEGUAY Jean-Pierre, La rue au Moyen Âge, Rennes, Ouest-France, 1984.

LEGUAY Jean-Pierre, La pollution au Moyen Âge dans le royaume de France et dans les grands fiefs, Paris, Éditions Jean-Paul Gisserot, 1999.

LEGUAY Jean-Pierre, « La laideur de la rue polluée à la fin du Moyen Âge : “Immondicités, fiens et bouillons” accumulés sur les chaussées des villes du royaume de France et des grands fiefs au XVème siècle », dans Le beau et le laid au Moyen Âge, Aix-en-Provence, Presses universitaires de Provence, 2000, p. 301-317.

LEGUAY Jean-Pierre, L’eau dans la ville au Moyen Âge, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2002.

PANSIER Pierre, Les hôpitaux d’Avignon au Moyen Âge, Avignon, François Seguin, 1907.

PAYAN Paul, Entre Rome et Avignon. Une histoire du Grand Schisme (1378-1417), Paris, Flammarion, 2009.


Notes:

[1]      Le dossier a été ouvert pour la première fois par Arlette Higounet-Nadal, « Hygiène, salubrité, pollutions au Moyen Âge. L’exemple de Périgueux », dans Annales de démographie historique, 1975, p. 81-92. Il a ensuite fait l’objet de plus amples réflexions. Voir notamment les travaux fondateurs de Jean-Pierre Leguay, La rue au Moyen Âge, Rennes, Ouest-France, 1984 ; id., La pollution au Moyen Âge dans le royaume de France et dans les grands fiefs, Paris, Éditions Jean-Paul Gisserot, 1999 (et l’importante bibliographie présente en fin d’ouvrage) ; id., « La laideur de la rue polluée à la fin du Moyen Âge : “Immondicités, fiens et bouillons” accumulés sur les chaussées des villes du royaume de France et des grands fiefs au XVème siècle », dans Le beau et le laid au Moyen Âge, Aix-en-Provence, Presses universitaires de Provence, 2000, p. 301-317 ; id., L’eau dans la ville au Moyen Âge, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2002 (chapitres 4 et 5 essentiellement).

[2]      Jean-Pierre Leguay, La rue au Moyen Âge, op. cit., p. 53.

[3]      Il est important de préciser que ces exemples ne représentent pas l’ensemble des possibles. L’étude d’autres actes, menée sur une période, une aire géographique ou une institution différente, peut à juste titre affiner ou nuancer le présent exposé. Cela dit, il semble intéressant de poser quelques jalons réutilisables à certaines occasions.

[4]      Benoît XIII, au même titre que les autres papes avignonnais de cette période particulière, est aujourd’hui considéré par l’Église catholique comme un « antipape ». Loin de se limiter aux cercles conciliaires du XIVème siècle, le débat a pendant longtemps divisé les historiens eux-mêmes, qui prenaient alors partie pour une obédience au détriment de l’autre. Pour plus de détails, voir notamment la synthèse de Paul Payan, Entre Rome et Avignon. Une histoire du Grand Schisme (1378-1417), Paris, Flammarion, 2009.

[5]      Sur ce point, voir par exemple Jacques Chiffoleau, La comptabilité de l’au-delà, op. cit., p. 155-163 ; Michel Lauwers, Naissance du cimetière. Lieux sacrés et terre des morts dans l’Occident médiéval, Paris, Aubier, 2005, p. 259-268.

[6]      Anne-Marie Hayez, « Les environs de l’église Saint-Pierre d’Avignon au XIVème siècle », dans Annuaire de la Société des Amis du Palais des Papes, 1984-1985, n. 61-62, p. 30.

[7]      Cet exemple, bien connu, est notamment cité par Joseph Girard, Pierre Pansier, La Cour temporelle d’Avignon aux XIVème et XVème siècles, Paris/Avignon, Champion/Roumanille, 1909, p. 25.

[8]      Voir le résumé qu’en fait Anne-Marie Hayez, « Les environs de l’église Saint-Pierre d’Avignon au XIVème siècle », art. cit., p. 30 et suivantes.

[9]      Joseph Girard, « Les maîtres des rues d’Avignon au XVème siècle », dans Annales d’Avignon et du Comtat Venaissin, 1917, n. 5, p. 49.

[10]    Pour éviter toute transposition hasardeuse, les noms de famille sont retranscrits dans leur forme latine.

[11]    Il serait également capitaine de la cour du maréchal, voir Anne-Marie Hayez, « Préoccupation d’“environnement” à la fin du XIVème siècle », dans Avignon au Moyen Âge. Textes et documents, Avignon, Aubanel, 1988, p. 186, n. 2.

[12]    L’étude de référence demeure celle de Joseph Girard, « Les maîtres des rues d’Avignon au XVème siècle », art. cit., p. 43-80. Un paradoxe apparaît ici : l’office de maîtres des rues investit trois officiers de ces fonctions or il y en a cinq dans l’acte de 1395. Il semblerait que cette originalité soit exclusivement liée à la période pontificale d’Avignon, voir p. 44.

[13]    François Guyonnet, Magali Truel, « Le couvent des Augustins d’Avignon. Approche historique et archéologique », dans Annuaire de la Société des Amis du Palais des Papes, vol. 75, 1998, p. 103.

[14]    René de Maulde, Coutumes et règlements de la République d’Avignon au XIIIème siècle, Paris, Larose, 1879, p. 169.

[15]    Jean-Pierre Leguay, La pollution au Moyen Âge dans le royaume de France et dans les grands fiefs, op. cit., p. 95.

[16]    Voir les anecdotes rapportées sur ces deux rues par Paul Achard, Guide du voyageur ou Dictionnaire historique des rues et des places publiques de la ville d’Avignon, Avignon, Seguin aîné, 1857, p. 38-40.

[17]    Il faut à nouveau renvoyer ici aux travaux de Jean-Pierre Leguay, voir note 1.

[18]    L’anecdote est rapportée par Jean-Pierre Leguay, La rue au Moyen Âge, op. cit., p. 56.

[19]    Plus haut dans le texte, la fondation hospitalière est également appelée « hôpital des pauvres du Christ » ; elle aurait été fondée par Jean Nuti, épicier (« speciator »). Pierre Pansier la mentionne dans son étude sur les hôpitaux d’Avignon au Moyen Âge, ajoutant qu’il y en a en fait deux et qu’elles sont aussi dites des Pèlerins. Voir Pierre Pansier, Les hôpitaux d’Avignon au Moyen Âge, Avignon, François Seguin, 1907, p. 17. Elle se situerait plus précisément au nord de la rue Carreterie, ainsi que l’indique Paul Achard, Guide du voyageur ou Dictionnaire historique des rues et des places publiques de la ville d’Avignon, op. cit., p. 43.

[20]    Sur cette question de la signature médiévale, voir notamment Claude Jeay, Signature et pouvoir au Moyen Âge, Paris, École des chartes, 2015.

[21]    C’est en tout cas l’opinion de Joseph Girard, « Les maîtres des rues d’Avignon au XVème siècle », art. cit., p. 72-73.

[22]    Un règlement de 1376 engageant le monastère de Notre-Dame des Fours montre que les moniales promettent de respecter les termes de l’accord en jurant « supra pectus more religioso », voir ADV, 8G26, fol. 54v.

[23]    L’apposition des mains sur les Évangiles est typique du serment dit « à la bolonaise ». Voir par exemple André Gouron, « Diffusion des consulats méridionaux et expansion du droit romain aux XIIème et XIIIème siècles », dans Bibliothèque de l’école des chartes, t. 121, 1963, p. 54.

Élodie Lecuppre-Desjardin, La ville des cérémonies. Essai sur la communication politique dans les anciens Pays-Bas bourguignons,

Notes de Synthése de Valentina Salierno

Élodie Lecuppre-Desjardin, La ville des cérémonies. Essai sur la communication politique dans les anciens Pays-Bas bourguignons, Turnhout, Brepols, 2004, 427 p.

« Un groupe social, une société politique,
une civilisation se définissent d’abord par
leur mémoire, c’est à dire par leur histoire,
non pas l’histoire qu’ils eurent vraiment,
mais celle que les historiens leur firent»

Bernard Guenée[1]

Il revient à Élodie Lecuppre-Desjardin d’avoir abordé la question de la relation politique entre les espaces publics et les cérémonies urbaines entre la fin du XIVème et la fin du XVème siècle dans sa thèse de doctorat en Études médiévales réalisée sous la direction de Élisabeth Crouzet-Payan, La ville des cérémonies, soutenue en2002 à l’Université Paris 4[2]. Plus tard publié sous forme de livre, qui sera utilisé ici[3].
La réflexion sur le langage et la communication symboliques – cœur de cette étude sur les cérémonies – a pour but celui d’éclairer les rapports complexes entre le prince et les villes entre XIVème et XVème siècle sans jamais perdre de vue le couple épistémologique « diversité de lieux, diversité de groupes sociaux » (p. 48). En fait, les cas d’étude sont neuf villes bourguignonnes : Arras, Lille, Gand, Bruges, Douai, Mons, Bruxelles, Valenciennes et Saint-Omer, appelées « villes du Nord », pour utiliser une expression de Henri Pirenne. Celles-ci nous donnent un moyen pour comprendre le jeu politique au cœur des manifestations publiques. Se référant à l’enquête de l’historienne, Andrea Martignoni[4] nous présente la question qui guide l’autrice dans cette étude : « Les cérémonies bourguignonnes : révélations protéiformes des valeurs esthétiques d’une vie culturelle rayonnante ou instrument politique d’un État en marche ? ». La tentation de concevoir les cérémonies urbaines comme un moment où chaque acteur impliqué lit un texte en fonction du groupe social auquel il s’adresse est l’un des points cruciaux de cette problématique, qui s’affine autour des concepts de communication politique, de propagande et d’intégration et de toutes les polémiques que cette dernière a déjà pu susciter au sein des spécialistes de la principauté. L’historienne a en effet défendu une thèse de large portée sur les interactions entre la politique princière, consciente de sa puissance et de son pouvoir, et les espaces publics, vus comme des « tribunes » où se joue un rôle social et politique et où « la communication symbolique doit être savamment orchestrée pour faire de l’entrée du duc un véritable moment de politique et de triomphe[5] ». En fait, le lecteur comprend en lisant cette étude, que les espaces publics ont toujours été utilisés comme des lieux où le pouvoir et ses manifestations peuvent être discutés (ou seulement ʺpassivement˝ acceptés). Il faut rendre justice aux intuitions qui ont permis aux études de progresser dans la réflexion sur les cérémonies urbaines liées aux espaces politiques d’une ville, notamment sous l’impulsion des travaux de Bernard Guenée sur les entrées royales en France[6]. Force est aussi de constater que ce domaine de recherche est resté longtemps problématique, bien que les cérémonies bourguignonnes aient longtemps été au centre de réflexions et d’études qui, au fil des ans, ont accru l’intérêt des historiens pour ces événements. La force de cette étude réside cependant dans la compréhension de l’importance des discours que l’historiographie avait entretenu autour du thème des cérémonies bourguignonnes, pour développer une nouvelle réflexion sur les villes qui accueillaient cette « négociation de pouvoir ».
La richesse de la documentation analysée par Élodie Lecuppre-Desjardin montre bien comme ces cérémonies ont placé une ambiguïté dans le discours symbolique, devenant un outil au service du pouvoir et des ambitions politiques. En fait, l’un des aspects centraux du travail est la grande considération qui est accordée à la politique de communication mise en œuvre selon les mêmes principes, et dont les cérémonies nous offrent certainement le plus bel exemple. En utilisant les espaces publics comme un outil politique, l’État bourguignon s’est présenté et affirmé comme un État moderne, utilisant un moyen qui peut sembler à première vue neutre : les cérémonies. C’est là, au contraire, que les princes ont utilisé le pouvoir de la propagande et de la négociation.
Dans la dernière partie de l’introduction (p. 3-11), utile pour comprendre l’ensemble du travail et les réflexions de nature politique que l’on trouvera dans le texte, une place de choix est accordée à la littérature portant sur les espaces publics ainsi qu’à celle traitant de la communication du pouvoir. L’historienne décrit les parties qui composeront son travail sur les cérémonies, en annonçant que l’axe de recherche qui reliera les événements analysés ne sera pas d’ordre chronologique, lequel se serait certainement présenté comme un fil conducteur plus confortable, mais prendra la forme d’une analyse de chaque cas individuel dans un « arrêt sur image » qui tend à figer ces épisodes de rencontre du prince et de ses villes pour privilégier les réflexions sur les espaces utilisés pour développer des thèmes précis.
La thèse est divisée en trois parties : une première section intitulée « la ville : réalité, perception, représentation » (p. 15), plus structurelle, est consacrée à la présentation des espaces dans lesquels se déroule cette rencontre. La perception géographique et topographique des lieux est une partie fondamentale dans le discours, aidée en cela par la présence de cartes qui favorisent la réflexion sur les espaces publics et l’imaginaire sur lesquels ils sont modelés avant le rideau. Toutes les réflexions exposées jusqu’à ce moment par le siècle précédent n’avaient rien fait d’autre – selon l’historienne – que d’analyser les cérémonies bourguignonnes selon le faste et la beauté, presque exagérés, de ces cérémonies ; le but de cette première partie est précisément de s’éloigner momentanément de ce type de récit, de se consacrer à une analyse plus structurelle, théorique – pourrait-on dire – des lieux impliqués dans ces événements. Dans cette première partie, l’historienne décide de donner une nouvelle interprétation aux écrits des chroniqueurs qui ont toujours traité les voyages des princes dans le royaume comme des intermédiaires sans jamais s’attarder sur les lieux visités, peut-être parce que – selon l’érudit – le caractère répétitif des cérémonies leur fait perdre toute valeur spectaculaire dans l’histoire.  En fait, cette vision s’oppose à celle d’une historiographie, maintenant dépassée, qui voit dans ces mentions fugaces de noms de villes le témoignage des pérégrinations du prince dans le royaume, oubliant cependant qu’en réalité ce « nomadisme » était bien organisé et structuré. Ici, l’historienne réfléchit également aux sources disponibles pour parler de ces cérémonies, comme le sont par exemple les registres comptables, déjà largement étudiés et connus pour le domaine qui l’intéresse. À la fin du chapitre, elle soutient que « Dans cet espace distribué en réseaux, la circulation est au fondement même de l’exercice du pouvoir » (p. 48).
Dans un deuxième temps, l’historienne aborde « La rencontre des hommes » ; à cette occasion, elle aborde la question de la ville comme espace de communication (p. 133). Dans cette partie, le thème de l’œuvre commence à être défini, ceci à travers une analyse plus détaillée des espaces dans lesquels la communication politique a lieu au moment de l’entrée du prince dans la ville. Les thèmes abordés dans ce cas sont ceux liés à la tradition des lieux : le respect des coutumes, les pratiques qui caractérisent une ville, l’utilisation de la parole ; ces éléments nous permettent de comprendre dans quelle mesure la cérémonie est capable d’assurer le passage de la tradition à la modernité. En partant de ce qui avait été les réflexions d’Alain Boureau dans un article sur les entrées[7], Élodie Lecuppre-Desjardin souligne comment, d’après lui, certains historiens soutiennent que la cérémonie fait l’État. Pour l’admettre, il est nécessaire de poser le problème de son règlement dans la création de l’État moderne. C’est dans cette partie que l’œuvre atteint le cœur de l’enquête et que prennent sens les questionnements posés dans l’introduction, car un espace ample est consacré à ce que sont les dialogues entre les parties, prince et ville, au sein de la cérémonie.
La troisième partie est intitulée « À l’ombre des imaginaires : tentatives réciproques de séduction croises du prince et de ses ville » (p. 233). C’est la partie la plus complexe de la réflexion construite par l’historienne. En fait, la cérémonie vue jusqu’ici comme une mise en scène de l’apparition « extraordinaire de l’État », est interrogée ici pour montrer à quel point la communication politique peut aussi « échouer ». Ici, le processus de propagande fait par les princes est analysé, mais beaucoup d’espace est consacré à la ville, véritable acteur de ce processus politique. Ici, en effet, la topographie sociale et symbolique de la ville est également analysée en fonction de sa capacité à se prêter comme un espace d’échange et de dialogue, investi de désordre et d’ordre. L’espace est donc étudié sous l’aspect de « theatrum urbis », dans lequel toute la population est un acteur du spectacle, participante en quelque sorte de cet espace en perpétuel mouvement.
Le type d’approche utilisé par Élodie Lecuppre-Desjardin fait de cette étude un point fondamental pour commencer à étudier les cérémonies d’entrée. Précisant que chaque réalité est différente et trop variée par rapport à une autre, il est utile de prendre en considération la thèse à partir de laquelle part cette étude : la relation entre les princes et les villes a d’abord mis en évidence l’utilisation de références culturelles partagées et suggéré l’existence d’une cohésion différente au sein de cet espace, mais a également permis à l’historienne de s’interroger sur cette relation de séduction et la possibilité de manipulation et de propagande. Les cérémonies mêlant hommes, dimensions économiques et politiques, permettent de réfléchir sur la conception du pouvoir dans ces espaces mais aussi de révéler des différences précises entre les villes bourguignonnes analysées.


Notes

[1] Bernard GUENEE, Histoire et culture historique dans l’Occident médiéval, Paris, Aubier-Montaigne, 1980, p. 16.

[2] Élodie LECUPPRE-DESJARDIN, La ville des cérémonies : espace public et communication symbolique dans les villes des anciens Pays-Bas bourguignons, thèse de doctorat réalisée sous la direction de Élisabeth Crouzet-Pavan, Paris 4, 2002.

[3] Ceci est la version que j’utilise pour mon mémoire : Élodie LECUPPRE-DESJARDIN, La ville des cérémonies. Essai sur la communication politique dans les anciens Pays-Bas bourguignons, Turnhout, Brepols, 2004, 427 p.

[4] AndreaMARTIGNONI, «Elodie LECUPPRE‑DESJARDIN, Vade mecum. La ville des cérémonies. Essai sur la communication politique dans les anciens Pays-Bas bourguignons, Brepols, Studies in European Urban History (1100-1800), 2004, 380 p. [publication prévue pour juin 2004] », Questes, 7 | 2004, 64-65.

[5] Ivi, p.2.

[6] Bernard GUENÉE et Françoise LEHOUX, Les Entrées royales françaises de 1328 à 1515, Paris, Éditions du CNRS, 1968.

[7] Alain BOUREAU, « Les cérémonies royales françaises, entre performance juridique et compétence liturgique », Annales. Économies, Sociétés, Civilisations, vol. 46, n° 6, 1991, p. 1253-1264.

The Economic performance of the Austro-Hungarian Empire in the perspective of an interconnected environment 

By Federico Meneghini Sassoli

Abstract

In questa breve ricerca propongo al lettore una sintetica “rivalutazione” della performance economica dell’impero Austro-Ungarico, giudicata frequentemente non soltanto come decisamente inadeguata ma anche come una delle cause dietro al suo rapido scioglimento nei mesi terminali della Grande Guerra. Ho cercato di seguire un percorso cronologico nella mia analisi seguendo brevemente ciascuno dei suoi “periodi economici” degli ultimi suoi secoli di esistenza. Nel corso della dissertazione cito frequentemente l’ipotesi presentata da David Good in quanto, pur tenendo ben conto dei suoi limiti dovuti ai dati utilizzati, l’ho trovata sufficientemente convincente. In particolare mi sono sentito in dovere di riprendere il suggestivo parallelo tracciato fra le differenze economiche interne all’Impero e interne agli Stati Uniti d’America negli anni seguenti la Guerra Civile.

Dans cette brève recherche j’ai envie de proposer au lecteur une synthétique “ré-évaluation” de la performance économique de l’Empire austro-hongris, laquelle a été souvent jugée comme insatisfaisante et aussi une des causes qui a emmené l’Empire a sa rapide dissolution dans les mois terminantes la Grande Guerre. Dans mon analyse j’ai essayé de suivre un chemin chronologique en suivant brièvement chacune de ses « périodes économiques » des derniers siècles d’existence. Au cours de la thèse, je cite fréquemment l’hypothèse présentée par David Good car, tout en tenant compte de ses limites dues aux données utilisées, je l’ai trouvée suffisamment convaincante. En particulier, je me suis senti obligé de reprendre le parallèle frappant établi entre les différences économiques au sein de l’Empire et au sein des États-Unis d’Amérique dans les années qui ont suivi la guerre de Sécession.

In this brief research I tried to propose to the reader a synthetic re-evaluation of the economic performance of the Austro-Hungarian empire, frequently judged as not excellent and one of the many causes of its rapid dissolution at the end of the Great War. I have tried to follow a chronological path in my analysis, step by step, of the “economical periods” of the last two centuries of imperial existence. During my essay I have frequently mentioned the hypothesis suggested by David Good as I found them quite convincing even giving its statistical limits.  In particular I found suggestive the comparison between the economic internal divide present in the two halves of the empire and of the United States of America following the American Civil war.

Modern Economic Growth in the Austro-Hungarian Empire

The introduction of a new economic system, which began at the end of the eighteenth century with the “First industrial revolution”, is a key moment in European history. This type of modern economic growth is defined by P. Vries as “ in contrast to growth in all preceding organic, ‘Malthusian’ economies, based on a massive and new use of energy sources and raw materials, on new technologies and new institutions[1]”. This revolutionary event would gradually spread throughout all of Europe.

Until recently, academics have judged the economic performance of the Habsburg Empire quite harshly. Gross notes that: the empire allegedly lacked the entrepreneurial talent and capital necessary for modern economic growth ; geographical barriers obstructed the formation of an efficient communications network; the prohibitive tariff policy insulated industry from the dynamic technological development of western Europe; the institution of serfdom hindered the development of agriculture; and, in general, the persistence of feudal values and institutions acted as a brake on modernization[2].

Good holds a different position on the subject, highlighting for example how the westernmost part of the empire already presented characteristics of this growth in the early nineteenth century[3]. An important vehicle of this new economic system was immigration of human capital. This took the form of a bourgeois migration that can be broken in three waves : first from Italy, France ad the Habsburg Netherland in the seventeenth century, then a considerable influx of metalworkers from England in the mid eighteenth century, and lastly in the nineteenth century when we see English mechanics, working in cotton textiles sector and machine building industries, as well as Swiss and German financiers, in the role of bankers and factory owners.

Those waves of qualified and specialised human capital brought a steady increase in domestic industries, founded on the putting-out system. In 1790 still 75% of the population of the empire were active in the, mainly agrarian, primary sector, but at the same time also mining activities held a certain relevance. Meanwhile within the empire there were 280 manufacturing firms active, half of which in Lower Austria, with around a third in Bohemian lands[4].

The State, initially under Maria Theresa and subsequently under Joseph II and Leopold II, actively promoted centralization, eroding the guild privileges and creating new privileges, the “State granted manufacturing”. Also, the presence of serfdom, often criticised as one of the most backward characteristics of the empire, was relatively advanced compared to the German states and France.  Since thirty years of revolutionary wars had left the empire in a state of economic stagnation, those first signals of a modern economic growth were staggered and isolated. Also the continental blockade active during the Napoleonic period created a 20-years technological lag, a missed opportunity of skills and tech influx. 

Good, challenging the hypothesis of Marxist historians as Brusatti and Rosdolsky, insists that many signs of a modern growth were already present from the first decades of the nineteenth century, one of the most important being the continued growth in Austrian population, possible only in a society with constant productivity growth, from 1817 to 1845 we see a 1% annual growth. Also pertinent is the data on industrial growth, between 3.3%  and 2.5% (Rudolph’s and Komlos’s estimates respectively) from 1829 to 1845, as well as the data on coal consumption, 8.6% growth per annum from 1831 to 1850 (this data compares favourably with the one of France and Germany)[5]. Richard

Rudolph states: “If we refer to the beginning of mechanisation and when the Austrian industrial  development became comparable to the rest of [Western industrialised] Europe, we can say that Austria industrialised in the 1830s and 1840s[6]”.

European and Imperial Regional Differences

Thought Europe has been defined as a single overarching technological system[7], it nevertheless presented sharp regional differences[8]. The geographical path is essentially determining the nature of the empire’s economic development.

The development of the Habsburg Empire could be viewed as a microcosm of European development more generally, with its western part already presenting many elements of modern economic growth from the eighteenth century, increasing the economic gap with its eastern, more agriculturally oriented part in the first half of the nineteenth century.

In the following text I will be using Good’s subdivisions of the empire, with its seven distinct regional units. In order to better reflect the empire’s territories and main administrative division in the Dual Monarchy, he divided the empire in two main components: Austria and Hungary, which in turn were divided into four and three regions respectively. In theorising this division Good mostly tried to account for unitary ethnic composition and a long-standing historical continuity in terms of economic and political coherence[9].

Austria:

  • Alpine lands, comprising Upper and Lower Austria, Vienna, Styria, Salzburg, Carinthia,

Tyrol, Vorarlberg. Those lands were the nucleus of the Habsburg territories. Ethnically it was a mostly German region but with a strong Italian minority in the historical region of Tyrol and a Slovenian minority in Styria and Carinthia.

  • Bohemian lands, as a region linked with western Europe, comprising Bohemia, Moravia and Silesia (predominantly Czechs regions, with a sizeable German minority, more confused in Silesia, where there was no leading group, in order by magnitude were Germans, Poles and Czechs). 
  • Carpathian lands, comprising Galicia and Bukovina (predominantly Poles, but with significant German minorities in Bukovina where ruthenian and rumanian were dominant groups).
  • Southern lands comprising Trieste, Carniola, Istria, Dalmatia and Gorizia. This region has no historical continuity nor ethnical predominant group. Those territories are bound by their orientation toward the Adriatic Sea and its non-German composition. Carniola was mainly Slovenian; Dalmatia mainly Croats and Serbs; while the rest of the territories were mainly populated by Italians ( though without an absolute majority) followed by Slovenes and then Serbo-Croats.

Hungary:

  • Inner Hungary, economically the most important region of Hungary, and occupying the same territory as the historic Kingdom of Hungary, (it was not divided into regions unlike Austria) comprising the following unofficial subregions: Danube Right Bank (mainly Magyar with a significant German minority), Danube Left Bank (Two thirds Slovaks with a significant Magyar minority), Danube-Tisza Basin (hearth and soul of the kingdom, Budapest, Magyar, sizeable German minority), Tisza Right Bank (Magyar majority with a significant Slovak minority and a Ukrainian presence) and lastly, Tisza-Maros Basin (no ethnic majority, Romanian and Magyar were the largest groups).
  • Transylvania, as big as one of the inner Hungary subregions, important for its unique history, and its key role against the Turks under the Habsburg. Until 1867 it enjoyed some administrative autonomy (from 1765 to 1848 it was a separate “Principality”). It’s composition is, as many other parts of Half of the population was Romanian with significant Magyar(30%) and German (10%) minorities[10].
  • Croatia-Slavonia its roots are in the historic Kingdom of Croatia, central in Habsburg defence policy. From the sixteenth century to the nineteenth a long strip of land formed the Military Border district of the empire. This region had a substantial Croat majority with a sizeable Serb minority.

In the westernmost region of the empire, the Austrian regions, a structural shift from agriculture had already begun in the eighteenth century. The most dynamic region in this process is Bohemia, whose textile industries had been significant since the late sixteenth century, particularly around Reichenberg (now Liberec) and also Prague and Brünn. These lands received an important influx of capitals from English merchants, like Robert Allason. A sizeable glass industry was also present, of lesser importance but growing steadily, until it became a central export in the late eighteenth century. During the same century the chemical sector experienced growth thanks to increased demand for glass and woollen textile[11].

The other main centre of industrial activity during the eighteenth century was the Alpine Lands region, playing a pivotal role in mining and metallurgy sectors in Styria, upper Austria, Carinthia and less Carniola. These provinces produced 75% of Austrian pig iron in 1780.

At the time Austria was a leading nation in pig iron production, with Styria alone producing as much as England in 1767. The largest plant was the Innerberger Hauptgewerkshaff, founded in 1625, accounting for 2-3000 employees at the time, making it one of the greatest ironworks in the world in both the seventeenth and eighteenth century. 

The second most prominent industry in these regions was the textile one, with its core located near Vienna and in Vorarlberg. Other relevant industries were glass and papermaking, concentrated in Bohemia. The remaining parts of the empire were more agriculturally oriented[12].

Industrialization Effort in the Vormärz period

In the Vormärz period (1815-1848) the Empire underwent important transformations, particularly in the western part. The most dynamic industry in this period proved to be the textile industry. It was a vehicle of innovation, especially steam engines and factory systems. The Linz Woolens enterprise was the first factory in Austria; this dynamism is a recurring characteristic of the textile industry more broadly: England, with its improvements in the production system during the first Industrial Revolution, Austria with its innovative approaches, and France’s rapid adoption of modern techniques [13]. Austria’s textile industry saw significant involvement of English machinery, such as John Thornton’s firm in Pottendorf. This industry was chiefly present in two provinces: Lower Austria and Bohemia; in 1841 Lower Austria had 41.3% of the total number of spindles and 48% of the total production of the empire, meanwhile Bohemia had 39.6% of the spindles and 30.9% of production [14].

Another of the empire’s leading industries was the iron industry; its leading role in Europe was lost due to innovations in iron smelting and mining during the first industrial revolution. The empire’s iron industry underwent a process of rapid growth at this time (with a mean of 4-5% per annum), but it was not a period of technological innovation. The substitution of charcoal with coal, steam engine hot blast furnaces, and the puddling and rolling of pig iron came slowly to the Austrian iron industry. Still, there were substantial innovations before 1848, such as by the presence of enlarged furnaces and the introduction of the hot blast technique on a wider scale from 1837 to 1843 which reduced charcoal requirements. According to Paulinyi’s data: from 1800 to 1850 the number of workers in the sector increased by 50% while the output increased by 300%[15].

In 1830s we see puddling on a small scale but also experimentation with peat and brown coal, particularly in August Rosthorn’s ironworks. A rapid diffusion of new techniques occurred in the 1850s in particular, mainly in Bohemian Lands, where we see an even quicker diffusion of English techniques such as puddling, brought in by English engineers employed for this very reason in the 30s in Moravia. 

Another dynamic industry was that of sugar; promoted by the Polytechnical Institute of Vienna, the production of beet sugar was developed during the years of the Continental Blockade, then expanded in the 30s with the diffusion of Franco-German technologies for refining sugar.

Still there was a substantial perceived backwardness of the empire vis-à-vis the rest of Europe, this had important political results as it pushed Austrian industrialists to oppose the Austrian entrance into the Zollverein[16]. This was also motivated by the fact that the quality of imperial products varied greatly, tending to be either high end or poor quality. In some areas Austrian products were superior to German ones, for example Bohemian glass, Styrian steel, Viennese footwear, Italian silks, and gloves. In other sectors the quality was much lower but so were prices, such as with natural-linen, low quality cloth and wool, paper, and hardware. But generally German products were superior and of lower cost in the higher tiers, as Sked notes: “Austria produced for very rich people or for the very poor ones[17]”.  

We see a lower interest for steam powered engines in those decades; while many scholars put this down to “backwardness”, Good instead highlights that this could have been a rational response. Austria was one of the most important producers of charcoal in Europe, however it was not yet well connected to coal extraction areas and even its machinery was still technologically lagging behind the industrial powers of Europe. As a result the choice of importing the machines, the human capital to action and maintain them and even the coal to fuel them would have been proven more costly than increasing charcoal production. All this delayed the energetical shift until better and quicker infrastructure could secure lower prices. Another reason was given by the power detained by Bohemian and Hungarian landowners who saw iron production only as a means to sell more wood[18]

These infrastructures lagged initially; from 1830 to 1850 railway construction was disappointing. Early construction produced only a limited increase in its railway system from 1845 to 1850 compared with those of France (+245%) and Germany (+180%), while Austria achieved only a meagre +85%. Even by explaining this as an interest limited only to strategic railways, with reduced scope, it still resulted in poor commercial use[19].

Aiming for economic self-sufficiency, for both commercial and political reasons, Austria followed an Autarkiepolitik. The new-born industries needed protection against external competition, and the government hoped that the low salaries of the eastern part of the empire could bring resources and supply to the western part. Another reason was the necessity to placate the feudal elements of Hungary and limit the influx of new ideals, like liberalism, into the empire. But this Autarkiepolitik made Austria less competitive and slowed its economic development. Meanwhile its financial system as it was trying to mimic that of France presented significant limitations, such as strong Viennese monopolies, there was for example no credit activities and no discounting activities outside Vienna[20].

This void was filled by the great banking houses, such as the Rothschilds, which financed industries, commercial activities and infrastructure. However, the Austrian credit system as a whole could hardly face the increased demand during the 1840s. 

Table 1: Austria’s public finance data: 1834[21]

1834Millions of gulden
Debt interest40
Civil Administration44
Imperial family’s expenses3.5
Military expenses60
Total147,5
Incomes130
Difference-17,5
Source: My re-elaboration on data from Sked A., Grandezza e caduta dell’impero asburgico, p. 71.

Such a deficit brought forth the necessity for a new loan of 40,000,000 gulden in 1835, which was granted by the banks, but on the condition that the crown reduce its military expenses. Even without great military campaigns in 1847 we don’t see a radical improvement in the situation:

Table 2: Austria’s public finance data: 1847[22]

1847Millions of gulden
Debt interest45
Civil Administration60
Imperial family’s expenses(included in the civil administration)
Military expenses63
Total168
Incomes161
Difference-6
Source: My re-elaboration on data from Sked A., Grandezza e caduta dell’impero asburgico, p. 71.

This already unideal situation worsens in 1848, as we see a sharp increase in military expenses of 73 million, and a peak one year later with the enormous figure of 165 million. The deficit of those years was consequently 45 and 122 million respectively. 

This led to a grave financial crisis. Kolowrat, the Minister of the Treasury, declared that the loan taken from the Rothschilds was the “last anchor of safety” and that thereafter there would be no resources left to face other problems. This confession was already late because even before the  government was spending the last resources, the continuous crop failures since 1845 were already difficult to face[23].

Industrialization effort in the secon half of the century: compared results

The empire, now as a whole, endured a complex process of economic transformation. Even if not always successful this process reduced the gap created in the first period of the century. From 1867 to 1880 new industries emerged, the Austrian banking system was modernized, and Viennese monopolies were reduced. Boosted by this new availability of credit in the Western part of the empire, new extraction industries grew, such as the anthracite mines of Bohemia, strictly connected with the Wikowitz ironworks, operated by the Rothschilds, accounted for more than the 50% of the puddling ovens in Bohemia in 1870. Also, lignite output was growing; Bohemian lands were second in Europe behind Germany but ahead of France. Meanwhile in the Alpine lands many industries were relocating to Bohemia, and as a result the sugar, chemical and textile industries became greater in Bohemian lands than in the Alpine region[24].

Meanwhile in Hungary the credit system was not as developed and this lead to the intervention of the State as a substitutive element, as theorised by Gerschenkron[25], leading to a vigorous process of industrialization. This began with investment in the textile industry, then again in the heavy industries and in the foodstuff industry, particularly in flour production. Hungary still held a key role in agriculture, leading the empire’s exports[26].

As happened in many other countries, getting involved in a wider context was pushed ahead by railroad construction. The empire’s network expanded greatly, surpassing 40,000 km by 1913. This infrastructure was required in overcoming the geographical barriers present in the empire. The firsts links promoted by the Rothshild and Sina banking families connected Vienna to the industrial centres of the west. Then construction started eastward; in 1853 there were 1392 km in Austria and 414 in Hungary [27]. This expansion continued in the following decades, principally in the private sector, until the depression of 1873 led the state to again take a leading role. Meanwhile the network not only reached the Carpathian hinterland but also the most remote regions of Hungary. In 1910 we can see how the railway density of even the less developed and more remote Hungarian regions, Transylvania and Croatia-Slavonia, had nearly doubled (with 96 and 82 km/100,000 inhabitants respectively), far higher than neighbouring states Romania, Bulgaria, Serbia and even Italy (with 49, 43, 31 and 53[28]).

Table 3: Extension of the railway net, in km[29]

YearGreat BritainFranceBelgiumGermanyHabsburg EmpireItalySpainRussiaU.S.A.
18509,7572,9158545,8561,3576202850114,400
1870(20,000 )15,5442,89718,8766,1126,4295,45410,73185,400
189027,82033.2804,52642,86915,52313,62910,16330,595249,70 0
191332,62340,7704,77663,37844,80018,87315,35170,156400,19 7
Source: my re-elaboration on data from: Vries P., Escaping Poverty and Maggi S., Le ferrovie.

This impressive network created a truly unified market, benefiting both the Austrian and the Hungarian economy. Austria was a safe market for Hungarian agricultural products and new-born industries and vice versa, Hungary was a safe market for more costly Alpine-Bohemian products. The significance of this internal market, with its population of 50,000,000, should not be underestimated. The effects of this network were not only internal, as it eased the economic pressure on Austrian imports and permitted Hungarian exports to reach new markets and obtain better prices. It also created a new influx of capital from west to east, gradually decreasing the economic disparities between the two halves.

Conclusions

The empire was regarded as a backwards economy on the eve of the First World War and in some ways it was, however it had made substantial leaps forward during the four decades prior to the war.  This perceived backwardness is heavily influenced by the low level of steam power that had been deployed in the empire. Nevertheless, its railway network was still impressive, and held a significant and growing[30] role in many sectors in Europe. It was also the third country in Europe by coal production[31].

Table 4, Capacity of all steam engines (in thousands of horse power)[32]

Country1840185018601870188018881896
Great Britain 6201,2902,4504,0407,6009,20013,700
Germany402608502,4805,1206,2008,080
France903701,1201,8503,0704,5205,920
Austria201003308001,5602,1502,520
Italy1040503305008301,520
Belgium40701603506108101,180
Russia207702009201,7402,2403,100
Spain10201002104707401,180

Even comparing its performance with other latecomers, we see really positive results, as shown by the growth of GDP per capita as calculated by Kausel[33]. From 1870 to 1913, the Dual Monarchy was just behind Sweden, Denmark and Germany. Another data study by Good compares internal disparities in the United States of America and the Austro-Hungarian Empire and shows that both states presented regional differences, between an industrialised north and an agrarian south in the former, and between an industrialised west and an agrarian east in the latter, in both cases due to latifundial properties. Regarding the U.S., Good notes how from 1840 to 1860 the income per capita of the South was roughly 75% of the national mean value. This gap widened terribly after the American Civil War, becoming just 50% in the 1880s and then stagnating for the remaining part of the century. Those differences narrowed only slightly over the following two decades only to increase again in the 1920s. Only in the 1950s did the southern states regain the levels of disparity reached before the Civil War[34].

In the Austro-Hungarian Empire on the other hand, disparity between east and west increased in the mid nineteenth century at double the rate of the United States, however from the 1860s, where disparity exploded in the U.S., in the empire it stabilised and then steadily decreased at varying speeds: more quickly in the 1880s, more slowly in the 1900s[35]. These results show a greater economic unity and more reliable progress towards economic unification in the Austro-Hungarian Empire than the United States, largely defined as a paragon of economic success. 

Table 5: Comparative growth rates: real GNP per capita in 1960 U.S. dollars (in percent)[36]

 1830-1870 period1870-1913
Habsburg Empire0.501.45
Germany1.171.51
France1.271.06
United Kingdom1.501.00
Italy0.410.81
Holland0.950.93
Belgium1.661.05
Switzerland1.731.32
Sweden0.602.39
Denmark1.242.19
Norway1.021.35
Spain0.560.25
Russia0.970.62

Fejtő shares the same perspective: 

Ainsi la monarchie participa-t-elle au miracle économique européen de la fin du siècle. Entre 1830 et 1870, le produit national brut per capita s’accrut de 0,5 p. 100 par an, plaçant la monarchie au même niveau que la Suède et la Russie, quand bien même elle restait en retard sur la France, la Belgique, l’Allemagne et la Grande-Bretagne. Mais, dans les années 1900 à 1913, la croissance était d’1,14. L’Autriche-Hongrie avait donc atteint le niveau de l’Allemagne, de la Suède et du Danemark. Dans les régions occidentales, la croissance était de 1,46 p. 100[37].

Table 6 : Relative share of world manufacturing 1750-1900 (%)[38]

Country175018001830186018801900
United Kingdom1,94.39.519.922.918.5
Habsburg Empire2.93.23.24.24.44.7
France4.04.25.27.97.86.8
Germany2.93.53.54.98.513.2
Italy2.42.52.32.52.52.5
Russia5.05.65.67.07.68.8
China32.833.329.819.712.56.2
Japan3.83.52.82.62.42.4
USA0.10.82.47.214.723.6

In conclusion, the supposed economic “backwardness” of the Austro-Hungarian Empire should be re-evaluated, since it is a relative parameter[39] and comparisons with contemporary European powers are often positive, and particularly so in the four decades prior to the First World War. Rather than its economic performance, it was instead the institutional structures that were backward, remaining largely unchanged since 1867. Too often economic analyses are influenced by political outcomes. Fejtö insists that it was not the archaic institutions that slowed the economic development of the Austro-Hungarian Empire, rather it was the economic success and rapid industrial development that undermined the bond between the composing nations in such an archaic institutional superstructure as it was the empire[40].

BIBLIOGRAPHY

Bolovan I.,Holom E.C., Eppel M., Ethnicity and Politics: Censuses in the Austro-Hungarian Empire (Case Study: Transylvania, 1869-1910), in Romanian Journal of Population Studies, Cluj-Napoca, vol 10, n.2, 2016, pp. 137-151.

Claphman J.H., Economic Development of France & Germany 1815-1914, Cambridge University Press, Cambridge, 1968.

Fejtő F., Requiem pour un empire défunt. Histoire de la destruction de l’Autriche-Hongrie, Édima, Paris, 1993

Gerschenkron A., Il problema storico dell’arretratezza economica, Einaudi, Milano, 1974.

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Toninelli P.A. (ed.), Lo Sviluppo economico moderno, Marsilio, Venezia, 2015

Vries P., Escaping Poverty, the origins of modern economic growth, Vienna University Press, Vienna, 2013.

Cover image: Leopoldaure werke, 1900, credit to Siemens AG.


NOTES:

[1] Vries P., Escaping Poverty, the origins of modern economic growth, Vienna University Press, Vienna, 2013, pp. 2223.

[2] Gross N., The industrial Revolution in the Habsburg Monarchy, in The Fontana Economic History of Europe, vol. 4, part 1, Collins/Fontana, Glasgow, 1973, pp. 229-238

[3] Good D. F., The economic rise of the Habsburg Empire 1750-1914, University of California Press, London, 1984, pp. 38 – 48.

[4] Ivi, p. 40.

[5] Ivi, p. 45

[6] Rudolph R., Economic revolution in Austria? The meaning of 1848 in Austrian economic History, in John Komlos

(ed.) The Habsburg Monarchy as a Custom Union, Economic Development in the Habsburg Monarchy in the Nineteenth century, Guildford, 1983, p. 42

[7] Jones E., The European Miracle Environments, Economies and Geopolitics in the History of Europe and Asia, Cambridge University Press, 1981, pp. 45-46

[8] Good D. F., The economic rise of the Habsburg Empire 1750-1914, University of California Press, London, 1984, p.11

[9] Ivi, p. 14-21.

[10] Bolovan I.,Holom E.C., Eppel M., Ethnicity and Politics: Censuses in the Austro-Hungarian Empire (Case Study: Transylvania, 1869-1910), in Romanian Journal of Population Studies, Cluj-Napoca, vol 10, n.2, 2016, pp. 137-151.

[11] Good D.F., The Economic Rise of the Habsburg Empire p. 32.

[12] Ivi, pp. 20-24.

[13] Claphman J.H., Economic Development of France & Germany 1815-1914, Cambridge University Press, Cambridge, 1968, p. 25, p.65.

[14] Good D.F., The Economic Rise of the Habsburg Empire p. 50.

[15] Paulinyi A., Der technische Fortschritt im Eisenhuttenwesen der Alpenlander und seine betriebswirtschaftlichen Auswirkungen (1600-1860), 1974, pp. 156-157, [cited by] Good D., The economic rise of the Habsburg Empire, p. 53. 15 Ivi p. 57.

[16] Sked A., Grandezza e caduta dell’impero Asburgico, pp. 68-71. 17 Sked A., Grandezza e caduta dell’impero asburgico, p. 68

[17] Cit. Ivi, p.68.

[18] Good D.F., The Economic Rise of the Habsburg Empire, pp. 63-64.

[19] Sked A., Grandezza e caduta dell’impero asburgico, p. 62.

[20] Sked A., Grandezza e caduta dell’impero asburgico, p. 69.

[21] Turnbull P.E.., Austria vol 2, pp. 21-22, 340, 344 [cited by] Sked A., Grandezza e caduta dell’impero asburgico, p.71.

[22] Enderes R., Revolution in Osterreich, Wien, 1947, p. 38 [cited by] Sked A., Grandezza e caduta dell’Impero Asburgico, p.71.

[23] Sked A., Grandezza e Caduta dell’impero Asburgico, pp. 70-72.

[24] Good D. F., The economic rise of the Habsburg Empire, pp. 131-133.

[25] Gerschenkron A., Il problema storico dell’arretratezza economica, Einaudi, Milano, 1974, p. 21.

[26] Sked A., Grandezza e caduta dell’impero asburgico, p. 201.

[27] Good D.F., The economic rise of the Habsburg Empire, pp. 99-100.

[28] Italian data is for 1913, not 1910.

[29] Vries P., Escaping Poverty, p. 21. ; Maggi S., Le ferrovie, il Mulino 2003.

[30] Tables 5 and 6.

[31] Toninelli P.A. (ed.), Lo Sviluppo economico moderno, Marsilio, Venezia, 2015, p. 605.

[32] Vries P., Escaping Poverty, pp. 20-21.

[33] Kausel, Osterreichs Volkseinkommen, (cited by) Good D., Economic Rise of the Habsburg Empire, p. 242.

[34] Good D.F., The Economic Rise of the Habsburg Empire, pp.246-250.

[35] Ivi, pp. 108-123.

[36] Ivi, p. 239

[37] Fejtő F., Requiem pour un empire défunt. Histoire de la destruction de l’Autriche-Hongrie, Édima, Paris, 1993 p. 161.

[38] Vries P., Escaping Poverty, p. 20.

[39] Gerschenkron A., Il problema storico dell’arretratezza economica, pp. 6-12.

[40] Fejtö F., Requiem pour un empire défunt, pp. 160-172

Joël Blanchard, La conception des échafauds dans les entrées royales (1484-1517)

Notes de Synthése de Valentina Salierno

Joël Blanchard, La conception des échafauds dans les entrées royales (1484-1517), dans Le Moyen français : rassegna di studi linguistici e letterari, sous la direction de Giuseppe di Stefano, vol.19, p. 58-78, 1986.

La contribution de Joël Blanchard se présente comme une étude qui a comme but celui d’expliquer pourquoi le théâtre médiéval, celui des échafauds élevés dans les villes pour les entrées royales, peut être appelé « théâtre de rue », plutôt que considéré comme une forme de spectacle proche cela dans le théâtre tout court. En analysant ces structures spectaculaires, peu étudiées par l’historiographie théâtrale, Blanchard vise à faire place à ces manifestations à partir de la façon dont elles ont été organisées et donc du type de structures qui ont été produites par les couches artisanes de la ville. Un large souffle est en effet donné aux réflexions sur la présence de figures spécialisées dans la réalisation d’une mise en scène, qui – étant de véritables experts – ont créé des structures ordonnées et hiérarchiques, imprégnées de symbolisme.

L’historiographie qui s’est concentrée sur le sujet a préféré, selon Blanchard, donner plus de place à les formes « théâtrales », qui peuvent être – précisément en raison de leur nature peut-être plus proche de l’idée de théâtre traditionnel – analysées selon des axes politiques et de propagande liée à la fonction politique du théâtre et utilisées comme instruments de pouvoir et de propagande. Les critiques ont en effet négligé toutes ces sources, telles que les procès-verbaux d’entrées, chroniques ou mémoires, qui fournissent une description de ces spectacles, pour se concentrer sur d’autres considérations sur ces manifestations et renonçant ainsi à penser ces dispositifs représentatifs comme significatifs dans le discours théâtral. En effet, dans ce qui est la plus grande étude des entrées royales en France[1], Bernard Guenée compte au moins quinze cas dans lesquels les entrées sont mentionnées entre les années entre 1484 et 1517. Dans l’analyse faite par l’historien, la réalisation de ces structures, utiles et nécessaires pour les entrées, n’est presque jamais prise en considération, mais il est néanmoins important de noter qu’au XVe siècle c’est une mode qui se développe en marge des mystères. Le but de Joël Blanchard est donc d’aller explorer un terrain exempt en se gardant d’analyser la finalité politique de ce jeu théâtral, pour se concentrer plutôt sur certains motifs typiques qui caractérisent ceux structures.

Tout d’abord, l’une des caractéristiques les plus importantes à souligner est que ceux qui « regardent », les spectateurs, dit Blanchard, ont peu de liberté. Cela signifie que le spectateur a peu de place pour l’imagination et peu de liberté dans l’interprétation de ce qui est devant à lui, à partir du moment où « la posture édifiante, le hiératisme des figures installées dans un décor symbolique sont la règle »[2]. C’est précisément à ce moment que se manifeste l’un des points centraux de cette étude : le désaveu des valeurs théâtrales est clair. En fait, il tient à souligner qu’il n’y a pas de discours, pas d’échange ou de démonstration, mais « la lettre monumentalisée, grossie, faite pour happer le regard, relaie l’image sans en épuiser le sens. Cette production d’effets est un trait essentiel des échafauds de l’entrée [3] ».

La deuxième partie de l’étude est précisément consacrée à ce désaveu des valeurs théâtrales et tend à préciser comment ces théâtres étaient considérés par l’historiographie précédente, et en particulier par les études de G. R. Kernodle[4], un « théâtre de rue ». Il s’agissait pour la plupart de charpentes de tréteaux, absolument différents et moins élaborés, en profondeur et en scénographie, que le vaste espace occupé par les mystères. Les éléments architecturaux, tels que les fontaines, les montagnes, les châteaux, les pavillons, les bateaux sont conventionnels et leur signification au sein de ces structures est symbolique et marquée. En fait, les créateurs de ces spectacles, que Blanchard appelle « les concepteurs » ont également utilisé certains dispositifs préexistantsdans la construction, tels que les murs, les façades, les portes, les fontaines déjà existantes « qui se prêtent facilement à l’élaboration de configuration d’images[5]». Ces dispositifs ont été rassemblés de nombreuses fois dans des structures architecturales parfois séparées entre les deux (échafaud miparti). À ce point-là l’étude se dédie aux personnages qui occupaient ces appareils, car ils constituent l’une des particularités de ces structures. Selon la thermologie médiévale, ces personnages sont appelés histoires[6]; il est signalé aussi le terme de Mystère et, plus tardivement, de spectacle (Rouen 1517). Celle de tabelaux vivante est, au contraire – il souligne – une expression impropre utilisée par les critiques. Tous ces personnages sont disposés dans la scène d’une manière différente. La chose la plus particulière sur laquelle il insiste, c’est que très souvent ces personnages étaient, selon l’occasion, soit des mannequins, soit des acteurs. Dans la plupart des cas, les informations obtenues à partir des sources ne peuvent pas rendre cet aspect certain. Ce qu’il ne faut pas oublier, c’est que c’est le fil conducteur autour duquel tourne l’étude de Blanchard : la hiérarchie de ces histoires, qui sont à l’origine du doute qui pèse sur la vraie nature de ces structures. Certains comptes rendus précisent que le public avait le sentiment qu’elles étaient vivantes, bien qu’elles fussentdes statues (Paris 1517). Même si des êtres vivants étaient présents dans les structures et non des mannequins, dans ces cas, il y avait des effets d’illusion causés par la capacité des acteurs à rester immobiles, ou – vice-versa – on avait l’impression que ces mannequins étaient vivants. Il est important de souligner cet aspect : quelle que soit la fonction de ces mannequins, le geste était suspendu. Le terme utilisé par les critiques les plus récents est celui de « mimes » ou de « pantonymes », mais – soutient Blanchard – il s’agit d’une attribution erronée : le mime « recompose une bataille, esquisse un mouvement qui suit la coupe du sentiment[7] ». Dans ce cas, Blanchard soutient que le mime est une activité spécifiquement théâtrale puisqu’il décrit une action que le geste rend transparente. Cela ne correspond pas à ce qui se joue dans les échafauds : les concepteurs des entrées royales se privent volontairement de continuité gestuelle et de parole. L’effet crée, c’est celui de la surprise, puisque le roi, une fois devant les échafauds, franchit la porte et se retrouve devant un spectacle d’images silencieuses et improbables.

Le fait qu’il y ait très souvent des figures immobiles ne signifie pas que la hiérarchie qui les commande empêche le mouvement : en effet, Blanchard souligne, en examinant quelques exemples, comment les personnages qui jouent sur l’échafaud sont toujours accompagnés dans l’écriture qui complète le geste frigé. Les personnages, qu’ils soient vivants ou mannequins, sont déplacés soit dans un mouvement ascensionnel, avec le passage d’un niveau à l’autre du catafalque (Paris 1514) soit avec un mouvement descendant (Rouen 1485), ou bien horizontal (Rouen 1517). Bien qu’il n’y ait pas de mots prononcés, l’auteur maintient que ces scènes ne correspondent pas à des natures mortes : « Il n’y a rien qui rappelle une action humaine continue et s’explicitant par elle-même comme dans le mime ou le théâtre, mais une représentation qui frappe par certains aspects privilégiés dont il s’agit d’achever le déchiffrement »[8]. Ici, l’historien commence un long discours sur l’écriture présente dans ces échafauds qui offre, au moins en partie, une résolution au conflit de ce genre de « théâtre ». L’écriture, en effet, est continuellement associée à des images. Les registres de comptes, les procès-verbaux d’entrée, nécessitent très souvent la préparation de rouleaux, rolets, placarts, compartiments ou tiltres. Tous ces écritures, note Blanchard, ont besoin d’une activité artisanale : les papeteries fournissent les feuilles de papier, le charpentier colle les pièces, un peintre calligraphe peint les lettres et un autre peintre arrondit les panneaux avant de les fixer sur l’image. Il est facile de supposer que certaines déclarations dans le texte sont plus explicatives que d’autres. Dans les cas où le référent est le texte biblique, une convergence entre le texte de la pancarte et le slogan politique est observée. À ce stade, l’auteur se pose une question : « lorsque l’énoncé a la valeur d’une adresse, quel est le destinataire précis ?  Les figures de l’échafaud ou le roi qui passe ? [9]» . La disposition de ces personnages avec les signes indique une relation d’échange qui n’est pas explicite quand on regarde l’échafaud et qui reste encore mystérieuse aujourd’hui. Chaque écriture apportée par un personnage est une valeur en laquelle on croit. Cette écriture existe en tant que catégorie fondamentale d’entrée. L’opposition établie par les critiques traditionnels entre les Mystères mimés et les Mystères parlés pour définir une évolution de la scénographie de ces échafauds n’est pas fondée : « tout message est un message porté et non pas exhalé par la voix[10] ».

La troisième partie est consacré au Le champ du pouvoir symbolique. Les panneaux, qui perturbent sans démontrer, entretient une ambiguïté sur le sens du tableau. Dans cette partie, le chercheur mène une analyse qui se démarque des approches par lesquelles ces images sont habituellement traitées, puisqu’il mobilise des comptes-rendus, très souvent écrits par le concepteur lui-même, ou par un scribe. Ces comptes rendus prennent très souvent la forme d’un récit explicatif et commémoratif. Le document tente d’établir un lien logique et temporel entre les différentes figures des échafauds en les reliant entre elles dans la narration.

Bien entendu, ces sources ne sont pas neutres dans leur description, puisqu’elles remplissent une fonction explicative et démonstrative. Il parle des choses représentées pour les mettre dans une situation contemporaine, pour qu’une relation soit comprise entre le temps mythique, celui des figures sur l’échafaud et une réalité présente, celle du roi qui passe. Blanchard analyse ici l’entrée de Charles VIII à Troyes (1486) à partir d’un compte-rendu en vers. Dans ce cas, la description de l’un des échafauds construits pour cette entrée : « Le compte-rendu se construit comme un rapport qui, prenant appui sur un fait passé appartenant à l’histoire sacrée, induit des mêmes causes les mêmes effets et projette dans un futur immédiat le triomphe du jeune roi Charles VIII assimilé au descendant de la filiation des rois d’Israël [11]». La réflexion sur le symbolisme des échafauds renvoie Blanchard à la réflexion sur la personnalité du concepteur, responsable de la représentation. Les textes disponibles dans ce cas sont très rares et ne définissent pas l’organisation de ces spectacles. On peut parler dans ce cas des registres municipaux qui se réfèrent à la préparation des entrées. C’est ici que l’historien parle de deux exemples de concepteurs très important, Pinel et Gringore, en démontrant que « plus le concepteur est connu, plus il devient combattif, plus il défend une situation sociale, plus son métier est appelé à accroître l’importance de ses moyens[12] ».


Notes

[1] Guenée B., Lehoux F., Les Entrées royales françaises de 1328 à 1515, Paris, Éditions du CNRS, 1968.

[2] Joël Blanchard, La conception des échafauds dans les entrées royales (1484-1517), dans Le Moyen français : rassegna di studi linguistici e letterari, sous la direction de Giuseppe di Stefano, vol.19, p.58-78, 1986. Ici je reporte également la note 4, p.59, où l’historien explique et justifie le choix des entrées pris en examen, parce que moi aussi j’irai utiliser les abréviations proposent en parlant des entrées. N’étant utile qu’au discours qui est fait sur les entrées et une partie de l’étude de Blachard, je ne reporterai pas les études citées dans la bibliographie, mais ils serviront seulement à orienter sur les parenthèses que j’utiliserai : « Ci-dessous entre parenthèses les abréviations que nous utiliserons pour les entrées dans les notes de cette étude. 1° Entrée de Charles VIII à Paris, le 5 juillet 1484, in Guenée-Lehoux, pp. 104-119 (Paris 1484). 2° Entrée de Charles VIII à Rouen, le 14 avril 1485, in Guenée-Lehoux, pp. 241-265 (Rouen 1485). 3° Entrée de Charles VIII à Troyes, le 11 mai 1486, in Guenée-Lehoux, pp. 265- 283 (Troyes 1486). 4° Entrée de Charles VIII à Vienne, le 1er décembre 1490, in Guenée-Lehoux, pp. 299-306 (Vienne 1490). 5° Entrée d’Anne de Bretagne à Paris, le 8 février 1492, in Sensuit le sacre de la très crestienne Royne de France lequel fut fait à saint denis en france e avecques le couronnement dit-elle. Et aussi L’entrée de la dicte dame en la bonne ville de Paris, Paris B.N. Impr. Rés. Lb.28 13. Il existe un autre compte-rendu de l’entrée faisant partie de pièces ajoutées au Kalendrier des guerres de Tournay de Jean Nicolay, aux ff° 418-425 du ms. Paris B.N. fr. 24052. Une édition en a été donnée dans le Bulletin de la Société de l’Histoire de France, 1845-1846, pp. 111-12 (Paris 1492). 6° Entrée de Louis XII à Paris, le 2 juillet 1498, in Guenée-Lehoux, pp. 126-135 (Paris 1498). 7° Entrée de l’archiduc d’Autriche, Philippe le Beau, à Paris, le 25 novembre 1501, in L’entrée faicte à Paris par très puissant prince & seigneur. / Larcheduc de austriche Conte de flandres & entre ses aultres tiltres Prince de castille & d’Espagne, Paris B.N. Impr. Rés. Lb.29 24 (Paris 1501). 8° Entrée d’Anne de Bretagne à Paris, le 19 novembre 1504, in Le Sacre d’Anne de Bretagne et son entrée à Paris en 1504, éd. par H. Stein, Mémoires de la Société de l’Histoire de Paris et de l’Ile-de-France, 29 (1902), pp. 268-304 [ édition du ms. Paris, Bibl. Sainte-Geneviève, 3036 ] ( Paris 1504). 9° Entrée de Louis XII à Lyon, le 17juillet 1507, éd. G. Guigue, Lyon, 1885 (Lyon 1507). 10° Entrée du roi Louis XII et de la reine à Rouen, [le 28 septembre 1508], éd. P. Le Verdier, Rouen, 1900 (Rouen 1508). 11° Entrée de Marie Tudor à Paris, le 6 novembre 1514, in C.R. Baskervill, Pierre Gringore’s Pageants for the Entry of Mary Tudor into Paris, Chicago, 1934, pp. 1-15 [édition du ms. Londres, British Library, Cottonian Ms. Vespasian B. II]; pour les autres comptes-rendus de cette entrée, voir infra, note 42 ( Paris 1514). 12° Entrée de François 1er à Paris, in L’entrée du roi de France en sa ville de Paris le 14 février 1515, Séville, Biblioteca Capitular y Colombina 13.2.16. [Voir la description. Dans J Babelon, La Bibliothèque française de Fernand Colomb, Paris, 1915. Sous le n“ 58] (Paris 1515). 13° L’Entrée de François Premier Roy de France en la Cité de Lyon te 12 /uillet 1515, éd. G. Guigue, Lyon, 1899 (Lyon 1515). 14° Entrée de Claude de France à Paris, le 12 mai 1517, in B.M. Nantes ms. 1337 : Le couronnement sacre et entrée de la Royne à Paris. Pour les autres comptes rendus de cette entrée voir infra, note 42 (Paris 1517). 15° L’Entrée de François Premier, roy de France, dans la ville de Rouen, au mois d’aout [le 2] 1517, éd. C. de Robillard de Beaurepaire, Rouen, 1867 (Rouen 1517). Ce corpus n’est pas exhaustif. Nous laissons de côté les entrées italiennes de Charles VIII et Louis XII. (Voir, pour ces dernières entrées, la liste des imprimés dressée par J.P. Seguin [« L’information à la fin du XVe siècle en France, pièces d’actualité imprimées sous le règne de Charles VIII », Arts et traditions populaires, 1956, n° 4, pp. 309-330,1957, n° 1, pp. 53-69 ; id., L’information en France de Louis XII à Henri II, Genève, 1961, pp. 56-75). Nous prenons en compte dans le corpus l’entrée de Charles Quint à Bruges en 1515 dont sont conservés le compte-rendu et le programme iconographique important dans B.N. Vienne ms. 2591 (35 miniatures) et B.R. Bruxelles Impr. B. 1553 (35 gravures sur bois). Voir la reproduction de ces dernières dans La trvumphante entrée de Charles Prince des Espagnes en Bruges 1515. A Facsimile with an Introduction by Sydney Anglo, Johnson reprint, New York, s.d. (Bruges 1515). Pour d’autres entrées nous renvoyons parfois à Th. Godefroy, Le Cérémonial François, Paris, 1649, 2 vol [abr. : Godefroy].

[3] Ivi, p. 61.

[4] Kernolde G.R., From art to theater, form and convention in the Renaissance, Chicago, 1944.

[5] Blanchard J., La conception des échafauds dans les entrées royales (1484-1517), ouv.cit., p. 63.

[6] Ivi, p. 64.

[7] Ibidem.

[8] Ivi, p. 66.

[9] Ivi, p. 69.

[10] Ivi, p. 70.

[11] Ivi, pp. 71-72.

[12] Ivi, pp. 75-76.

La genesi delle costruzioni ferroviarie francesi

Un valzer di concessioni e opposizioni fra attori pubblici e privati

Un approfondimento di Federico Meneghini Sassoli

Abstract

Questo breve approfondimento si prefigge lo scopo di fornire al lettore un breve quadro del burrascoso inizio della storia ferroviaria francese. Saranno brevemente delineate le caratteristiche della rete, partendo dalla linea Saint Etienne – Andrézieux fino alle costruzioni dei primi anni ’50 del XIX secolo. L’analisi seguirà come muti nel corso degli anni la posizione statale francese e come si creino soluzioni innovative per nuovi problemi posti da questo sistema di trasporto.

Cette brève étude vise à fournir au lecteur une brève image du début orageux de l’histoire ferroviaire Français. Les caractéristiques du réseau seront brièvement esquissées, à partir de la ligne Saint Etienne – Andrézieux jusqu’aux constructions du début des années 50 du XIXe siècle. L’analyse étudiera comme la position de l’Etat  vers les investisseurs change au cours de la période et comment sont élaborées des solutions innovantes aux nouveaux problèmes posés par ce système de transport.

This brief study aims to provide the reader with a brief picture of the stormy beginning of French railway history. The characteristics of the network will be briefly outlined, starting from the Saint Etienne – Andrézieux line up to the buildings of the early 50s of the nineteenth century. The analysis follows the changement of public-private relations during this period and how innovative solutions were applied to met the challenges of this new method of transportation.

La genesi delle costruzioni ferroviarie francesi: un valzer di concessioni e opposizioni fra attori pubblici e privati

L’ingresso della Francia nell’età delle ferrovie non fu semplice né lineare ma si rivelò essere un continuo walzer fra posizioni differenti e frequentemente in contrasto diretto fra loro, seguendo tendenze sociali discordanti.
Le sue prime costruzioni ferroviarie non furono progetti di grandi dimensioni né in posti legati al grande pubblico: queste consistettero in linee di ridotta lunghezza, progettate per essere trainate inizialmente da cavalli e colleganti colline a vallate, costruite al fine di unire le miniere montuose alle città di consumo o ai fiumi o ad altre vie d’acqua per immettere nel mercato nazionale i prodotti dell’industria estrattiva[1].

La prima concessone regale fu infatti per un collegamento via binario, ovviamente singolo, per una linea dedicata esclusivamente all’industria estrattiva. Si trattava del collegamento, posto nella regione storica del Rodano-Alpi, tra la città mineraria di Saint-Étienne e il porto fluviale di Andrézieux, collocato sull’alto corso della Loira. La concessione venne emessa nel 1823 ma il primo servizio regolare si stabilì solo a partire dal 1828.

Già questa prima costruzione mostra chiaramente un gran numero di elementi caratteristici della Francia del tempo e delle costruzioni ferroviarie in sé.
Apparve immediatamente evidente l’invasività di queste opere, per la cui costruzione si rese necessario l’uso di espropri. Questo ci porta al secondo elemento dell’analisi, già il fatto che gli imprenditori non decisero di agire come in altre nazioni spingendo tramite rimborsi particolari o con scambi a far rinunciare ai proprietari dei terreni posti sulla futura ferrovia ma, rispettando la tradizione centralistica che si era ormai instaurata in Francia, fecero appello al potere pubblico in modo da operare degli espropri. Vediamo così come in piena Restaurazione, in un periodo in cui l’intervento statale era visto non troppo bene dal pensiero liberista molto presente, anche come reazione ai regimi rivoluzionari e napoleonici precedenti che ne hanno fatto ampio uso, lo stato si trovi qui chiamato dagli stessi investitori a intervenire[2] poiché è l’unico dotato del potere di espropriare possedimenti[3].

Questa prima concessione venne seguita rapidamente, nel 1826, da una seconda ad essa direttamente collegata. Estendeva infatti consisteva nuovamente in un collegamento fra Saint-Étienne e  un fiume, in questo caso il Rodano. Unendo la città mineraria alla capitale regionale, Lione, passando per Rive-de-Ger e Givors. Per questo collegamento vennero mobilizzati circa 10 milioni di franchi[4]. Con lo stesso sistema vennero concesse successivamente le linee da Épinac a Pont-d’Ouche nel 1833 e tra Alais e Beaucaire lo stesso anno. Tutte queste linee della lunghezza di poche decine di chilometri non potevano ancora reclamare per sé un ruolo di primo piano nei trasporti si vedevano piuttosto trattate come un sistema ancillare rispetto ai grandi assi fluviali a cui erano collegate, essendo binari isolati che non portavano ad altro apparivano distintamente come affluenti del fiume, certamente un nuovo mezzo ma utile solamente a sfruttare meglio miniere preesistenti e collegamenti fluviali già collaudati[5]. Ciò appare evidente osservando la posizione di queste ferrovie in rapporto ai relativi fiumi (ved. carta 1).

Carta 1. Le ferrovie francesi nel 1842.

Fonte: mia rielaborazione di una mappa presente in Péréire I., La Question des Chemins de fer, éditions Motteraz, Paris, 1879.

Pur considerato come un sistema ancillare, il Corps des Ponts et Chaussées, il corpo statale di ingegneri civili, si impegnò rapidamente per cercare di dirigere le costruzioni ferroviarie in modo da ottenere la migliore integrazione possibile con i mezzi di trasporto già presenti sul territorio e mantenere il controllo statale sulle costruzioni infrastrutturali sviluppatosi in Francia nei due secoli precedenti[6]. Per fare ciò il Corps des Ponts et Chaussées organizzò dei bandi, simili a gare d’appalto, in cui veniva data alla società che avrebbe assicurato le tariffe migliori la concessione per costruire linee ferroviarie lungo assi già teorizzati e ritenuti di interesse nazionale. Come unica condizione di partecipazione al bando era posto il rispetto alcuni standard tecnici fissati dal Corps. Sebbene possa apparire a prima vista come un’ottima proposta questi bandi non riscossero un grande successo e se per la linea Saint-Etienne-Lione vi fu una certa concorrenza per assicurarsi la concessione, nel bando per la linea Tolosa-Montauban si presentò soltanto una compagnia interessata che ottenne quindi la concessione senza alcuno sforzo. In diversi altri bandi addirittura non comparve alcun partecipante (in particolare i bandi per le linee Parigi-Pontoise e Parigi-Orléan). Secondo Dobbin il Corps des Ponts et Chaussées aveva peccato di superbia ritenendo che le sue previsioni teoriche su come si sarebbero dovuti sviluppare i sistemi di trasporto nazionali coincidessero completamente con gli interessi della nazione e non potessero essere oggetto di dibattito. Esso limitò le concessioni ferroviarie perché rifiutava ogni percorso non teorizzato da lui stesso come vitale per gli interessi nazionali, arrivando a respingere più di trenta richieste nel periodo 1823-1833 fornendo come causa il pubblico interesse[7].
Se da un lato vediamo quindi come l’organo statale legato alle costruzioni infrastrutturale renda problematica la costruzione di ferrovie dall’altro lato vediamo come gli stessi capitalisti francesi furono causa di problemi. Questo a causa della diffusione capillare e la messa in pratica della dottrina liberista, era questa una posizione politica particolarmente presente e radicata fra i capitalisti francesi. Essa vedeva con ostilità qualsiasi intervento statale, considerato in ogni sua manifestazione come una minaccia al libero mercato ciò anche in opposizione alla tradizione statalista francese creando non pochi attriti con pratiche collaudate. Questa dottrina influenzava in primo luogo il mercato azionario ma allo stesso tempo aveva importantissime conseguenze politiche perché era stata abbracciata da politici di primo piano nel panorama governativo della Monarchia di luglio, fra i quali spiccava Adolphe Thiers, ministro del Commercio e delle Opere Pubbliche del governo di Luigi Filippo dal 1832 al 1834 poi ministro dell’Interno.

I capitali privati erano però insufficienti allo sviluppo ferroviario. Thiers ne era conscio e con il tempo venne affermandosi un modello ibrido di spesa per le costruzioni ferroviarie. Inizialmente egli richiese al Parlamento la mobilitazione 500.000 franchi per finanziare dei primi studi estesi in modo tale da poter pianificare un sistema ferroviario nazionale avvalendosi della capacità d’analisi del Corps des Ponts et Chaussées lasciando però maggior campo d’azione ai gruppi d’investimento privati[8].

Dopo che il governo Thiers fece allentare la presa al Corps e fino alla metà degli anni Quaranta del XIX secolo i numerosi progetti presentati risultarono però privi di coesione, ossia di una struttura sistemica in cui inserirsi. Allo stesso tempo apparivano anche come progetti incerti, nel senso che da parte dei privati non vi era grande speranza nei progetti ferroviari. Le ferrovie erano ancora viste come un sistema di trasporto inaffidabile e oggetto di numerose perplessità e critiche. Questa sfiducia portò a una consistente carenza di investimenti nel settore e quindi a un suo sottosviluppo[9]. Anche dopo che questo programma ibrido venne finalmente accettato da un più grande pubblico, non finirono però i dibattiti sul tema: il nuovo punto di scontro divenne infatti l’estensione della presenza statale nel sistema ferroviario.

La direzione del Corp des Ponts et Chaussées realizzò presto come fosse essenziale per la messa in atto di qualsivoglia piano nazionale quantomeno una direzione centrale e statale delle ferrovie. Questa posizione era fortemente sostenuta da Alexis Victor Legrand, direttore del Corps dal 1832 al 1847. Secondo i partigiani di Legrand la direzione statale doveva agire da metteur en scène della rete ferroviaria nazionale in cui avrebbero interagito più attori, pubblici e privati. Questo ruolo direttivo era ritenuto necessario per elaborare un sistema di costruzione omogeneo, regolare e standardizzato oltre che per dare organicità ai singoli progetti privati, e per esercitare una continua pressione governativa in modo da portare alla creazione di una rete unificata, capace di servire alle necessità della nazione, prima che alle necessità delle singole compagnie partecipanti. Nel campo filo-statalista vi era al tempo anche una voce più radicale ancora di Legrand, un sostenitore di un sistema ferroviario di proprietà statale, era questa quella dell’importante deputato Alphonse de Lamartine. Egli si pronunciò contro le compagnie private, le quali non avrebbero avuto la capacità di raggiungere grandi scopi che andassero oltre il semplice profitto dei loro azionisti. Al riguardo mi sembra opportuno citare una frase principe chepronunciò alla Camera dei deputati nel 1838 la quale ritengo possa riassumere la sua posizione: « Rien de grand ne s’est fait, de grand, de monumental en France, et je dirais dans le monde, que par l’État »[10]. Le proposte di Alphonse de Lamartine non riuscirono però ad ottenere il consenso desiderato e necessario per la loro applicazione. Questo avvenne soprattutto per i costi proibitivi di tali progetti, non affrontabili per l’erario pubblico, e ciò si palesò sotto gli occhi di tutti quando nel 1838 il Parlamento respinse un piano ambizioso di espropri per un miliardo di franchi.
Nonostante questa prima battuta d’arresto al piano generale, vennero comunque approvati molteplici singoli progetti e, un passo alla volta, vennero avviate diverse costruzioni. Complessivamente però il tasso d’investimento era misero, con una media attorno ai quattro milioni di franchi annui nel periodo 1825-1834[11]. Ancora non si erano presentate «le enorme masse di capitali» necessarie per queste nuove infrastrutture di cui sottolinea l’importanza Hobsbawm[12].
Questo primo sistema disorganizzato e privo di una gestione dall’alto portò all’emergere in diversi contesti di rivalità regionali, principalmente dibattiti continui fra le varie municipalità sui tragitti ferroviari. La municipalità di Metz, ad esempio, fu molto vocale nell’esprimere la sua più completa disapprovazione per il percorso disegnato dalla linea Paris-Strasbourg, passante per la più meridionale Nancy. Ogni regione dava ragioni strategiche e commerciali, più o meno verosimili, per le quali le linee sarebbero dovute passare per una certa zona piuttosto che per un’altra.

Punto di partenza fondamentale per la storia ferroviaria francese e soluzione ai problemi che affliggevano le prime costruzioni ferroviarie furono le leggi dell’11 giugno 1842[13]. Queste leggi erano per tutti la mise en place della cosiddetta étoile de Legrand. Il progetto della Stella di Legrand venne presentata per la prima volta nel 1837 in un’udienza parlamentare dopo che la necessità dell’intervento statale si era mostrata evidente a tutte le parti in seguito ai fallimenti delle compagnie private (in particolare nei collegamenti Paris-Rouen e Paris-Orléan) dotate di capitali insufficienti, diversamente da quanto stava accadendo nel Regno Unito[14].
L’étoile de Legrand consisteva nella teorizzazione di una rete ferroviaria da raggiungere nel più breve tempo possibile in modo da creare un sistema di trasporto significativo, si basava su Parigi come suo centro, considerato, nella visione di Legrand, centro dei trasporti non solo di Francia ma anche d’Europa. La Stella doveva infatti collegare Parigi alle nazioni vicine, ossia il Belgio passando per Lille, l’Inghilterra secondo un percorso da determinarsi, gli stati tedeschi attraverso Nancy e Strasburgo, la frontiera spagnola da raggiungersi passando per Tours, Poitiers e Bordeaux, poi verso il Mare Mediterraneo passando per Lione, Cette (ad oggi Séte) e Marsiglia. Secondo centro di una più piccola stella sarebbe stata proprio Marsiglia da cui avviare collegamenti con l’Italia, verso Bordeaux in modo da collegare il Mare Mediterraneo e l’Oceano Atlantico[15].

Nelle leggi del 1842 era prevista una chiara divisione degli incarichi: allo Stato concerneva la pianificazione e farsi carico delle spese infrastrutturali mentre alle compagnie private spettava la costruzione della sovrastruttura, cioè stazioni, binari, la gestione del materiale rotabile e del servizio.
Un primo salto di qualità da parte dei privati venne compiuto nel 1845 da James de Rothschild, caso unico per la Francia di capitale privato sufficiente. Il 20 settembre 1845 la ricchissima famiglia Rothschild diede vita alla Compagnie du Chemin de Fer du Nord con un capitale sociale di 200 milioni di franchi, basando i primi lavori sulla linea prevista dal piano di Legrand, quella fra Parigi e Lille[16].
Nel 1847 però diverse difficoltà economiche investirono numerose compagnie ferroviarie da poco fondate come la Compagnie des chemins de fer de Paris à Orléan (P.O.) e la Compagnie de chemins de fer de Paris à Lyon, le quali risultarono ai loro debitori praticamente insolventi[17] Ciò favorì una sistematica revisione degli accordi esistenti, con una certa rivalutazione almeno parziale delle idee stataliste di Lamartine per abbandonare il laissez faire che si era sviluppato nel settore. Si diffuse anche un certo interesse verso il potenziale acquisto delle compagnie in bancarotta per spostarsi verso un sistema basato sul modello belga di gestione statale centralizzata. Purtroppo però il governo altamente instabile di quegli anni non aveva la forza di agire in tal senso e l’unico elemento di legislazione ferroviaria di tutto il periodo post-rivoluzionario 1848-1852 fu una concessione ad una compagnia per la linea Paris-Rennes, nel quale però venne inaugurato un modello di garanzia statale che sarebbe stato usato frequentemente in seguito in quanto ritenuto il migliore possibile, cioè la garanzia di profitto sugli interessi azionari[18].
 Le costruzioni per quanto numerose – anche in Francia iniziò infatti la cosiddetta railway fever – non furono sistematiche. Un sistema ferroviario fu creato solo nel corso degli anni Sessanta del secolo. Fino ad allora rimase infatti impossibile percorrere unicamente in treno un tragitto da una parte all’altra della nazione, essendo ancora necessari continui trasbordi da un treno all’altro e in ogni caso era quasi impossibile aggirare Parigi[19]
Considerando le difficoltà attraversate in questo periodo le costruzioni ferroviarie furono un utile mezzo di modernizzazione in Francia, dallo scontro nasce una sintesi e questa si ebbe successivamente grazie alla garanzia di interesse e a un primo modello ibrido. Questa continua sperimentazione e correzione permise anche alla gestione statale di adattarsi progressivamente a un nuovo mezzo di cui ancora non si comprendevano le potenzialità e i limiti. Allo stesso tempo l’economia francese ritrovò dinamismo in queste nuove costruzioni; secondo le stime di Levy-Leboyer i capitali investiti nelle infrastrutture costituirono il 20% di tutti gli investimenti immobiliari avvenuti in Francia ogni anno fino agli anni Trenta per poi superare il 25% dalla decade successiva. La maggior parte di questi investimenti era però costituito da capitale pubblico o comunque garantito da enti pubblici, seguendo una pratica affermatasi per la prima volta negli anni Trenta. Lo Stato, in questo modo, controllava che i lavori procedessero costantemente. Se ciò da un lato poneva scadenze e limiti alle imprese, «uccidendo il libero mercato» secondo i detrattori di questo metodo, allo stesso tempo dava al governo leva sulle costruzioni[20].

FONTI

Bibliografia:

Barjot D., Histoire économique de la France au XIXe siècle, Paris, Nathan, 1995.

Clapham J.H., The Economic development of France and Germany: 1815-1914, Cambridge, Cambridge University Press, 1968.

Dobbin F., Forging industrial policy: The United States, Britain and France in the Railway Age,Cambridge, Cambridge University Press, 1994.

Hobsbawm E.J., L’età della Rivoluzione (1789-1848), Milano, Rizzoli, 1999.

Lévy-Leboyer M., Investimenti e sviluppo economico in Francia, 1820-1930, in Storia Economica Cambridge, vol. VII, L’età del Capitale: Gran Bretagna, Francia, Germania, Scandinavia, Torino, Einaudi, 1978, pp. 338-409.

Mitchell A. The Great Train Race, Railways and the Franco-German Rivalry 1815-1914, New York,  Berghahn Books, 2006.

Rioux J.P., La révolution industrielle 1750-1880, Paris, éditions du Seuil, 1971.

Robbins M., The Railway Age, Manchester, Manchester University Press, 1998.

Woronoff D., Histoire de l’industrie en France du XVI siècle à nos jours, Paris, édition du Seuil, 1998.

Fonti a stampa:

Bulletin des lois de la République Française, n. 390, loi n. 2946 – Loi relative au Chemin de fer de l’Ouest, Paris, Imprimerie Nationale, 1851.

Bulletin des lois du royaume de France, IX, vol. 24,1842, n. 914, Paris, Imprimerie Royale, pp. 482-486.

Lamartine A., Discours prononcé a la Chambre des députés, 8 mai 1838, Archives de l’Assemblée nationale.

Péréire I., La Question des Chemins de fer, Paris, éditions Motteraz, 1879.

Immagine di copertina:

“Chemin de fer de Lyon à Saint-Étienne”, lithographie de Engelmann père & fils, Mulhouse (circa 1834-1835) disponibile su Wikipedia al link https://commons.wikimedia.org/wiki/File:SEt-Lyon_Train_divers.jpg


NOTE:

[1] Mitchell A., The Great Train Race, Railways and the Franco-German Rivalry 1815-1914, New York,  Berghahn Books, 2006, pp. 5-6.

[2] Barjot D., Histoire économique de la France au XIXe siècle, Paris, Nathan, 1995, pp. 47-54.

[3] Dobbin F., Forging industrial policy: The United States, Britain and France in the Railway Age,Cambridge, Cambridge University Press, 1994, pp. 106-107.

[4] Rioux J.-P., La révolution industrielle 1750-1880, Paris, éditions du Seuil, 1971, p. 77.

[5]Woronoff D., Histoire de l’industrie en France du XVI siècle à nos jours, Paris, édition du Seuil, 1998, pp. 230-234.

[6] Dobbin F., Forging industrial policy, cit., pp. 112-114.

[7] Dobbin F., Forging industrial policy, cit., p. 102.

[8] Mitchell A., The Great Train Race, cit., pp. 13-18.

[9] Lévy-Leboyer M., Investimenti e sviluppo economico in Francia, 1820-1930, in Storia Economica Cambridge, vol. VII, L’età del Capitale: Gran Bretagna, Francia, Germania, Scandinavia, Torino, Einaudi, 1978, p. 354.

[10] Lamartine A., Discours prononcé a la Chambre des députés, 8 mai 1838, Archives de l’Assemblée nationale.

[11] Woronoff D., Histoire de l’industrie en France, cit., pp.229-230.

[12] Hobsbawm E.J., L’età della Rivoluzione (1789-1848), Rizzoli, Milano, 1999, pp.56-60.

[13] Bulletin des lois du royaume de France, IX, vol. 24,1842, n. 914, Paris, Imprimerie Royale, pp. 482-486.

[14] Mitchell A., The Great Train Race, cit., p. 7.

[15] Bulletin des lois du royaume de France, pp. 482-486.

[16] Rioux J.-P., La révolution industrielle, cit., pp. 76-77.

[17] Clapham J.H., The Economic development of France and Germany: 1815-1914, cit., p. 146.

[18] Bulletin des lois de la République Française, n. 390, loi n. 2946 – Loi relative au Chemin de fer de l’Ouest, Imprimerie Nationale, Paris, 1851.

[19] Robbins M., The Railway Age, Manchester University Press, Manchester, 1998, p. 124.

[20] Levy-Leboyer M., Storia economica Cambridge, cit., pp. 357-359.

La “via italiana” al socialismo e i suoi legami con l’esperienza della Cina socialista: i rapporti tra il PCI e il PCC tra 1949 e 1959

Di Matteo Minen

Abstract

La “via italiana” al socialismo rappresenta uno dei temi più affascinanti nella storia del Partito comunista italiano (PCI), il quale voleva individuare una via di sviluppo socialista che rispettasse le condizioni sociopolitiche e culturali dell’Italia repubblicana. Uno dei testi fondamentali per approcciarsi allo studio di questo tema è Togliatti e la via italiana al socialismo. Il PCI dal 1944 al 1964 dello storico inglese Donald Sassoon, pubblicato nel 1980; a esso si affiancano i testi di Carlo Spagnolo Sul Memoriale di Yalta. Togliatti e la crisi del movimento comunista internazionale (1956-1964) pubblicato nel 2007, e di Gianluca Fiocco Togliatti, il realismo della politica. Una biografia, edito nel 2018.
Nell’elaborare il progetto della via italiana il PCI dedicò attenzione anche allo studio dell’esperienza dei partiti comunisti che sembravano applicare con originalità la dottrina marxista, “adattandola” alla propria realtà nazionale. È in tale contesto che si colloca l’attenzione del comunismo italiano verso il Partito comunista cinese (PCC).
Le seguenti pagine vogliono ricostruire sinteticamente alcuni dei temi affrontati nella mia tesi di laurea magistrale, dedicata all’analisi delle relazioni tra il PCI e il PCC tra il 1949 e il 1964 e in cui sono state analizzate le ragioni che hanno spinto il comunismo italiano a esaminare l’esperienza della Cina socialista e le motivazioni che hanno determinato, tra il 1960 e il 1964, il deteriorarsi dei rapporti tra i due partiti. Lo scopo primario di questo contributo è prendere in considerazione gli elementi del socialismo cinese ai quali il PCI dedicò attenzione per implementare il proprio “percorso nazionale” al socialismo.

La “façons italienne” par rapport au socialisme représente l’un des thèmes les plus fascinants de l’histoire du Parti communiste italien (PCI), qui voulait identifier une façon de développement socialiste qui respectait les conditions sociopolitiques et culturelles de l’Italie républicaine.
Certains des textes les plus utiles pour aborder l’étude de ce thème sont Togliatti e la via italiana  al socialismo. Il PCI dal 1944 al 1964 de l’historien anglais Donald Sassoon, publié en 1980; celui de Carlo Spagnolo Sul Memoriale di Yalta. Togliatti e la crisi del  movimento comunista internazionale (1956-1964) publié en 2007; et de Gianluca Fiocco Togliatti, il realismo della politica. Una biografia, éditée en 2018.  
En élaborant le projet de la voie italienne, le PCI a également consacré son attention à l’étude de l’expérience des partis communistes qui semblaient appliquer avec originalité la doctrine marxiste,  “en l’adaptant” à leur réalité nationale. C’est dans ce contexte que se situe l’attention du communisme italien pour le Parti communiste chinois (PCC). 
Les pages suivantes visent à résumer certains des thèmes abordés dans mon projet de mémoire du Master, focalisé sur les relations entre le PCI et le PCC entre 1949 et 1964, en analysant les raisons qui ont poussé le communisme italien à examiner l’expérience de la Chine socialiste et les motivations qu’ils ont déterminées, entre 1960 et 1964, la détérioration des relations entre les deux partis.
Le but premier de cette contribution est de prendre en compte les éléments du socialisme chinois auxquels le PCI a consacré son attention pour mettre en œuvre son propre “parcours national” au socialisme.

The “Italian way” to socialism represents one of the most fascinating themes in the history of the  Italian Communist Party (PCI), which wanted to identify a socialist development path that respected  the socio-political and cultural conditions of Republican Italy. One of the fundamental texts to approach the study of this theme is Togliatti e la via italiana al  socialismo. Il PCI dal 1944 al 1964 by the British historian Donald Sassoon, published in 1980. Other  essential works are Sul Memoriale di Yalta. Togliatti e la crisi del  movimento comunista internazionale (1956-1964) by Carlo Spagnolo published in 2007, and  Togliatti, il realismo della politica. Una biografia, by Gianluca Fiocco published in 2018.
In developing the project for the Italian way, the PCI also devoted attention to the study of the  experience of the communist parties which seemed to apply the Marxist doctrine with originality,  “adapting” it to their national reality. It is in this context that the Chinese Communist Party (CCP)  draws the attention of Italian communism.
The following pages aim to briefly reconstruct some of the themes addressed in my master’s degree  thesis, dedicated to the analysis of the relations between the PCI and the CCP between 1949 and 1964.  In my thesis I examined in depth the reasons that led Italian communism to examine the experience  of socialist China, which led to the deterioration of relations between the two parties between 1960  and 1964. The primary purpose of this contribution is to take into consideration the elements of Chinese  socialism to which the PCI devoted attention to implement its “national path” to socialism. 

Premessa: la particolarità della situazione italiana e cinese nel Secondo dopoguerra

La storia del Partito comunista italiano coincide con una delle esperienze più singolari nella vasta  storia del comunismo occidentale: collocato all’interno del “blocco” capitalista e di un sistema  parlamentare, esso sarebbe divenuto il più forte partito comunista dell’Occidente e fino al 1964  sarebbe stato guidato da Palmiro Togliatti. Fu proprio Togliatti a comprendere per primo la singolarità  della collocazione geopolitica dell’Italia, inserita nel “blocco” occidentale e caratterizzata da un  sistema parlamentare e pluripartitico; a tali fattori si aggiungeva uno scenario internazionale percorso  da forti tensioni e segnato, dal 1945, dalla contrapposizione tra Usa e Urss che sfociò nella “guerra fredda”. Il leader del PCI comprese pertanto che, per il comunismo italiano, seguire una via rivoluzionaria per edificare una società socialista non sarebbe stato possibile, intraprendendo così un  percorso di elaborazione ideologica che sarebbe culminato, dodici anni dopo, nel progetto della “via  italiana” al socialismo, una via che doveva necessariamente tenere conto delle condizioni sociali,  politiche, economiche e culturali italiane.  
La visione togliattiana parve trovare conferma in una realtà in cui la vittoria comunista era apparsa  una possibilità remota (se non addirittura impossibile), ovvero la Cina, che nel 1949, sotto la guida  di Mao Zedong, trionfò sulle truppe nazionaliste del Guomindang.
Partendo dall’idea che fosse necessario “adattare” l’ideologia marxista alle condizioni socioeconomiche cinesi, segnate da una profonda arretratezza e da un’economia quasi totalmente contadina, fu proprio Mao il vero artefice della vittoria comunista in Cina e della fondazione della Repubblica popolare cinese (Rpc). Nella visione  maoista le campagne avrebbero dovuto rappresentare l’epicentro di un “miracolo economico orientale”, una “via cinese” al socialismo che ebbe il drammatico tentativo di una sua applicazione  concreta con il Grande balzo in avanti.  
Agli occhi del PCI e del comunismo italiano l’esperienza del PCC forniva la prova concreta della  possibilità di avanzare verso il socialismo seguendo un percorso alternativo a quello dell’Urss, in cui  persino classi sociali diverse collaboravano tra di loro dando vita a una società nuova, egualitaria e  democratica, garantendo uno straordinario sviluppo economico: sarebbe stata proprio la politica di  “collaborazione tra classi” che avrebbe suscitato l’interesse dei comunisti italiani. Il PCI vi dedicò infatti attente analisi all’interno di giornali e riviste di partito, come “l’Unità” e “Rinascita”, e nel  corso di riunioni del proprio gruppo dirigente, cercando di individuarne gli elementi funzionali alla  definizione della via italiana.  

Velio Spano nella Rpc (1949-1950)  

Il PCI avviò i primi contatti con il PCC sin dall’estate del 1949: il 29 luglio venne inviata in Cina una  lettera scritta da Togliatti in cui il segretario del PCI presentava al Comitato Centrale (CC) del PCC, Velio Spano, giornalista e senatore comunista[1]. All’interno della missiva Togliatti comunicava inoltre  che nei mesi successivi Spano avrebbe effettuato un viaggio in Cina al fine di informare l’opinione  pubblica italiana sulla situazione cinese; il 16 settembre 1949 “l’Unità” informò i propri lettori che  Spano era giunto a Shangai il 10 settembre[2]
Durante il proprio viaggio Spano inviò altre corrispondenze a “l’Unità” e le testimonianze da lui raccolte vennero riunite nel testo Nella Cina di  Mao Ze-Tun[3], pubblicato al suo ritorno. Questo testo acquisisce un valore fondamentale poiché  rappresenta la prima testimonianza diretta offerta al comunismo italiano sulla Cina popolare e perché  vi si ritrovano approfondite considerazioni riguardo le condizioni socioeconomiche del paese e la strategia intrapresa per raggiungere il socialismo. A questo proposito è pertanto opportuno  soffermarsi sull’attenzione riservata da Spano alla politica di “collaborazione di classe” che  caratterizzava l’esperienza socialista in Cina.  
Egli chiarisce che questa collaborazione non rappresentava il frutto di una svolta “riformista” da  parte del PCC, ma che i comunisti cinesi avevano in realtà intrapreso una strada realmente  rivoluzionaria. 
Per spiegare la particolarità del percorso di edificazione socialista avviato dal PCC Spano descrive la società cinese, ricordando la presenza all’interno di quest’ultima dei compradores,  presentati come una categoria di commercianti che «facevano incetta nell’interno di prodotti cinesi per conto degli imperialisti e vendevano nell’interno, sempre per conto degli imperialisti, i prodotti  della classe capitalistica forestiera»[4]. Asserviti all’imperialismo, i compradores sottraevano i profitti  ai lavoratori cinesi contribuendo a formare il capitale burocratico, definito da Spano come “cinghia  di trasmissione” per il grande capitalismo straniero[5]. In Cina, pertanto, il PCC guidava la classe  operaia e il popolo verso obiettivi comuni come la liberazione dalle spire dell’imperialismo,  l’eliminazione della feudalità e del capitale burocratico[6]. I compradores si differenziavano pertanto  dalla “borghesia nazionale” che produceva merci per il paese. Proprio in virtù di questa situazione concreta Spano spiega la necessità della politica del “fronte unico” in Cina.  
Il fronte unico si fondava sull’unità delle quattro classi, proletariato, contadini, piccola borghesia e  borghesia nazionale e viene definito da Spano “blocco nazionale”, in cui lo stesso Mao Zedong aveva  riposto grande fiducia: egli infatti era convinto che in questo periodo storico il PCC e la classe operaia  avessero il compito di “dirigere” la rivoluzione nazionale con l’appoggio di tutte le forze nazionali  “sane”[7]. Il fronte unico delle quattro classi poggiava inoltre sull’alleanza permanente tra la classe  operaia e contadina e si muoveva sotto la guida del proletariato; all’interno del fronte unico il PCC svolgeva quindi una funzione dirigente, ma senza abusare della propria autorità poiché preferiva fare  ricorso alla politica di unità nazionale durante tutto il periodo storico che precedeva la svolta verso il  socialismo (periodo che secondo l’autore sarebbe stato molto lungo)[8]. L’elemento sul quale Spano intende porre l’accento è chiaramente la pluralità di partiti che caratterizzava la situazione politica  cinese, i quali avevano tutti riconosciuto la funzione dirigente del PCC,come unica forza in grado  di portare a compimento la Rivoluzione. Queste premesse, secondo l’autore, sembravano  preannunciare per il futuro la possibilità di un’edificazione pacifica del socialismo (nonostante lo  stesso Spano non avesse una piena certezza riguardo a questa possibilità).  
La politica del fronte unico aveva indubbiamente colpito il giornalista sardo e nella seconda metà  degli anni Cinquanta l’attenzione del PCI nei confronti di questa politica sarebbe divenuta sempre  più visibile. 

È possibile una collaborazione tra classi per edificare il socialismo? L’VIII Congresso del  PCC e la sua influenza sulla ricerca della via italiana 

A partire dalla seconda metà degli anni Cinquanta i rapporti tra il PCI e il PCC furono più intensi e  l’attenzione del comunismo italiano verso la via cinese al socialismo fu scandita da due eventi  estremamente significativi verificatisi rispettivamente nel 1956 e nel 1959. 
Il 15 settembre 1956 si svolse l’VIII Congresso del PCC, che si aprì con un discorso pronunciato  da Mao Zedong, il quale esaltò i successi raggiunti dalla Rpc affermando che questi erano stati  possibili grazie a «l’alleanza degli operai e dei contadini, sotto la guida della classe operaia, unendo  tutte le forze che era possibile unire»[9]
Uno dei discorsi più importanti pronunciati nel corso di questa assise fu tuttavia quello di Liu  Shaoqi[10], una delle figure di spicco del PCC. La parte più interessante dell’intervento di Liu è quella  dedicata alla vita politica dello Stato, in cui vengono descritte le caratteristiche della “dittatura democratica popolare”, la forma di governo che aveva preso vita in Cina con la vittoria comunista: è  opportuno dedicare attenzione alle parole del dirigente cinese poiché il PCI fu influenzato da questo  concetto e dalle caratteristiche di questa forma di governo.  
Liu ricordò che all’interno della dittatura democratica del popolo collaboravano anche altre classi,  partiti e “personalità democratiche” che non appartenevano ad alcun partito; egli spiegò che ciò  avveniva in quanto tale forma di governo non necessitava esclusivamente che gli organi statali fossero  diretti dal proletariato, ma anche della partecipazione delle masse popolari. La possibilità di instaurare  la dittatura della “maggioranza assoluta” del popolo sulle classi reazionarie e di edificare il socialismo  dipendeva pertanto dall’alleanza del proletariato con le masse popolari “propense” ad accettare il  passaggio a una società socialista. 
In tale contesto, proseguiva Liu, accanto all’alleanza tra classe operaia e contadina, acquisiva un  ruolo di primo piano la borghesia nazionale, avversa all’imperialismo straniero e che, dopo la nascita  della Rpc, aveva visto un numero sempre maggiore di suoi rappresentanti e partiti aderire alla nuova  forma di governo che aveva preso vita. La borghesia nazionale aveva mantenuto la propria alleanza  con il PCC e la classe operaia anche nel processo di trasformazione socialista; Liu sottolineava poi l’importanza della borghesia nazionale perché aveva permesso di sviluppare l’industria, riconosciuto  il ruolo guida della classe operaia e «dato il suo consenso»[11] per le trasformazioni socialiste in Cina,  alle quali partecipava attivamente.Secondo il dirigente cinese questa collaborazione con la borghesia  nazionale avrebbe dovuto essere ulteriormente sviluppata, permettendo alla borghesia di mostrare le  proprie qualità nel processo di edificazione socialista e compiere nuovi progressi nell’opera di  “autorieducazione”. In futuro il PCC avrebbe dovuto favorire anche la politica di “coesistenza” e  “controllo reciproco” tra il partito comunista e gli altri partiti democratici ed era lo stesso partito  comunista che aveva il compito di mettere in movimento tutti gli “elementi attivi” affinché  contribuissero all’edificazione del socialismo, realizzando una «più larga unità patriottica dei  cittadini»[12], rafforzando così la dittatura del proletariato.  
In base alle dichiarazioni di Liu Shaoqi l’esperienza della Cina sembrava confermare la possibilità  di avanzare verso il socialismo anche grazie alla collaborazione del partito comunista con classi  sociali e partiti caratterizzati da orientamenti ideologico-politici e interessi economici diversi tra loro.   La politica del fronte unito tornò immediatamente a essere posta al centro delle analisi del  comunismo italiano. Al Congresso era infatti presente una delegazione del PCI, formata da Mauro  Scoccimarro (membro della Segreteria), Giuliano Pajetta (membro del Comitato Centrale) e Davide  Lajolo (direttore de “l’Unità” di Milano). Scoccimarro portò il saluto del PCI e affermò che i  lavoratori e le forze democratiche italiane guardavano con attenzione e interesse a questo congresso,  in quanto ne potevano trarre elementi utili alla causa del comunismo italiano[13].  
Il viaggio di Scoccimarro in Cina fu inoltre posto in risalto da “l’Unità”: il giornalista e senatore  comunista Franco Calamandrei definì l’VIII Congresso del PCC un «grande contributo al marxismo  creatore»[14], che testimoniava la possibilità di edificare pacificamente il socialismo.   Il 20 ottobre 1956 Scoccimarro presentò al CC del PCI un rapporto incentrato proprio sui lavori  dell’VIII Congresso del PCC e questa approfondita relazione consente di documentare l’influenza  che il Congresso da poco tenutosi in Cina ebbe sugli sviluppi ideologici del PCI che stava preparando in questo periodo il proprio VIII Congresso: all’interno di questo documento egli dedicò nuovamente  ampio spazio alla politica del fronte unico.  
Il dirigente friulano affermò nel proprio rapporto che collaborando con i partiti democratici era  possibile realizzare più facilmente obiettivi come lo sviluppo democratico e pacifico verso il  socialismo. Cooperando tra loro queste forze assicuravano «la più larga e profonda unità politica e  morale del popolo»[15] ed era la collaborazione tra la classe operaia e la borghesia nazionale che  costituiva il tratto distintivo della rivoluzione cinese. Scoccimarro chiarì che la borghesia nazionale cinese non coincideva con quelli che in Italia erano definiti “ceti medi”, poiché in Cina questa classe  corrispondeva a una borghesia che non aveva raggiunto una fase di sviluppo monopolistico e non  aveva legami con le forze dell’imperialismo. Questa classe si presentava invece come una forza politica e sociale intermedia e la politica del PCC aveva creato le condizioni che avevano spinto la  maggioranza di essa ad assumere un ruolo attivo nel processo di costruzione socialista. Scoccimarro aggiunse che in Cina ciò era stato possibile grazie all’atteggiamento del PCC che era andato incontro  alle esigenze e agli interessi economici della borghesia nazionale, tutelati assieme a quelli dei  lavoratori; in secondo luogo, questa alleanza, poiché non possedeva solo un carattere economico ma  anche politico, garantiva alla borghesia nazionale di svolgere una funzione politica e sociale nella  società socialista che stava prendendo forma.  
Il PCI, nella visione di Scoccimarro, poteva trarre un’importante insegnamento dall’esperienza  cinese: esso non si sarebbe dovuto limitare a replicarla meccanicamente, ma avrebbe dovuto  sviluppare la propria politica verso i ceti medi, poiché l’alleanza con questi ultimi era considerata un  presupposto indispensabile per garantire uno sviluppo democratico del socialismo in Italia. La  borghesia nazionale nella lettura di Scoccimarro, nonostante alcune differenze con i ceti medi,  presentava anche alcune analogie «con la posizione di forza politica intermedia dei ceti medi nella  società italiana»[16]. L’esperienza del PCC doveva richiamare il PCI a una collaborazione più accorta  e concreta con i ceti medi e per conquistarne l’appoggio non si doveva solo sfruttare il fatto che gli  interessi economici di questi ceti e quelli dei lavoratori coincidevano in quanto si opponevano alla  pressione dei grandi monopoli. Per realizzare tale obiettivo era necessario che il PCI attribuisse a  quest’alleanza anche un carattere politico fondato sui criteri di democrazia e libertà, garantendo così  ai ceti medi la salvaguardia dei loro interessi materiali e un ruolo conforme «alle loro aspirazioni  morali e spirituali»[17]
Il comunismo italiano avrebbe infine dovuto trarre un insegnamento dall’esperienza cinese anche  per quanto concerne i rapporti con gli altri partiti democratici perché il PCC non li aveva eliminati, ma aveva favorito la loro “evoluzione” verso il socialismo. Così, come il PCC aveva adattato la propria  strategia alla condizione sociale e politica della Cina, allo stesso modo il PCI non poteva ignorare il  contesto democratico e multipartitico dell’Italia repubblicana. Era quindi necessario che il  comunismo italiano si adattasse alla propria specifica situazione politica stringendo nuove e più vaste alleanze con altre classi sociali, rendendo più concreta la possibilità di una transizione pacifica al  socialismo.  
Scoccimarro dedicò alla Rpc anche un articolo pubblicato sull’undicesimo numero di “Rinascita” nel novembre 1956, in cui tornò a porre l’accento sull’alleanza tra la classe operaia e i ceti medi e in  cui rilanciò il concetto di “via nazionale” al socialismo[18]: l’articolo consente di percepire il desiderio di rinnovamento che il comunismo italiano cercava di perseguire in questo periodo.  
L’8 dicembre 1956 si aprì l’VIII Congresso del PCI, che avrebbe dovuto costituire il banco di prova  della capacità del partito di rinnovarsi, soprattutto alla luce degli eventi che in quell’anno avevano  sconvolto il movimento comunista (su tutti la rivelazione dei crimini staliniani e la Rivoluzione  ungherese). In questa assise Togliatti annunciò ufficialmente il progetto della via italiana al  socialismo, presentò le celebri “riforme di struttura” e dichiarò che era possibile individuare un ampio  fronte di forze sociali che si opponevano capitalismo, permettendo di formare un’alleanza di classe  più vasta e composita[19]. In un passaggio della propria relazione fu lo stesso segretario del PCI a  riportare quindi l’esperienza del PCC, ricordando come persino la borghesia nazionale partecipasse  alla costruzione del socialismo e affermando che anche in Italia era possibile unire la classe operaia,  le grandi masse contadine, i piccoli e medi coltivatori e un numeroso ceto medio urbano[20].   L’attenzione del PCI verso la Cina socialista non sarebbe però cessata con il 1956, ma si sarebbe  sviluppata ulteriormente alla fine degli anni Cinquanta.  

Il viaggio di Pajetta nella Rpc nella primavera del 1959: le illusioni del PCI

L’interesse dei comunisti italiani per l’esperienza della Cina socialista raggiunse il proprio apice nella  primavera del 1959, quando una delegazione del PCI guidata da Gian Carlo Pajetta (membro della  Direzione e della Segreteria del partito) visitò la Rpc dal 6 aprile al 2 maggio. Oltre a Pajetta la  delegazione comprendeva Antonio Roasio (membro della Direzione), Celso Ghini e Luciano Barca  (membri del CC), Maria Michetti (della Commissione Centrale di Controllo), Gerardo Chiaromonte  e Giuseppe Boffa.  
Il 1° aprile 1959 Togliatti inviò a Mao una lettera, informandolo che lo scopo della visita da parte  della delegazione del PCI era «conoscere e apprendere nuove cose dalla grande esperienza fatta dal  vostro Partito e dal vostro grande popolo nella lotta per la democrazia e il socialismo»[21]; questo  viaggio in conclusione doveva sfociare in un’esperienza “educativa” per la delegazione italiana e il  PCI e venne descritto all’interno di accurati verbali[22].  
In seguito a questo viaggio nel numero di “Rinascita” del luglio-agosto 1959, vennero dedicate  quaranta pagine alla Rpc incentrate su un’attenta analisi dei suoi primi dieci anni di vita e intitolata  La Cina oggi e domani[23]. Questa analisi viene effettuata attraverso una serie di articoli redatti dai  membri della delegazione del PCI giunta in visita nella Cina popolare: vi sono due articoli sui quali  soffermarsi con particolare attenzione.  
Il primo articolo porta la firma di Gian Carlo Pajetta ed è intitolato Dieci anni dalla fondazione  della Repubblica popolare. La Cina verso il socialismo; sin dalle prime righe l’autore afferma come  le trasformazioni che la Cina stava vivendo sotto la guida del PCC costituivano la prova decisiva di  un principio universale, cioè del valore delle vie nazionali come possibilità concreta per edificare il  socialismo[24]. Pajetta ripercorre le tappe decisive della storia del PCC dalla sua fondazione sino alla  Lunga Marcia, considerato l’evento che ha permesso al partito di conoscere la geografia, l’economia,  le tradizioni e le particolarità regionali della Cina. Questa premessa è considerata necessaria da Pajetta  per capire le caratteristiche della prima fase delle trasformazioni socialiste in Cina, fondate sulla  centralità del mondo contadino e dei partiti borghesi o piccolo borghesi. Viene posta in risalto soprattutto la decisione del PCC di mantenere queste alleanze, che avevano permesso di rinnovare la  struttura sociale cinese e avviare nel paese un balzo in avanti[25], considerato un evento che  corrispondeva alle caratteristiche nazionali cinesi e una diretta conseguenza di precisi eventi storici che avevano interessato il paese tra il 1956 e il 1957. Per marciare con maggiore decisione verso il  socialismo il PCC aveva fatto ricorso alla “linea di massa”, attraverso cui le masse stesse  partecipavano attivamente alla vita sociale e alla lotta politica. Il balzo in avanti era considerato come il risultato finale della fiducia riposta dal partito nelle masse, che potevano allo stesso tempo fare  affidamento sulla guida del PCC.  
Pur riconoscendo il valore dell’esperienza della Rpc, Pajetta dichiara che da essa è opportuno  apprendere che nessuna esperienza storica può essere copiata meccanicamente in altre realtà[26]. Nella  parte conclusiva dell’articolo vengono ricordate le diverse tradizioni storiche e condizioni sociali di Italia e Cina, il differente ruolo dei partiti comunisti nei rispettivi paesi, ma viene anche specificato che essi si “esprimono” attraverso un linguaggio comune[27]. Questo linguaggio comune è il frutto della  fedeltà dei due partiti ai principi del marxismo-leninismo, all’internazionalismo proletario e alla  Rivoluzione d’Ottobre[28]8, della quale entrambi i partiti continuavano a riconoscere l’immenso valore  storico. Ma questo linguaggio comune è anche una conseguenza della capacità di entrambi i partiti di  aver saputo legare la loro azione alla storia e alla vita dei loro paesi e dei loro popoli, completamente  diverse[29]. Per comprendere il valore che la storia del PCC assume agli occhi del PCI è sufficiente  riportare le seguenti parole di Pajetta: «Proprio perché i comunisti cinesi sono tanto profondamente  cinesi possono comprenderci e noi possiamo intenderne l’esperienza, perché siamo profondamente  italiani»[30]
Il secondo articolo porta la firma di Luciano Barca[31] e analizza le condizioni economiche della Cina  per spiegare come sia stata tracciata la linea generale cinese, che aveva permesso il Grande balzo in  avanti nel corso del 1958; essa era nata tra il 1956-1957 dopo un bilancio critico del Primo piano  quinquennale[32] intrapreso nel 1953. Il dibattito voleva dare una risposta al seguente quesito: come  poteva essere attuato il principio della priorità dell’industria pesante per fare in modo che l’economia  cinese non si ritrovasse a camminare su una gamba sola, cioè con un’economia dotata di una gamba  adeguatamente sviluppata e di una «rachitica e anchilosata»[33]? Questi concetti erano stati esposti alla  delegazione italiana da Po-Ipo, ministro della Pianificazione economica cinese, durante il colloquio  tenutosi con quest’ultimo il 19 aprile 1959[34].  
Si constatò l’impossibilità di sviluppo dell’industria pesante nel caso in cui non si fosse sviluppato  un mercato dell’industria pesante, cioè l’agricoltura e l’industria dei beni di consumo. Nacque così il  principio del “camminare su due gambe”. In base a questo principio lo sviluppo agricolo e  industriale dovevano essere realizzati contemporaneamente superando così più rapidamente  l’arretratezza delle campagne e instaurando nuovi rapporti sociali: era infatti la stessa trasformazione  dei rapporti sociali che doveva accompagnare e favorire lo sviluppo delle forze produttive[35]. Secondo  Barca la via cinese e il Grande balzo si distinguono per la decisione del PCC di coniugare tra loro la direzione unificata dell’economia con il “decentramento”: lo Stato amministrava “dal centro” solo le aziende più importanti, lasciando alle province e alle città la direzione della maggior parte delle  industrie e ricercando nuovi livelli di direzione economica come le Comuni popolari.   È proprio il decentramento intrapreso attraverso il Grande balzo in avanti l’aspetto su cui Barca  sembra volersi concentrare con maggiore attenzione. Nell’ambito del piano unico i vari livelli  disponevano di un’ampia autonomia in merito alla pianificazione, all’accumulazione, agli  investimenti e alla distribuzione dei prodotti; inoltre province, città e regioni avevano la facoltà di  pianificare, ad esempio, quali impianti costruire e come impiegare le risorse materiali (entro i limiti  della propria circoscrizione). Agli occhi di Barca questi aspetti permettevano alle masse di assumere  un ruolo attivo nell’elaborazione dei diversi piani locali e del piano generale combinando una  direzione centralizzata con una democrazia più estesa. Era possibile mobilitare le masse sotto la guida  del partito grazie a una articolazione che poggiava su vari livelli, dotati di potere e iniziativa[36].   L’interesse per il decentramento e la mobilitazione delle masse popolari sotto la guida del partito  permettono di ricollegarsi alla descrizione delle riforme di struttura offerta da Togliatti all’VIII  Congresso del PCI: queste erano state descritte come delle riforme che non determinavano l’avvento  del socialismo, ma che permettevano di indirizzarsi verso di esso. Tali riforme rappresentavano degli  obiettivi intermedi verso il socialismo che avrebbero modificato i rapporti di classe a vantaggio della  classe operaia in funzione “antimonopolistica”[37]. Togliatti proponeva più precisamente delle riforme per modificare i rapporti di proprietà (ad esempio una riforma agraria) e una nazionalizzazione dei  settori industriali monopolistici, il cui controllo doveva essere lasciato allo Stato consentendo,  attraverso quest’ultimo, di incrementare la rappresentanza operaia nei gruppi dirigenti[38]. Nella Rpc,  attraverso il Grande balzo in avanti, stando alle dichiarazioni di Po-Ipo, era stata riconosciuta alla  classe operaia e contadina la possibilità di prendere parte attivamente all’organizzazione e allo  sviluppo economico intrapreso dal paese. Sono questi gli elementi che spiegano l’attenzione di Barca  e del PCI verso un percorso “innovativo” di edificazione socialista: nella Rpc le masse partecipavano  direttamente alla direzione della vita economica dando vita ad una forma inedita di democrazia. 

Conclusioni

Dalla lettura degli articoli di Pajetta e Barca emerge chiaramente la visione estremamente positiva  che il comunismo italiano aveva tratto del Grande balzo in avanti, descritto come l’evento che stava  consentendo alla Cina di liberarsi dalle catene della povertà e dell’arretratezza che l’avevano a lungo imprigionata. Ma la realtà di questo programma di sviluppo economico fu completamente diversa, e  oggi ne siamo perfettamente consapevoli: il Grande balzo non fu altro che un progetto folle,  insostenibile, irrealizzabile e i cui costi umani furono estremamente elevati. 
La via italiana annunciata da Togliatti affondava le proprie radici non solo nel realismo del leader  italiano, che aveva ben compreso il contesto in cui il PCI si trovava a operare, ma anche nel giudizio estremamente positivo che il comunismo italiano aveva maturato della via cinese al socialismo, come  si è constatato non solo attraverso le parole di Pajetta e Barca, ma anche grazie al testo di Spano e al  rapporto dedicato da Scoccimarro all’VIII Congresso del PCC. Il PCI credette fermamente nella  validità della via cinese e del principio delle vie nazionali come strumenti per distaccarsi dalla via  rivoluzionaria seguita dall’Urss e costruire una società socialista in un contesto pacifico ed il 1959  coincise con il momento culminante dell’interesse del PCI per il socialismo cinese. Nessuno poteva  prevedere che i rapporti tra i due partiti, solo un anno dopo, avrebbero iniziato a incrinarsi. 
La Cina, agli occhi del PCI, rappresentò realmente una “poesia” come avrebbe cantato nel 1992  Giorgio Gaber e solo il tempo avrebbe svelato la vera natura del maoismo, le drammatiche  conseguenze del Grande balzo in avanti e l’illusione in cui il PCI e il comunismo italiano avevano  creduto.

Fonti:

FONTI D’ARCHIVIO

– Lettera di presentazione di Velio Spano al CC del PCC redatta da Palmiro Togliatti, 29 luglio  1949, FG, Apci, Estero, Cina, 1949. 

– Lettera inviata da Togliatti a Mao Zedong per informare il leader cinese dell’arrivo nella Rpc  di una delegazione del PCI guidata da Gian Carlo Pajetta, 1° aprile 1959, FG, Apci, Estero,  Cina, 1959, mf. 0464, p. 2781. 

– Verbali del viaggio in Cina della delegazione del PCI dal 6 aprile al 2 maggio 1959, FG,  Apci, Estero, Cina, mf. 0464, pp. 2782-2913.

– Verbali del viaggio in Cina della delegazione del PCI dal 6 aprile al 2 maggio 1959, incontro  del 19 aprile con Po-Ipo. FG, Apci, Estero, Cina, 1959, mf. 0464, pp. 2881-86.

FONTI A STAMPA

I seguenti articoli di “Rinascita sono stato consultati all’interno dell’emeroteca digitale della  Biblioteca Gino Bianco. Permalink: http://bibliotecaginobianco.it/?e=flip&id=36&t=elenco flipping-Rinascita. 

Scoccimarro M., Grandi successi e positivi insegnamenti della Rivoluzione cinese, “Rinascita”, anno  XIII, n. 11, novembre 1956, p. 569.

La Cina oggi e domani, “Rinascita”, A. A. V. V., anno XVI, n.7-8, luglio-agosto 1959, p. 525. Pajetta G. C., Dieci anni dalla fondazione della Repubblica popolare. La Cina verso il socialismo, in  La Cina oggi e domani, “Rinascita”, anno XVI, n. 7-8, luglio-agosto 1959, p. 526.

Barca L., Pianificazione e sviluppo economico in La Cina oggi e domani, “Rinascita”, anno XVI, n.  7-8, luglio agosto 1959 p. 533.

I seguenti articoli de “l’Unità” sono stati consultati all’interno dell’Archivio digitale de “l’Unità”.  Permalink: https://archivio.unita.news/. 

Spano è giunto a Sciangai. Il saluto del PCI a Mao Tse-Dun, “l’Unità”, anno XXXVI, n. 221,  venerdì 16 settembre 1949, p.1. 

Calamandrei F., Grande contributo al marxismo creatore. Prime considerazioni sul Congresso  cinese, “l’Unità”, anno XXXIII, n. 265, mercoledì 26 settembre 1956, p. 1.

Tra le Fonti a stampa si ricordano inoltre:

VIII Congresso del Partito comunista cinese. Atti e risoluzioni, Editori Riuniti, Roma, 1956.  VIII Congresso del Partito comunista italiano. Atti e risoluzioni, Editori Riuniti, Roma, 1956. Scoccimarro M., La rivoluzione cinese. Rapporto al CC del PCI del 20 ottobre 1956 sui lavori  dell’VIII Congresso del Partito comunista cinese (il testo di questo rapporto è stato consultato presso  la Fondazione Gramsci di Bologna). 

BIBLIOGRAFIA

Fiocco G., Togliatti, il realismo della politica. Una biografia, Carocci Editore, Roma, 2018.  Sabattini M., Santangelo P., Storia della Cina, Editori Laterza, Bari, 2005. 

Samarani G., La Cina contemporanea. Dalla fine dell’impero a oggi. Nuova edizione aggiornata e  ampliata, Einaudi Editore, Torino, 2017. 

Sassoon D., Togliatti e la via italiana al socialismo. Il Pci dal 1944 al 1964, Einaudi Editore, Torino,  1980. 

Spagnolo C., Sul Memoriale di Yalta. Togliatti e la crisi del movimento comunista internazionale  (1956-1964), Carocci Editore, Roma, 2007. 

Spano V., Nella Cina di Mao Ze-Tun, Milano-Sera Editrice, Milano, 1950.

IMMAGINE DI COPERTINA

La fotografia ritraente Pajetta, Mao e Peng Zhen è un fermo immagine del filmato “Viaggio in Cina della delegazione del PCI” custodito nell’Archivio Audiovisivo del Movimento Operaio e Democratico (AAMOD). È posdibile visionare il filmato integrale consultando il sito del suddetto Archivio. Permalink: http://patrimonio.aamod.it/aamod-web/film/detail/IL8300001158/22/viaggio-cina-della-delegazione-del-pci.html?startPage=0&idFondo=IL8000000009


Note:

[1] Lettera di presentazione di Velio Spano al CC del PCC redatta da Palmiro Togliatti, 29 luglio 1949,  FG, Apci, Estero, Cina, 1949. 

[2] Spano è giunto a Sciangai. Il saluto del PCI a Mao Tse-Dun, “l’Unità”, anno XXXVI, n. 221,  venerdì 16 settembre 1949, p.1.

[3] Spano V., Nella Cina di Mao Ze-Tun, Milano-Sera Editrice, Milano, 1950.

[4] Ivi, cit. p. 163.

[5] Ivi, cit. p. 65.

[6] Ivi, cit. p. 60.

[7] Ivi, p. 64.

[8] Ivi, p. 66.

[9] Zedong M., VIII Congresso del Partito comunista cinese. Atti e risoluzioni, Editori Riuniti, Roma,  1956, p. 14.

[10] Liu Shaoqi (1898-1969). Studiò a Mosca nei primi anni Venti e al suo ritorno lavorò con Li Lisan  all’interno del movimento sindacale. Partecipò alla prima fase della Lunga Marcia ma poi rimase  nell’area centromeridionale del paese a condurre il lavoro politico e militare. Nel 1959 divenne  presidente della Repubblica e si affermò come il successore designato di Mao: la Rivoluzione  Culturale spezzò tuttavia i suoi progetti e le sua ambizioni, identificandolo come l’obiettivo numero uno della critica delle guardie rosse. Morì nel 1969 isolato e abbandonato e venne riabilitato solo  nel 1980. Profilo biografico contenuto in Samarani G., La Cina contemporanea. Dalla fine  dell’Impero a oggi. Nuova edizione aggiornata e ampliata, Einaudi Editore, Torino, 2017, p. 491.

[11] Shaoqi L., VIII Congresso del Partito comunista cinese. Atti e risoluzioni, Editori Riuniti, Roma,  1956, cit. p. 60.

[12] Shaoqi L., ivi, cit. p. 63.

[13]Scoccimarro M., ivi, p. 323.

[14] Calamandrei F., Grande contributo al marxismo creatore. Prime considerazioni sul Congresso  cinese, “l’Unità”, anno XXXIII, n. 265, mercoledì 26 settembre 1956, p. 1.

[15] Scoccimarro M., La rivoluzione cinese. Rapporto al CC del PCI del 20 ottobre 1956 sui lavori  dell’VIII Congresso del Partito comunista cinese, cit. p. 11.

[16] Ivi, cit. p. 36.

[17] Ibidem.

[18] Scoccimarro M., Grandi successi e positivi insegnamenti della Rivoluzione cinese, “Rinascita”,  anno XIII, n. 11, novembre 1956, p. 569.

[19] Per approfondire l’importanza dell’VIII Congresso del PCI si consulti Fiocco G., Togliatti, il  realismo della politica. Una biografia, Carocci Editore, Roma, 2018, pp. 315-320.

[20]  Togliatti P., in VIII Congresso del Partito comunista italiano. Atti e risoluzioni, Editori Riuniti,  Roma, 1957, p. 53.

[21] Lettera inviata da Togliatti a Mao Zedong per informare il leader cinese dell’arrivo nella Rpc di  una delegazione del PCI guidata da Gian Carlo Pajetta, 1° aprile 1959, FG, Apci, Estero, Cina,  1959, mf. 0464, p. 2781.

[22]  Verbali del viaggio in Cina della delegazione del PCI dal 6 aprile al 2 maggio 1959, FG, Apci,  Estero, Cina, mf. 0464, pp. 2782-2913.

[23]  La Cina oggi e domani, “Rinascita”, anno XVI, n.7-8, luglio-agosto 1959, p. 525.

[24] Pajetta G. C., Dieci anni dalla fondazione della Repubblica popolare. La Cina verso il  socialismo, in La Cina oggi e domani, “Rinascita”, anno XVI, n. 7-8, luglio-agosto 1959, p. 526.

[25] Ivi, p. 527.

[26] Ivi, p. 529.

[27] Ivi, p. 530.

[28] Ibidem.

[29] Ibidem.

[30] Ibidem.

[31] Barca L., Pianificazione e sviluppo economico in La Cina oggi e domani, “Rinascita”, anno XVI,  n. 7-8, luglio agosto 1959 p. 533.

[32] Ivi, p. 534.

[33] Ibidem.

[34] Verbali del viaggio in Cina della delegazione del PCI dal 6 aprile al 2 maggio 1959, incontro del  19 aprile con Po-Ipo. FG, Apci, Estero, Cina, 1959, mf. 0464, pp. 2881-86.

[35] Sabattini M., Santangelo P., Storia della Cina, Editori Laterza, Bari, 2005, p. 616.

[36] Barca L., Pianificazione e sviluppo economico, pp. 536-537.

[37] Spagnolo C., Sul Memoriale di Yalta. Togliatti e la crisi del movimento comunista internazionale  (1956-1964), Carocci Editore, Roma, 2007, p. 148.

[38] Ivi, p. 149.

Il sacro tocco di Jaffa


Gros A. J., Bonaparte visitant les Pestiférés de Jaffa , 1804, Figura 1.

STORIA DI UN MIRACOLO NELL’ETA’ DELLA RIVOLUZIONE

Di Daniele Cal

«Vous vous confessez! Eh bien, moi, je suis oint,
 vous pouvez vous confesser à moi» (Napoléon)[1]

Abstract

La celebre opera Les Rois thaumaturges di Bloch, ormai assurta a classico della storiografia di tutti i tempi, termina la sua narrazione nel 1825 ma dimentica di indicare come il tocco taumaturgico oltrepassi la Rivoluzione francese. Aspetto del tutto trascurato, è attraverso Napoleone e la costruzione artistica della sua figura nel quadro di Gros e nelle parole di Girodet che la taumaturgia torna a riemergere. Unendo gli strumenti della storiografia, dell’antropologia storica e della storia dell’arte, il presente articolo cerca di comprendere i meccanismi che stanno alla base della costruzione di un mito moderno, dalla sua nascita, alla sua narrazione e alla sua sopravvivenza in un’epoca storica cruciale per la contemporaneità.

La célèbre œuvre Les Rois thaumaturges de Bloch, devenue un classique de l’historiographie de tous les temps, termine son récit en 1825 mais elle oublie d’indiquer que la touche thaumaturgique dépasse la Révolution française. Aspect tout à fait négligé, c’est à travers Napoléon et la construction artistique de sa figure dans le cadre de Gros et dans les paroles de Girodet que la thaumaturgie refait surface. En combinant les outils de l’historiographie, de l’anthropologie historique et de l’histoire de l’art, cet article cherche à comprendre les mécanismes qui sous-tendent la construction d’un mythe moderne, depuis sa naissance, jusqu’à son récit et sa survie dans une époque historique cruciale pour la contemporanéité.

One of the most famous of Bloch’s works Les Rois thaumaturges, which is now a classic of historiography, ends its narration in 1825 but forgets to show how the thaumaturgical touch reaches beyond the French Revolution. In fact, thaumaturgy returns to the cultural landscape of France through Napoleon and the artistic construction of his figure in the painting of Gros and in the words of Girodet. Combining the tools of historiography, historical anthropology and art history, this article seeks to understand the mechanisms that underlie the construction of a modern myth, from its birth to its narration and its survival in a crucial historical era for contemporaneity.

Il sacro tocco di Jaffa

Introduzione

Nel 1924 Marc Bloch pubblica il saggio Les rois thaumaturges, «la storia di un miracolo e della credenza in questo miracolo» o, più precisamente, la sua «storia totale», come l’ha definita Jacques Le Goff[2]. L’opera, conosciuta in tutto il mondo, analizza un fatto storico molto preciso: la credenza nel tocco miracoloso (taumaturgico) attribuito ai sovrani di Francia soprattutto, ma non solo, nella cura dei malati di scrofola. Ma lo fa non tanto nel quadro di un preciso momento storico – e questa è una delle novità più importanti dell’opera – bensì all’interno del suo arco cronologico di sviluppo, dalle origini medievali alla sua inevitabile conclusione tra Sette e Ottocento, secondo le più recenti (per l’epoca) correnti storiografiche, che andranno in seguito a confluire nell’École des Annales, fondata nel 1929. Ai fini della presente trattazione non sarà necessario soffermarsi su quest’opera tranne che per un fatto che dà origine alla presente ricerca.

Se infatti per Bloch la fine di questa storia ha una data e un nome precisi, 31 maggio 1825 e re Carlo X di Borbone[3], rimane tuttavia sostanzialmente inesplorato quello iato che va dal 1789 al 1815, ossia l’esperienza rivoluzionaria e napoleonica, la cui presenza non giustificherebbe di per sé la ripresa di questa credenza durante la Restaurazione. A proposito della Rivoluzione, infatti, Bloch si limita giustamente a sostenere che la monarchia dovette abbandonare qualsivoglia prerogativa di natura divina (droit divin[4]). L’esperienza napoleonica è invece totalmente taciuta. Napoleone non compare che in una nota[5], quando Bloch ricorda una battuta che l’imperatore a Sant’Elena disse al barone Gourgaud, compagno d’esilio, che lamentava la mancanza di sacerdoti: «Vous vous confessez! Eh bien, moi, je suis oint, vous pouvez vous confesser à moi!»[6] . Grazie a questa nota Bloch accostava in un modo sottile e non troppo esplicito il “figlio della Rivoluzione” alla linea dei re taumaturghi. In questo caso particolare il concetto espresso ironicamente da Napoleone veniva equiparato ad alcune parole, tutt’altro che ironiche, attribuite a Carlo I d’Inghilterra e contenute nell’Eikon Basiliké:

«It may be, I am esteemed by my deniers sufficient of myself to discharge my duty to God as a priest: though not to men as a prince. Indeed I think both offices, regal and sacerdotal, might well become the same person, as anciently they were under one name, and the united rights of primogeniture»[7].

Napoleone è dunque coerentemente collocato dentro il quadro delineato nell’opera, ma in una luce del tutto originale e particolare, visto l’aneddoto scelto. Eppure, questa nota non pare sufficiente a spiegare il ruolo assunto da questa figura nel traghettare la credenza nel tocco taumaturgico oltre il tumultuoso fiume rivoluzionario. Troppe domande rimangono insolute: come sopravvisse il tocco taumaturgico? Si palesò in qualche circostanza? Come veniva considerato questo droit divin da Napoleone, da un lato, e dal resto della popolazione francese, dall’altro?

Non si sa – racconta Bloch – quando Luigi XVI, il Roi Martyr della Rivoluzione, compì il suo ultimo “tocco”[8] – mentre si ha notizia del primo nel 1775 , l’indomani della sua incoronazione come da tradizione[9]. A quel tempo gli illuministi avevano già da tempo gettato ampio discredito sulla faccenda[10], ma certamente solo con la rivoluzione dell’89 si potrà davvero dare un colpo di grazia alla questione, almeno apparentemente. Sorprendentemente, questa regalità abbattuta a colpi di ghigliottina sarebbe ritornata sotto una diversa veste nel 1804 con l’ascesa di Napoleone al soglio imperiale, e con essa sarebbe ricomparso anche il tocco taumaturgico. Bloch però di questo non ne fa menzione.

Bisognerà aspettare la pubblicazione nel 1942 dell’articolo Napoleon as “Roi Thaumaturge” da parte di Walter Friedlaender sul Journal of the Warburg and Courtauld Institutes prima di veder formulato chiaramente l’accostamento tra la pratica taumaturgica e la figura di Napoleone[11]. Tuttavia, in appena tre facciate di testo, l’autore si limita in pratica solo a constatare il fatto e poco altro, individuandone l’origine nel dipinto Bonaparte visitant les Pestiférés de Jaffa di Antoine-Jean Gros, che in questo come in altre opere ha saputo mettere bene in risalto – afferma Friedlaender – l’umanitarismo più o meno propagandato dell’Imperatore dei Francesi. Questo articolo appare dunque del tutto insoddisfacente qualora ci ponessimo come obiettivo un’analisi completa del fatto storico.

È dunque necessario compiere un passo indietro e rianalizzare questo evento partendo da ciò che accadde realmente a Jaffa e da come quel momento fu vissuto dai contemporanei. Il passo ulteriore sarà la ricostruzione della storia del dipinto di Gros, delineando il contesto culturale e i motivi dietro la scelta del soggetto, per verificare come e perché venne introdotto il tocco taumaturgico, e se esso ebbe effettivamente un impatto culturale, e di quale entità.

La peste di Jaffa

Grazie alla straordinaria mole di studi prodotti sull’età napoleonica[12], possiamo accingerci facilmente alla ricostruzione dei fatti, in quanto universalmente accettata dagli storici. Nel luglio 1798 il generale Bonaparte aveva intrapreso una spedizione militare e scientifica in Egitto destinata da un lato ad ottenere vantaggi politici, economici e strategici alla Repubblica Francese[13], dall’altro col fine di «aprirlo [l’Egitto] completamente, per renderlo accessibile all’osservazione europea»[14]. Al di là di queste considerazioni che purtroppo non possono trovare qui maggiore spazio, è entro questa cornice storica che si colloca l’avvenimento centrale di questa trattazione.

Il 3 marzo 1799 l’Armée d’Orient al comando del generale Bonaparte giunse presso l’antica città di Jaffa (oggi in Israele), assediandola e prendendola d’assalto senza molta difficoltà il 7 dello stesso mese. Le successive violenze perpetrate ai danni della popolazione e della guarnigione, che sempre accompagnano la guerra, avevano causato la diffusione del morbo pestifero tra i soldati francesi. Poco prima della ripartenza dell’esercito, la situazione era già divenuta pesante:

«I sintomi della peste eransi già manifestati a quell’ora. Molti soldati della 32a mezza brigata furono i primi ad esser colpiti da quel miserando malore, ed un rapporto dei generali Bon e Rampon contristò profondamente il generale in capite; il quale temè che la pestilenzia non si propagasse su tutto il suo esercito. Fu aperto allora a Jaffa un ospedale per gli appestati, ove ebbe luogo quella scena famosa da cui il signor Gros ha tratto il soggetto per uno dei capi d’opera della pittura francese. [L’11 marzo] Bonaparte ne visitò tutte le sale accompagnato dai generali Berthier e Bessières, dall’ordinatore in capo Daure e dal medico maggiore Desgenettes. Il generale parlò agli ammalati, li rincorò, e toccò le loro piaghe dicendo loro: «Voi vedete bene da voi medesimi che la malattia non è micidiale come volgarmente si crede». Allorché egli uscì fu vivamente rimproverato dalla sua imprudenza, ed egli freddamente rispose: «È il mio dovere; sono il generale in capo». Questa visita e la generosità di Desgenettes, che inoculandosi la peste alla presenza dei nostri soldati, guarivasi con quei rimedi stessi che soleva agli altri amministrare, rassicurarono alquanto il morale dell’esercito caduto nell’abbattimento all’apparire di quel morbo sconosciuto nei nostri climi: e fin da quel momento tutti gli ospedali furono sottoposti allo stesso governo»[15].

A scrivere questo resoconto nella traduzione italiana del 1839 è Jacques De Norvins (1769-1854), politico, giornalista e storico devoto alla causa napoleonica, celebre per aver realizzato una biografia edita nel 1827 che conobbe uno straordinario successo editoriale, contribuendo a fondare la leggenda aurea dell’Imperatore[16]. Si tratta quindi di un testo di riferimento per la successiva storiografia napoleonica, nonché uno dei testi più emblematici della corrente “bonapartista” all’interno del panorama di studi sull’argomento. La descrizione è chiara: tralasciando gli aspetti che l’autore ha sottilmente voluto mettere in risalto, come il coraggio e il carisma del generale in capo, ci si può accorgere che tuttavia è totalmente assente un qualsiasi riferimento all’atto taumaturgico. Piuttosto, da queste poche righe sembra che il generale nel dare coraggio agli ammalati abbia puntato più sulla ragione che su un atto di fede: egli tocca i malati quasi a dimostrare che non hanno nulla da temere dalla malattia[17]. O meglio, l’atto di fede c’è, ed è quello che il generale chiede ai suoi uomini nei suoi confronti mentre minimizza la pericolosità della malattia, ma non riguarda alcun potere a lui trascendente[18]. La differenza è sottile ma decisiva.

Appurato che le prime ricostruzioni storiche non colgono l’aspetto rilevato successivamente da Friedlaender nel suo articolo Napoleon as “Roi Thaumaturge”[19], è necessario verificare dalle testimonianze dell’epoca se vi sono degli indizi utili. Fortunatamente, la memorialistica non è affatto scarsa o lacunosa: conserviamo una Histoire médicale de l’Armée d’Orient scritta dal medico maggiore René-Nicolas Dufriche, barone Desgenettes, il quale scrive il seguente resoconto della giornata:

«Le 21 [ventôse an VII], le général en chef, suivi de son état-major, vint visiter les hôpiteaux. Un moment avant son départ du camp le bruit s’étoit répandu jusque dans sa tente que plusieurs militaires étoient tombés morts en se promenant sur le quai: le fait est simplement que des infirmiers turks, chargés de jeter à la mer des hommes morts dans la nuit à l’hôpital, s’étoient contentés de les déposer devant la porte de cet établissement. Le général parcourut les deux hôpiteaux, parla à preqsque  tous les militaires, et s’occupa plus d’une heure et demie de tous les détails d’une bonne et prompte organisation; se trouvant dans une chambre étroite et très encombrée, il aida à soulever le cadavre hideux d’un soldat dont les habits en lambeaux étoient souillés par l’ouverture d’un bubon abscédé. Après avoir essayé sans affectation de reconduire le général en chef vers la porte, je lui fis entendre qu’un plus long séjour devenoit beaucoup plus qu’inutile. Cette conduite n’a pas empêche que l’on ait souvent murmuré dans l’armée sur ce que je ne m’étois pas opposé plus formellement à la visite si prolongée du général en chef: ceux-là le connoissent bien peu qui croient qu’il est des moyens faciles pour changer ses résolutions ou l’intimider par quelques dangers»[20].

Come ci si aspetterebbe da un medico, non compare alcun accenno ad un tocco miracoloso, mentre la ricostruzione dei fatti rimane sostanzialmente inalterata. Particolare curioso e differente rispetto alla ricostruzione del Norvins, per Desgenettes il generale in capo più che “toccare” un malato diede l’esempio aiutando proprio a sollevare e spostare un cadavere. L’effetto sul morale della truppa è fuori questione, ma concettualmente è una situazione opposta. Anche altri testimoni della giornata, in particolare il capo di stato maggiore Berthier e l’ufficiale Bourienne, non fanno alcun accenno a qualsivoglia “tocco” nelle loro memorie[21].

Di fronte all’assenza di qualsiasi riferimento in questi testi, sorge quindi spontanea la domanda sul dove compaia per la prima volta, posto a priori che la tesi di Friedlaender sia corretta. È necessario quindi analizzare, in ultima istanza, il dipinto che ha dato origine alla questione, Bonaparte visitant les Pestiférés de Jaffa  di Antoine Jean Gros.

La storia in un dipinto

Antoine Jean Gros (1771-1835), allievo del celebre Jacques Louis David (1748-1825), era all’epoca dei fatti un pittore affermato. Già conosciuto per alcuni ritratti realizzati per i membri della Convenzione nazionale, nel 1793 le turbolenze politiche lo avevano spinto a compiere un viaggio in Italia, anche al fine di perfezionare la sua arte. Nel 1796 ebbe la fortuna di conoscere il generale in capo dell’Armée d’Italie, Bonaparte, il quale riconobbe subito il valore dell’artista commissionandogli il celebre Bonaparte au pont d’Arcole (1796). Non lo seguì però in Egitto, diversamente da molti artisti e scienziati, preferendo prolungare la sua permanenza in Italia. Dunque, quando nel 1804, tornato in Francia da qualche anno, gli fu commissionato dallo stesso primo console Napoleone un dipinto su Jaffa, Gros dovette affidarsi alle testimonianze ufficiali, in particolare quella dell’artista Dominique Vivant Denon (1747-1825)[22], che dal 1800 era divenuto il direttore generale del Musée Napoléon, oggi Louvre. Nemmeno Denon in realtà fu testimone oculare della giornata dell’11 marzo 1799 a Jaffa, in quanto apprendiamo dalle sue memorie – Voyage dans le Basse et le Haute Egypte[23] – che egli in realtà non aveva seguito il generale Bonaparte in Siria, ma il suo subordinato generale Desaix lungo le rive del Nilo.

Gros J. A., Première esquisse des Pestiférés de Jaffa, 1804, Figura 2

Con tali premesse, possiamo arrivare ad una prima conclusione: il “sacro tocco” di Jaffa non è mai avvenuto. Non solo, esso fu propriamente “inventato” dall’artista. Possediamo infatti due disegni preparatori al quadro in grado di dimostrarcelo, molto diversi circa l’azione compiuta dal soggetto del dipinto. Il primo di questi, quello che poi venne scartato, raffigura il generale Bonaparte a Jaffa secondo la descrizione tramandataci dal medico Desgenettes: in una stanza stretta e affollata, il generale Bonaparte accompagnato dal suo entourage è intento a sollevare il corpo senza vita di un appestato, la cui gamba è bagnata dai liquidi fuoriusciti dall’ascesso di un bubbone (v. Figura 2).

All’apertura del Salon il 18 settembre 1804 fu presentata invece la realizzazione del secondo bozzetto – quello che oggi possiamo vedere ospitato in una delle sale del Louvre (v. Figura 1) – con la seguente descrizione:

«[…] Pour éloigner davantage l’effrayante idée d’une contagion subite et incurable, il fit ouvrir devant lui quelques tumeurs pestilentielles, et en toucha plusieurs. Il donna, par ce magnanime dévouement, le premier exemple d’un genre de courage inconnu jusqu’alors, et qui fit depuis des imitateurs»[24].

Il cambiamento è decisivo. Gros mostra di aver fatto tesoro dell’esperienza maturata in Italia, mostrandoci il generale Bonaparte in una posa che ricorda da vicino la ritrattistica di San Rocco o San Carlo Borromeo[25], ma qui la calma imperturbabile della santità è stata trasformata e rinnovata dal razionalismo rivoluzionario e dalla particolare quanto straordinaria qualità individuale del generale in capo, mentre la cornice al soggetto presenta un vortice di malati e disperati rappresentati in una posa dinamica, dominati nelle loro espressioni dai più profondi e laceranti sentimenti, come suggerito dalla figura in ombra in primo piano, sulla sinistra, di michelangiolesco ricordo.

Sebbene il riferimento non sia del tutto esplicito, sia visivamente che attraverso la descrizione che lo accompagnava durante la sua prima esposizione al Salon del 1804 il dipinto suggerisce all’osservatore del tempo una pratica che in molti ricordavano ancora: il tocco della piaga del malato. Come accennato in precedenza, l’ultima cerimonia taumaturgica era avvenuta nel 1775[26], quindi è del tutto verosimile che vi fossero persone che, trent’anni dopo, potessero ricordare il precedente creando un collegamento tra le due circostanze. Oltretutto, il ricordo della monarchia era ancora assai vivo – d’altronde Luigi XVI era stato ghigliottinato solo undici anni prima e il “partito” monarchico francese era stato solo molto recentemente debellato[27].

Una creazione ad arte, quindi, ma densa di significato. Il successo fu straordinario per Gros: il pubblico lo applaudì e in suo onore fu organizzato un banchetto, mentre il suo nume tutelare Vivant Denon scriveva al primo console Napoleone congratulandosi del successo e addirittura paragonando il giovane pittore al Tintoretto o al Veronese[28]. Durante i festeggiamenti, l’amico Girodet (1767-1824) recitò un componimento che racchiudeva bene il significato dell’opera e manifestava altrettanto chiaramente il sentimento del pubblico:

«[…] C’est peu: lui-même encor, d’une main intrépide, / au péril de ses jours, touche leur mal fétide; / Desgenettes en vain l’avertit du danger, / qu’on le vit, si souvent, lui-même partager. / Cependant le bruit court, dans ce lieu de misère, / qu’on a vu s’y montrer un ange tutélaire; / aussitôt tout s’émeut, tous accourent le voir; / et dans leurs yeux mourants, brille un rayon d’espoir. / […] Si le héros lui parle, il est sûr de guérir. […]»[29].

È una vera e propria trasfigurazione in cui il sacro si unisce al profano, i caratteri sacrali di un santo si manifestano congiuntamente al nuovo spirito rivoluzionario e pre-romantico: il generale Bonaparte è il nuovo eroe della nuova Francia. Quanta differenza rispetto a ciò che avvenne l’11 marzo di cinque anni prima! Eppure è questa la versione che popolarmente si afferma nelle menti e nei cuori di chi quei fatti non li ha potuti vedere.

Il console Bonaparte si compiacque, giustamente, dell’opera. Se non altro per il fatto che, pur non essendo ancora un “unto” – come lo diverrà da lì a pochi mesi, nel dicembre 1804 – l’ambiguità della rappresentazione è tutta a suo favore, «efficacemente sospeso tra la sacralità di un re taumaturgo e la determinazione volontaristica di un eroe contemporaneo»[30]; ad un tempo continuatore dei fasti carolingi, a cui la sua politica continuamente si richiamava[31], e rigeneratore della mentalità francese.

Nonostante il “sacro tocco di  Jaffa” si riveli, alla fine, un’invenzione, essa ha nondimeno[3]  plasmato il ricordo dei contemporanei traghettando, pur con diversi mezzi, questa antica pratica al di là della Rivoluzione stessa. Come dirà lo stesso Napoleone a Sant’Elena: «Quanto è forte negli uomini la potenza dell’immaginazione! […] Vedete gli effetti dell’entusiasmo? Sì è proprio vero: l’immaginazione governa il mondo»[32].

Fonti:

FONTI A STAMPA

Desgenettes Nicolas René Dufriche, Histoire médicale de l’Armée d’Orient, Croullebois, Bossanger, Masson et Besson ed., Paris, 1802;

Gourgaud Gaspard, Aubry Octave (a cura di), Sainte-Hélène. Journal inédit de 1815 à 1818, Ernest Flammarion Ed., Paris, 1944-1947;

Norvins Jacques Marquet De Montbreton De, Storia di Napoleone, Tip. Elvetica, Capolago, 1839;

FONTI ICONOGRAFICHE

Gros Antoine Jean, Première esquisse des Pestiférés de Jaffa (1804), 93.98 x 113.03 cm, olio su tela, New Orleans Museum of Art, New Orleans, USA.

Bonaparte visitant les pestiférés de Jaffa (1804), 532 x 720 cm, olio su tela, Musée du Louvre, Paris, France.

BIBLIOGRAFIA 

Bloch Marc, Les rois thaumaturges, Libraire Istra, Strasbourg, 1924;

Chandler David G., The campaigns of Napoleon, Scribner, New York, 1966; trad. it. Le Campagne di Napoleone, BUR Rizzoli, Milano, 2010;

Chimot Jean Philippe, La vérité sur le mensonge. De Gros à Daumier, in «Écrire l’histoire», n. 9, a. 2012, pp. 47-56, in linea: http://journals.openedition.org/elh/236;

Delestre Jean-Baptiste, Gros. Sa vie et ses ouvrages, Renouard ed., Paris, 1867;

Friedlaender Walter, Napoleon as “Roi Thaumaturge”, in «Journal of the Warburg and Courtauld Institutes», apr. 1941 – jul. 1942, vol. 4, n. 3/4, pp. 139-141;

Grigsby Darcy Grimaldo, Rumor, Contagion, and Colonization in Gros’s Plague-Stricken of Jaffa (1804), in «Representations», estate 1995, n. 51, Un. Of California Press, pp. 1-46;

Lentz Thierry, Napoléon et Charlemagne, in Napoléon et l’Europe. Regards sur une politique, Lentz Thierry (a cura di), Fayard, Paris, 2004;

Migliorini Luigi Mascilli, Napoleone, Salerno Editrice, Roma, 2020;

Said Edward, Orientalism, Vintage Books Edition, New York, 1979;

Tripier Le Franc Jean, Histoire de la vie et de la mort du Baron Gros, le grand peintre, Martin & Baur ed., Paris, 1880;

Tulard Jean, Napoléon ou le mythe du sauveur, Fayard, Paris, 1977, trad. ita. Napoleone. Il mito del salvatore, Rusconi, Milano, 1994;

SITOGRAFIA

https://www.napoleon.org/histoire-des-2-empires/biographies/norvins-jacques-de-baron-marquet-de-montbreton-1769-1854-administrateur-et-historien-de-napoleon/


NOTE:

[1] Gourgaud G., Aubry O. (a cura di), Sainte-Hélène. Journal inédit de 1815 à 1818, t. II, p. 143, Ernest Flammarion Ed., Paris, 1944-1947

[2] Le Goff J., prefazione a Bloch M., Ed. Gallimard, Paris, 1983;

[3] V. Bloch M., Les rois thaumaturges, Libraire Istra, Strasbourg, 1924, pp. 403-404;

[4] Ivi. p. 401;

[5] Ivi, p. 350, n. 1;

[6] «Voi vi confessate? Eh ben, caro mio, io sono unto, vi potete confessare davanti a me!», v. n. 1, trad. mia, Ibid.;

[7] «Probabilmente i miei denigratori mi ritengono capace per me stesso di assolvere al mio dovere verso Dio come sacerdote, ma non verso gli uomini come principe. Invero, penso che i due uffici, regale e sacerdotale, possano ben unirsi nella stessa persona, come anticamente lo erano sotto un unico nome, e i diritti uniti di primogenitura», cit. Ibid., trad. mia;

[8] M. Bloch, Les rois… op. cit., p. 399;

[9] Ibid.;

[10] Voltaire, tra tutti, dirà: «Le temps viendra que la raison, qui commence à faire quelque progrès en France, abolira cette coutume» («Verrà il tempo in cui la ragione, che comincia a fare qualche progresso in Francia, abolirà questo costume» trad. mia), da Voltaire, Essai sur les Moeurs, t. XI, chap. XLII, p. 365, citato in M. Bloch, Le rois… op. cit., p. 399;

[11] W. Friedlaender, Napoleon as “Roi Thaumaturge”, in «Journal of the Warburg and Courtauld Institutes», apr. 1941 – jul. 1942, vol. 4, n. 3/4, pp. 139-141;

[12] Se ne conta un numero maggiore dei giorni che ci separano dalla sua morte. Jean Tulard, Napoléon ou le mythe du sauveur, Fayard, Paris, 1977, trad. ita. Napoleone. Il mito del salvatore, Rusconi, Milano, 1994, p. 13;

[13] J. Tulard, Napoléon… op. cit., pp. 111-115;

[14] E. Said, Orientalism, Vintage Books Edition, New York, 1979, p. 83, trad. mia;

[15] J. De Norvins, Storia di Napoleone, Tip. Elvetica, Capolago, 1839, p. 140;

[16] J. Michaud, Biographie universelle, t. 31, p. 61; Dictionnaire Napoléon, p. 1254, notice Jean Tulard, citati in https://www.napoleon.org/histoire-des-2-empires/biographies/norvins-jacques-de-baron-marquet-de-montbreton-1769-1854-administrateur-et-historien-de-napoleon/;

[17] In realtà a torto e con grande rischio, dato che su 300 ammalati ne sopravvissero 36. V. David G. Chandler, The campaigns of Napoleon, Scribner, New York, 1966; trad. it. Le Campagne di Napoleone, BUR Rizzoli, Milano, 2010, v. 1, p. 315;

[18] D. G. Grigsby, Rumor, Contagion, and Colonization in Gros’s Plague-Stricken of Jaffa (1804), in «Representations», estate 1995, n. 51, Un. Of California Press, p. 9;

[19] V. n. 11;

[20] «Il 21 [ventoso anno VII, 11 marzo 1799], il generale in capo, seguito dal suo stato maggiore, venne a visitare gli ospedali. Un momento prima della sua partenza dall’accampamento si era sparsa la voce fino alla sua tenda che molti militari erano caduti morti mentre camminavano sulla strada: il fatto è semplicemente che degli infermieri turchi, incaricati di gettare a mare gli uomini morti durante la notte presso l’ospedale, s’erano accontentati di depositarli davanti all’uscita di questo. Il generale percorse i due ospedali, parlando con quasi tutti i militari, e si occupò per più di un’ora e mezza di tutti i dettagli per una buona e pronta organizzazione; trovandosi presso una camera stretta e assai affollata, aiutò a sollevare il cadavere orrendo d’un soldato i cui abiti in brandelli s’erano insozzati per l’apertura dell’ascesso di un bubbone. Dopo aver provato senza affettazione di ricondurre il generale in capo verso l’uscita, gli feci intendere che un soggiorno prolungato sarebbe divenuto più che inutile. Questa condotta non impedì che si mormorasse sovente presso l’armata che non mi fossi più formalmente opposto alla visita prolungata del generale in capo: lo conoscono ben poco quelli che credono che esistano mezzi facili per fargli cambiare risoluzione o intimidirlo per qualche pericolo». Da R. Desgenettes, Histoire médicale de l’Armée d’Orient, Croullebois, Bossanger, Masson et Besson ed., Paris, 1802, pp. 49-50, trad. mia;

[21] J. P. Chimot, La vérité sur le mensonge. De Gros à Daumier, in «Écrire l’histoire», n. 9, a. 2012, in linea: http://journals.openedition.org/elh/236, p. 49;

[22] J. Tripier Le Franc, Histoire de la vie et de la mort du Baron Gros, le grand peintre, Martin & Baur ed., Paris, 1880, p. 206;

[23] D. V. Denon, Voyage dans le Basse et le Haute Egypte, Didot L’Aine ed., Paris, 1802;

[24] «[…] Per allontanare maggiormente la spaventosa idea di un contagio improvviso e incurabile, fece aprire davanti a lui qualche tumore pestilenziale, toccandone molti [corsivo mio]. Egli dona, per questo magnanimo sacrificio, il primo esempio di un genere di coraggio sconosciuto fino ad allora, e che da allora ha conosciuto degli imitatori», P. Sanchez, X. Seydoux, Les Catalogues des Salons, L’Échelle de Jacob, t. 1, 1801-1819, 1999, a sua volta citato in Jean Philippe Chimot, La vérité… op. cit.,p. 49, trad. mia;

[25] Soggetti che Gros aveva studiato, v. Friedlaender, Napoleon… op. cit., p. 140;

[26] V. n. 8;

[27] Basti ricordare che il colpo di grazia, la cattura e l’esecuzione del Duca d’Enghien, avvenne nel marzo 1804. Da ciò deriva anche la considerazione che il dipinto di Gros non può essere circoscritto facilmente ad un atto di sfacciata propaganda ordinata da un regime autoritario stabilizzato, in quanto la situazione politica era tutt’altro che certa nel 1804. V. Grigsby, Rumor… op. cit., p. 4;

[28] J.-B. Delestre, Gros. Sa vie et ses ouvrages, Renouard ed., Paris, 1867; pp. 92 e 93;

[29] «Non basta: lui stesso [Bonaparte], con mano intrepida, / a rischio dei suoi giorni, tocca il loro mal fetido; / Desgenettes invano l’avverte del pericolo, / che abbiamo visto lui stesso condividere così spesso. / Tuttavia c’è una voce in questo luogo di miseria, / che abbiamo visto manifestarsi in un angelo custode; / subito tutto si sposta, tutti accorrono a vederlo; / e sui loro occhi morenti, brilla un raggio di speranza. / […] Se l’eroe gli parla, egli è sicuro di guarire. […]», Ivi, p. 92, trad. mia;

[30] L. Mascilli Migliorini, Napoleone, Salerno Editrice, Roma, 2020, p. 151;

[31] «Comme son époque, Napoléon avait “l’obsession de l’histoire”. Il y puisait des références, des symboles, des examples. Il mit cette matiére au service de sa légitimité et de sa politique, voulant ainsi placer son règne dans la continuité de l’histoire de France, des Gaulois, à ses prédecesseurs directs, y compris les Bourbons.», Thierry Lentz, Napoléon et Charlemagne, in Napoléon et l’Europe. Regards sur une politique, Thierry Lentz (a cura di), Fayard, Paris, 2004, p.11;

[32] E. De Las Cases, Il Memoriale di Sant’Elena, Gherardo Casini Ed., Roma, 1962, v. 1,p. 260.


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Garofani rossi a Lisbona

di Federico Dionisi

Abstract

Il 25 aprile 1974 l’esercito portoghese metteva fine alla più longeva dittatura fascista d’Europa. La Rivoluzione dei garofani, come verrà chiamata, segnerà non solo l’inizio della transizione democratica per la penisola iberica ma per molti, in Portogallo come nel mondo,  rappresenterà la speranza, in seguito disattesa, di una trasformazione in senso socialista della società.

On the 25th of april 1975 the Portuguese army overthrew the oldest fascist dictatorship of Europe. The “carnation revolution”, as it will be called, not only led to the democratic transition in the Iberian peninsula but it represented for many, in Portugal and in the whole world,  the hope, later disregarded, of a transformation in a socialist way of the society.

Le 25 avril 1974, l’armée portugaise mettait fin à la plus longue dictature fasciste d’Europe. La Révolution des œillets, comme on l’appellera, marquera non seulement le début de la transition démocratique de la péninsule ibérique mais, pour beaucoup de gens, au Portugal comme dans le monde, elle représentera l’espoir, finalement négligé, d’une transformation de la société dans le sens du socialisme.

Garofani rossi a Lisbona


Nella notte tra il 24 e il 25 aprile del 1974, un colpo di Stato operato dalle forze armate portoghesi metteva fine alla più longeva dittatura d’Europa. La Rivoluzione dei garofani, come verrà poi chiamata, significherà per il Portogallo non solo l’inizio della transizione alla democrazia, ma anche l’avvio di un vero e proprio processo rivoluzionario di stampo socialista, che susciterà allo stesso tempo timori e grandi speranze nell’Europa intera.

Il Portogallo, piccolo paese ai margini del continente, era retto da un regime autoritario detto Estado Novo, istituito da Antonio de Oliverira Salazar tra la fine degli anni ’20 e l’inizio degli anni ‘30[1] e in gran parte modellato sul fascismo italiano. Cardini dell’Estado Novo erano l’organizzazione corporativa dell’economia, il clericalismo, l’antiparlamentarismo e la difesa del vasto e secolare impero coloniale portoghese. Base sociale del regime era la grande borghesia agraria, che negli anni della Repubblica aveva visto i propri privilegi messi in discussione dai fermenti liberali e democratici.

Tenutosi prudentemente al di fuori del Secondo conflitto mondiale, il Portogallo salazarista era riuscito a sopravvivere (similmente alla Spagna di Franco) alla sconfitta dei fascismi europei, ritagliandosi un ruolo nel nuovo mondo bipolare in chiave anticomunista e diventando addirittura membro fondatore della NATO nel 1949[2].

Tuttavia, lo sviluppo economico e sociale vissuto anche dal Portogallo nel secondo dopoguerra, con la crescita della classe media e soprattutto di un’inquieta classe operaia, inizierà ben presto a far apparire il regime sempre più anacronistico e scollegato dalla realtà. In questo contesto riprendono le attività delle opposizioni, in particolare del Partito comunista portoghese, l’unica forza politica antifascista ad aver mantenuto negli anni una presenza effettiva all’interno del paese e nel mondo del lavoro. Ma sarà la questione coloniale a diventare una vera e propria spina nel fianco per il Portogallo salazarista che, scontrandosi con il clima internazionale di decolonizzazione,  rifiuterà di concedere qualunque tipo di autonomia ai territori d’oltremare. La difesa dell’impero come parte integrante dell’identità portoghese e l’idea del Portogallo come nazione multicontinentale e multirazziale[3] era, del resto, uno dei pilastri su cui si fondava l’Estado novo.            

 A partire dal 1961, l’esercito lusitano sarà impegnato dalle guerriglie indipendentiste in Angola, Guinea e Mozambico. Un’intera generazione di giovani portoghesi, nel corso degli anni ’60, finirà inghiottita dalle giungle africane. La guerra coloniale, percepita come ingiusta dalla gioventù che la combatteva (e che era entrata in contatto con gli ideali che animavano i patrioti africani), si salderà con la rinascita dell’opposizione studentesca e operaia, rinvigorita anche in Portogallo dallo sviluppo della new left sull’onda lunga del Sessantotto[4]. In particolare all’interno delle Forze armate, gli ufficiali subalterni iniziano a organizzarsi: il Movimento dei capitani, inizialmente pensato come associazione meramente corporativa[5], si trasformerà nel 1973 in Movimento delle Forze Armate (MFA), con un’identità dichiaratamente democratica e socialista. Il MFA, una volta eletti i propri dirigenti, tra i quali Otelo de Carvalho e Vasco Lourenço, inizia a prendere contatto con i generali favorevoli a una risoluzione politica del conflitto, con l’idea che solo un’azione delle forze armate potesse mettere fine alla dittatura e a una guerra coloniale della quale non si intravedeva la fine.

Dopo un primo fallito colpo di mano, il 16 marzo, nella notte tra il 24 e il 25 aprile del 1974 i militari riusciranno a prendere il controllo della capitale e delle principali strutture di comando del paese.

L’azione era scattata al passaggio in radio della canzone Grândola vila morena, del cantautore comunista José “Zeca” Afonso, scelta come segnale di avvio in quanto precedentemente vietata dal regime. In poche ore, pressoché senza sparare un colpo, il regime crolla come un castello di carte. Il primo ministro Marcelo Caetano, che nel 1968 aveva sostituito Salazar, è arrestato dai militari, mentre viene occupata la sede della polizia politica (la famigerata PIDE, Policia Internacional e de Defensa do Estado) in mezzo a una folla festante, nonostante l’invito dell’MFA a rimanere in casa. Una fioraia, Celeste Caeiro[6], inizia a distribuire ai militari dei garofani rossi, che molti infilano nella canna dei fucili e dei blindati, donando alla rivoluzione il nome con il quale è passata alla storia.

Caduta la dittatura, il potere viene assunto da una Giunta di salvezza nazionale, composta da ufficiali del MFA e guidata dal generale Antonio de Spìnola, già nota figura di riformatore[7]; il Movimento delle Forze armate rende immediatamente pubblico il suo programma, incentrato sulla democratizzazione dello Stato e sulla risoluzione della questione coloniale.          

La grande manifestazione convocata il Primo maggio, prima giornata dei lavoratori a essere celebrata dal 1926, vede la partecipazione di oltre un milione di cittadini portoghesi nelle strade di Lisbona[8], con in testa i leader dei principali partiti antifascisti, in alcuni casi (come Alvaro Cunhal, segretario del Partito comunista) appena rientrati dall’esilio. Con la legalizzazione dei partiti politici e dei sindacati autonomi riprendono, dopo quasi mezzo secolo, la vita politica e la conflittualità sociale, ma si acuiscono anche le divergenze tra Spìnola e la base popolare, in gran parte rappresentata dai partiti della sinistra, desiderosa di una cesura radicale con il passato. In particolare sulla questione coloniale si viene a creare una spaccatura tra il generale, propugnatore di una soluzione “federale”, e il MFA, sostenitore dell’indipendenza immediata delle colonie. Fallita la politica coloniale di Spìnola contro l’intransigenza della sinistra e soprattutto dei movimenti indipendentisti africani, quest’ultimo tenterà di forzare la situazione convocando una manifestazione di suoi sostenitori, scontrandosi con la reazione della sinistra e le barricate erette a Lisbona. Il generale tenterà, fallendo, un golpe conservatore nel marzo 1975, dopodiché sarà costretto a lasciare il Portogallo[9].                 

Con il fallimento del colpo di mano di Spìnola inizia la fase più “calda” e radicale della rivoluzione portoghese, quella che inizierà a essere chiamata Processo rivoluzionario in corso (PREC). Scioperi e agitazioni nelle fabbriche, nelle campagne e nelle università si susseguono senza sosta, mentre a livello politico cresce a dismisura l’influenza dell’ala sinistra del MFA e del Partito comunista, che attraverso Vasco Gonçalves (generale vicino ai comunisti) arriva a controllare di fatto il Governo provvisorio. I militari, in particolare il COPCON[10] istituito nella regione di Lisbona da Otelo de Carvalho[11], diventano dei veri e propri guardiani della rivoluzione, partecipando attivamente in molti casi alle occupazioni e alle mobilitazioni operaie. Si comincia addirittura, da più parti, ad ipotizzare la fine del sistema capitalista. Sono in molti a sognare una “nuova Cuba” alla periferia dell’Europa.  Nell’estate del 1975, quando il processo rivoluzionario raggiunge il suo apice, si verifica uno strano fenomeno: migliaia di giovani e militanti di sinistra, provenienti da tutta Europa, si recano in Portogallo per osservare da vicino e sostenere la rivoluzione, affascinati dal carisma di Carvalho, dalle immagini dei soldati rivoluzionari e dall’entusiasmo della classe lavoratrice nel costruire quello che veniva chiamato il Poder popular. In Italia sarà Lotta continua a seguire con maggior attenzione le vicende portoghesi, inviando corrispondenti e semplici militanti. Nelle tesi di LC il Portogallo, insieme alla decolonizzazione dei suoi ex possedimenti, poteva essere la scintilla che avrebbe dato il via alla rivoluzione in Occidente. Ricorda Sandro Moiso, militante di Lotta continua là presente all’epoca dei fatti:

“Destinazione Lisbona, dove la rivoluzione c’era davvero. Dove giovani militari dalle barbe incolte e dai capelli lunghi avevano smesso di far la guerra ai popoli dell’Angola e del Mozambico per girare i fucili verso il proprio governo. (…) Eravamo andati in Portogallo per veder sorgere un mondo nuovo. Era da diversi anni che ne stavamo spiando la nascita e forse quella sarebbe stata la volta buona. Ci sentivamo militanti della Rivoluzione. In fin dei conti non importava quale fosse[12].”

Mentre la deriva “bolscevica” della Revoluçao dos cravos aveva acceso le speranze dei rivoluzionari di tutta Europa, gli Stati Uniti e l’Occidente iniziano a guardare con preoccupazione agli sviluppi portoghesi: non era pensabile che un paese membro della NATO scivolasse verso il comunismo. Gli USA e le cancellerie europee (peraltro in maggioranza rette da esponenti socialdemocratici) individuarono, anziché nella destra portoghese in odore di neofascismo, un valido referente nel Partito socialista e nel suo leader Mario Soares, da tempo in disaccordo con le componenti rivoluzionarie più radicali e fautore di un’evoluzione in senso socialdemocratico ed europeo del PREC. A spendersi di più per un’evoluzione in tal senso saranno l’Internazionale socialista e il suo segretario, il tedesco Willy Brandt[13], ma anche all’interno dei partiti comunisti europei si erano originate le prime crepe nei riguardi del Portogallo: a molti il PCP appariva troppo settario e l’instaurazione di un regime di tipo “sovietico” in Europa sembrava un grosso azzardo, a partire dal Partito comunista italiano, impegnato in quel momento nella difficile definizione (insieme agli omologhi spagnoli e ai francesi) di “eurocomunismo[14]”. 

Già uscito vincitore dalle elezioni per la Costituente, nell’aprile 1975[15], il Partito socialista beneficerà largamente del sostegno politico (ed economico) dell’Occidente e degli Stati Uniti. Del resto, complici la stanchezza generale e le pressioni internazionali, verso la fine del 1975 il Processo rivoluzionario si avvierà verso la conclusione.

Nonostante le forti tensioni durante la fase più calda, la Revoluçao dos cravos continua a essere, ancora oggi, forse il momento fondamentale della storia portoghese del XX secolo. Per molti si è trattato dell’ultima rivoluzione marxista in Europa e della speranza di poter costruire un mondo diverso: i garofani rossi e la canzone di José Afonso sono ancora oggi patrimonio comune della sinistra lusitana e mondiale. Per altri dell’ingresso del Portogallo nella modernità e nella comunità politica (ed economica) europea. Quello che è certo è che il 25 aprile, a cui è stato dedicato il grande ponte che collega le due sponde del Tago a Lisbona, simboleggia la definitiva riconquista della libertà da parte di un popolo e soprattutto dei suoi figli sotto le armi, che al momento opportuno hanno avuto la forza e il coraggio di disobbedire.

Note


[1]Il 28 maggio 1926 un colpo di Stato militare poneva fine alla Prima repubblica portoghese. Salazar, inizialmente ministro delle finanze, riuscirà in breve tempo a porsi alla guida dello Stato. Cfr. Fernando Tavares Pimenta, Storia politica del Portogallo contemporaneo (1800-2000), Milano, Le Monnier, 2011, pag. 85-96.

[3]F. Tavares Pimenta, op. cit., pag. 126.

[4]Il colonialismo portoghese tendeva a presentarsi sia come progetto civilizzatore sia come unificazione, senza pregiudizi, di razze e culture diverse sotto un’unica bandiera. Cfr. Valeria Ribeiro Corossacz, Una decolonizzazione mai terminata. Il modello portoghese di colonizzazione in Brasile e la costruzione dell’Altro/a africano/a nell’immaginario razzista, in Altre modernità, Università degli studi di Milano, novembre 2016, pag.141-142.

[4]Cfr. Giulia Strippoli, Tra guerra e rivoluzione. La sinistra portoghese negli anni ’70, in Officina della Storia, 16 settembre 2019, https://www.officinadellastoria.eu/it/2019/09/16/tra-guerra-e-rivoluzione-la-sinistra-portoghese-negli-anni-settanta/ .

[5] In particolare contro una legge che permetteva ai militari di leva di diventare ufficiali di carriera dopo appena un anno di accademia anziché i quattro previsti.

[6]La ragazza dei fiori rossi liberati, in Il Manifesto, 25 aprile 2019.

[7]In particolare sulla questione coloniale, Spìnola si era pronunciato per una soluzione politica sulla falsa riga della Comunità francese gollista. Cfr. ad esempio il suo libro del 1974 O Portugal e o futuro (ed. italiana Il Portogallo e il suo futuro, Firenze, Vallecchi, 1974.

[8]Cfr. 700.000 garofani rossi a Lisbona, in Lotta continua, 3 maggio 1974.

[9]F. Tavares Pimenta, op. cit., pag. 213.

[10]Comando Operacional do Continente, corpo speciale deputato alla difesa del processo democratico.

[11]Maggiore dell’esercito e uno degli architetti del 25 aprile, diventerà un punto di riferimento per i settori più radicali del MFA e in generale della sinistra portoghese. Cfr. Intervista a Otelo de Carvalho di Rossana Rossanda, in Il Manifesto, 28 maggio 1976.

[12]Sandro Moiso, Riti di passaggio, http://www.carmillaonline.com/?s=riti+di+passaggio (giugno 2014).  

[13]F. Lorenzoni, intervista del 3 dicembre 2013, cit. in G. Strippoli, Lotta continua e il processo rivoluzionario portoghese, in “Estudios italianos em Portugal”, nuova serie n°9, 2014.

[14]Filippo Frangioni, Fra europeismo e terzomondismo: il Portogallo e la rivoluzione dei garofani nella sinistra italiana, in “Memoria e ricerca”, n. 44, settembre-dicembre 2013, pag. 153.

[15]Cfr. F. Frangioni, op. cit

[16] Il PS aveva raccolto il 37%, contro i l2% dei comunisti.  

Bibliografia

Corossacz V. R., Una decolonizzazione mai terminata. Il modello portoghese di colonizzazione in Brasile e la costruzione dell’Altro/a africano/a nell’immaginario razzista, in Altre modernità, Università degli studi di Milano, novembre 2016.

Frangioni F., Fra europeismo e terzomondismo: il Portogallo e la rivoluzione dei garofani nella sinistra italiana, in “Memoria e ricerca”, n. 44, settembre-dicembre 2013, pag. 153.

Moiso S., Riti di passaggio, http://www.carmillaonline.com/?s=riti+di+passaggio (giugno 2014).

Spìnola A., Il Portogallo e il suo futuro, Firenze, Vallecchi, 1974.

Strippoli G., Lotta continua e il processo rivoluzionario portoghese, in “Estudios italianos em Portugal”, nuova serie n°9, 2014.

Strippoli G., Tra guerra e rivoluzione. La sinistra portoghese negli anni ’70, in Officina della Storia, 16 settembre 2019, https://www.officinadellastoria.eu/it/2019/09/16/tra-guerra-e-rivoluzione-la-sinistra-portoghese-negli-anni-settanta/ .

Tavares Pimenta F., Storia politica del Portogallo contemporaneo (1800-2000), Milano, Le Monnier, 2011.

Fonti

Il manifesto (archivio online)

Lotta Continua (archivio online)

Le vite spezzate di Marzabotto

di Grazia Enerina Pisano

Abstract

Tra il 29 settembre e il 5 ottobre 1944, lungo l’Appennino tosco-emiliano, nei territori limitrofi al comune di Marzabotto, dalle SS naziste fu compiuto l’Eccidio di Marzabotto, il più atroce in Italia. In quei giorni, persero la vita 770 civili, di cui 216 bambini, 316 donne e 160 anziani. Oggi, tra le lunghe vallate e il piccolo cimitero, rimane il Parco storico di Monte Sole, istituito nel 1989 per non dimenticare mai.

Entre le 29 septembre et le 5 octobre 1944, long l’Apennin tosco-émilien, dans les territoires limitrophes du village homonyme, s’est deroulé le Massacre de Marzabotto, perpretré par les SS Nazis. Ce massacre a été le plus atroce en Italie. Au cours de ces journées, 770 civils ont perdu leurs vies, dont 216 enfants, 316 femmes et 160 anciens. Aujourd’hui, entre les longues vallées et le petit cimetière, on peut trouver le Parc historique de Monte Sole, créé en 1989 pour ne jamais oublier.

Between 29th of September and 5th of October 1944, along the Tuscan-Emilian Apennines, in the territories adjacent to the municipality of Marzabotto, the Nazi SS carried out the Massacre of Marzabotto, the most atrocious in Italy. In those days, 770 civilians lost their lives, including 216 children, 316 women and 160 elders. Today, between the long valleys and the small cemetery, you can find the Historical Park of Monte Sole, established in 1989 to never forget.

Le vite spezzate di Marzabotto

Nel Parco storico di Monte Sole, lungo l’Appennino tosco-emiliano, oggi restano soltanto le lunghe vallate, il piccolo cimitero e le macerie di una chiesa. Tra gli alberi, la Stella Rossa dell’omonima brigata partigiana. Questo il luogo in cui, tra il 29 settembre e il 5 ottobre 1944, si consumò la più efferata strage compiuta dalle SS naziste in Italia nella quale persero la vita 770 civili di tutte le età: fu l’Eccidio di Marzabotto, avvenuto a distanza di un mese dalla terribile Strage di Sant’Anna di Stazzema[1].

Con l’avanzata delle truppe alleate a sud, Marzabotto, uno dei primi paesi amministrati dai comunisti in Emilia Romagna, divenne luogo di resistenza e base stabile delle brigate partigiane. Di fatto, dopo lo sfondamento della precedente linea Gustav e la liberazione di Roma da parte degli Alleati nel giugno del ’44 e quella di Firenze nell’agosto dello stesso anno, le truppe naziste cominciarono a costruire una nuova linea difensiva di confine lungo l’Appennino tosco-emiliano, fino a Rimini. Era l’ultimo anno della Seconda guerra mondiale e il secondo della Guerra civile in Italia: il 1944, quello in cui i territori di Marzabotto divennero luogo della più grande strage di civili compiuta dai nazisti in Italia.

Fin dai giorni successivi l’armistizio dell’8 settembre 1943, come a Bologna, anche a Marzabotto  cominciarono le azioni di resistenza contro la dominazione nazi-fascista: qui, su direttiva dell’organizzazione comunista provinciale, venne dato l’assalto al deposito di grano e, dopo il bombardamento aereo delle truppe alleate su Bologna del 25 settembre del 1943 (in cui persero la vita centinaia di civili), nacquero i primi gruppi di resistenza partigiana riuniti intorno alla Brigata Stella Rossa comandata da Mario Musolesi, soprannominato “Lupo[2]”. I partigiani si insediarono sui monti che, come nel caso di Monte Sole, oltre a offrire rifugi naturali, permettevano di controllare il passaggio della linea ferroviaria Direttissima Bologna-Firenze.

Nel giro di poche settimane i partigiani fraternizzarono con la popolazione che, sostenendo la causa di Liberazione nazionale, offriva aiuto e supporto materiale, quale cibo, vestiti e luoghi caldi in cui riposare. È il caso dei paesini vicino al comune di Marzabotto, lungo le pendici di Monte Sole, come Cassaglia, Caprara, Cerpiano, Pioppe di Salvaro, Canovetta, San Giovanni, Casoncello, Creda e San Martino: luoghi dove, tra il 29 settembre e il 5 ottobre 1944, troveranno la morte 770 civili.

Infatti, venuti a conoscenza del supporto alle forze di Resistenza da parte della popolazione civile, dopo la guerriglia e la vittoria partigiana nei territori di Monte Sole nel maggio del 1944 e lo sciopero dei lavoratori impiegati nella fortificazione della Linea Gotica nell’agosto dello stesso anno, i nazisti cominciarono immediatamente le rappresaglie “antipartigiane”, divenute sempre più cruente dopo la liberazione di Firenze e la paura dello sfondamento della Linea Gotica a sud. Così, nell’agosto del ’44, dalla Toscana iniziò la marcia del reparto della 16° divisione delle SS naziste, già macchiatesi dell’Eccidio di Sant’Anna di Stazzema, un piccolo paese toscano indicato sulle carte dei comandi nazisti come nido di partigiani. Qui, nonostante l’assenza dei partigiani, la furia nazista si sferrò sui civili: tra fucilazioni di massa, raffiche di mitra e case bruciate, più di 400 persone, di ogni età, persero la vita. A seguito della manomissione degli archivi, la portata reale del massacro fu scoperta soltanto nel 1994, quando furono ritrovati 695 fascicoli in un armadio del Palazzo Cesi della Procura Generale Militare a Roma, provvisoriamente archiviati. Il ritrovamento dei fascicoli, come spiega la storica Toni Rovatti, permise di riaprire l’inchiesta sui colpevoli della Strage presso la Procura militare di La Spezia, con un’udienza preliminare svolta il 2 dicembre 2003 a carico di sette militari del II battaglione del 35° reggimento della 16° divisione delle SS, in un processo istituito dal Procuratore De Paolis[3].

Abbandonato il territorio toscano, nella risalita verso nord, tra il 23 e il 24 settembre 1944, i reparti nazisti fecero terra bruciata distruggendo tutto ciò che incontravano, compresi i binari della Direttissima; nel mentre i partigiani della Brigata Stella Rossa, ritenendo erroneamente che stesse per giungere il momento finale, si apprestarono a bloccare le vie di ritirata delle truppe naziste.

Quando il 28 settembre gli americani giunsero nei pressi di Lagaro, a 10 chilometri da Monte Sole, i nazisti organizzarono una massiccia operazione contro partigiani e popolazione civile che li sosteneva. Furono così mobilitati 1500 uomini delle forze nazi-fasciste che, all’alba del 29 settembre, puntarono su Monte Sole[4]. Ebbe inizio la Strage di Marzabotto.

Infatti, sebbene il quotidiano Il resto del Carlino pubblicò in data 11 ottobre 1944 un articolo dal titolo Voci inconsistenti, in cui dichiarava di poter smentire le “macabre voci” relative alla morte di centocinquanta persone tra uomini, donne e bambini “nel corso di un’operazione di polizia contro una banda di fuori-legge”[5], secondo quanto riportato dal Comitato Regionale per le Onoranze ai Caduti di Marzabotto, tra tutte le vittime, in sei giorni furono uccisi 216 bambini, 316 donne e 160 anziani[6].

Inizialmente i nazisti arrivarono a Casaglia dove, a seguito dei rastrellamenti nei territori limitrofi, la popolazione si era riunita in preghiera nella piccola Chiesa di Santa Maria Assunta. I soldati irruppero e, dopo aver ucciso una ragazza disabile in sedia a rotelle, la stessa sorte toccò al parroco, Ubaldo Marchioni, che li implorava di fermarsi. Costretti ad abbandonare la chiesa, i civili (più di cento) furono portati nel cimitero vicino e qui furono uccisi. Ai colpi di mitra e alle successive bombe a mano, soltanto cinque civili sopravvissero.

Fu poi il turno di Caprara, attaccata il 29 settembre: qui le truppe naziste, dopo aver ucciso una madre con i suoi sette figli, rinchiusero circa settanta civili nella cucina di una casa in cui lanciarono poi le granate. Poiché alcuni tentarono la fuga, questi furono fucilati. Soltanto otto civili sopravvissero.

Poi di Creda, dove il 29 settembre i nazisti raggrupparono novanta civili sotto un porticato e cominciarono a sparare: settantanove furono le vittime, di cui venticinque giovanissime.

Nella stessa mattinata, a Casone di Riomoneta, le forze naziste uccisero venti civili, per lo più donne e bambini che, costretti a uscire dal rifugio antiaereo in cui si nascondevano, furono fucilati. Si salvarono in pochissimi.

Successivamente di Cerpiano: anche qui i nazisti arrivarono il 29 settembre e rinchiusero circa cinquanta civili nell’oratorio di paese dove sferrarono colpi di mitra e lanciarono bombe a mano. Alcuni dei superstiti, già gravemente feriti, furono definitivamente ammazzati l’indomani, il 30 settembre. Soltanto una donna e due bambini sopravvissero, nascosti sotto i cadaveri.

A seguire, le squadre naziste arrivarono a San Giovanni e Casoncello, dove ammazzarono cinquantuno civili, tra cui venti bambini. Nessuno sopravvisse.

E, poiché a Cadotto, dalla fine di settembre si erano rifugiati alcuni partigiani della Brigata Stella Rossa (tra cui “Lupo” che fu ucciso in uno scontro), qui i nazisti condussero operazioni sulla popolazione locale: furono quaranta i civili uccisi tra le case bruciate.

Arrivarono quindi a Pioppe di Salvaro dove, tra il 29 e il 30 settembre, furono condotti nella scuderia del paese un centinaio di uomini; questi furono successivamente divisi in tre gruppi, di cui il primo fu liberato, il secondo fu mandato nei campi di concentramento delle Caserme Rosse (BO) e il terzo, di circa quarantacinque persone, fu ucciso a colpi di mitra e pistola. Morirono tutti e i corpi non furono mai recuperati.

Il 30 settembre, i nazisti giunsero a San Martino dove, anche qui, la popolazione era riunita nella chiesa del villaggio in preghiera: più di quarantacinque civili furono uccisi e l’edificio bruciato.

A Canovetta, il primo ottobre, furono fucilati trenta uomini precedentemente rastrellati e considerati inadatti al lavoro coatto. Alle bombe a mano, coperti dai corpi dei compagni, sopravvissero soltanto quattro persone[7]. Le truppe tedesche perquisirono ogni villaggio e la strage continuerà senza sosta fino al 5 ottobre 1944.

Ma dietro i numeri e le cifre ci sono storie di vita, alcune mai raccontate, altre conosciute grazie alle parole dei sopravvissuti: è il caso di Cornelia Paselli, Elide Ruggeri e Ferruccio Laffi, alcuni dei superstiti della Strage che, una volta tornata la pace, hanno trovato la forza di raccontare.

La storia di Cornelia Paselli, che nel settembre del 1944 aveva 17 anni e abitava a Gardelletta con i genitori, la sorella, i due fratelli gemelli e la sua “pecorina” è stata raccontata nel documentario di Lorenzo K. Stanzani dal titolo 1944: silenzio sul Monte Sole. Trasferitasi con la famiglia a Cerpiano, ritenuto luogo più sicuro di Gardelletta, la mattina del 29 settembre, alla vista degli incendi e al suono degli spari provenienti dai paesini limitrofi, il padre ordinò alla famiglia di rifugiarsi nella chiesa di Casaglia, mentre lui si sarebbe nascosto nei boschi insieme ai partigiani. Ma, mentre recitavano il rosario sotto la guida di Ubaldo Marchioni, nella chiesa arrivarono le SS e tutti furono costretti a uscire e a schierarsi lungo il muro del cimitero vicino. Cominciarono le fucilate, i gemelli morirono quasi subito e la madre morirà poco dopo. Cornelia, invece, nascosta sotto i cadaveri, riuscì a salvarsi e a scappare in cerca di aiuto. Arrivata a Cerpiano, vide i corpi morti dei vicini e la “pecorina sgozzata”: in quel momento realizzò ciò che era successo[8].

Quella di Elide Ruggeri, invece, è stata raccolta dall’Istituto storico Parri Emilia Romagna ed è disponibile sul sito del progetto Storia e Memoria di Bologna. Il 29 settembre 1944, Elide Ruggeri aveva diciotto anni e viveva a Casaglia di Marzabotto in una famiglia di mezzadri composta da undici persone. Intravisti gli incendi e avvertita dai partigiani dell’imminente arrivo dei nazisti, la famiglia decise di dividersi: gli uomini avrebbero seguito i partigiani nel bosco, donne e bambini si sarebbero rifugiati nella chiesa di Don Ubaldo Marchioni. Anche lei, come Cornelia Paselli, mentre i nazisti sistemavano le mitragliatrici all’ingresso della cappella del cimitero, fu disposta lungo il muro. Secondo il suo racconto, i nazisti spararono per quarantacinque minuti, mirando in basso per colpire i bambini e lanciando bombe a mano contro tutti gli altri. “Smisero solo quando finì l’ultimo lamento. I bambini, una cinquantina, erano tutti morti, fra le braccia delle loro madri. Alcuni adulti riuscirono incredibilmente a salvarsi, sepolti sotto i morti. […] Anch’io, ferita, restai fra i cadaveri e sopra, al mio fianco, c’erano i cadaveri delle mie cugine e quello di mia madre, sventrata […]. Restai, così immobile, tutta la notte e tutto il giorno seguente, sotto la pioggia, in un mare di sangue e quasi non respiravo più. All’alba venne mio zio, mi estrasse dal mucchio e mi portò via”, queste le sue parole[9].

La storia di Ferruccio Laffi, che al tempo aveva sedici anni, è stata raccontata da lui in molteplici interviste, tra cui il sopracitato documentario di Stanzani. Egli, penultimo di sette figli di una famiglia di mezzadri di Colulla, fu l’unico a salvarsi insieme al fratello con cui si nascose in un calanco il 30 settembre 1944. Quando tornarono alla casa, trovarono la famiglia trucidata sull’aia: il più piccolo dei bambini uccisi non aveva neanche un anno di vita. Ferruccio Laffi è riuscito a raccontare la sua storia soltanto in età avanzata ma, come da lui stesso dichiarato: “Mi raccomando, io non ho mai parlato di queste cose ma, se voi altri ne tenete conto e andate a dirle a qualcuno, io sono contento perché queste cose qui non dovrebbero succedere più e, se c’è qualcuno che se le ricorda e le divulga, io sono contentissimo” [10].

Queste sono soltanto tre delle storie dei pochissimi sopravvissuti alla Strage di Marzabotto, la maggior parte delle altre non si è mai potuta raccontare.

Il 25 settembre 1949, il presidente della Repubblica Luigi Einaudi consegna alla città di Marzabotto la medaglia d’oro al Valor Militare, poiché dall’8 settembre 1943 al 1 novembre 1944 “Marzabotto preferì ferro, fuoco e distruzioni piuttosto che cedere all’oppressor”[11] .

Nel 1951 a Bologna comincia il processo contro il maggiore Walter Reder, accusato di una serie di massacri contro la popolazione civile italiana in Toscana ed Emilia-Romagna, durante la ritirata del suo battaglione: il 56° della 16° divisione delle SS. A Reder furono attribuiti la Strage di Sant’Anna di Stazzema, l’eccidio di Bardine San Terenzo, il massacro di Valla e di Vinca[12], e l’immenso bagno di sangue di Monte Sole. Il 31 ottobre 1951 Walter Reder viene condannato all’ergastolo con degradazione, poiché riconosciuto colpevole delle stragi di Bardine San Terenzio, Vinca, Valla e Marzabotto (limitatamente agli episodi avvenuti nelle frazioni di Casaglia, Cerpiano e Caprara); è invece assolto per insufficienza di prove in relazione agli eccidi di Sant’Anna di Stazzema, San Martino, Colula di Sopra, Colula di Sotto, Ca’ Roncadelli. Nel 1954 il Tribunale supremo militare rettifica la sentenza assolvendo l’imputato con formula piena in relazione agli episodi di Sant’Anna di Stazzema, di Bergiola e del fiume Frigido, ma condannandolo all’ergastolo per l’Eccidio di Marzabotto [13].

Con la Legge Regionale n.19 del 27 maggio 1989, la regione Emilia Romagna istituisce il Parco Storico di Monte Sole, con l’obiettivo di restaurare e conservare il patrimonio storico e naturale della zona. La legge si pone come fine la ricostruzione, la conservazione e la diffusione della “memoria degli episodi dell’insorgenza partigiana e in particolare della Brigata Stella rossa per la liberazione d’Italia, unitamente a quella degli eventi accaduti nell’autunno 1944 a Monte Sole e nel circostante territorio tra Reno e Setta che videro lo scatenarsi della barbarie nazifascista contro inermi popolazioni, l’eccidio spietato di uomini, donne, vecchi e bambini, nel quale si attuò il sacrificio di intere comunità”. Di fatto, come dichiarato nell’articolo 1 della suddetta legge, essa mira a “mantenere aperta la riflessione su quei fatti” e ad “approfondire la conoscenza storica e scientifica delle condizioni materiali, sociali e culturali che favorirono la nascita del fenomeno fascista in Italia e del fenomeno nazista in Germania con la conseguente costruzione della sua macchina di morte”. Essa volge al sostegno di “tutte quelle attività sociali, economiche e produttive che, compatibilmente con la salvaguardia dell’ambiente naturale, possono contribuire a riportare la vita tramite la pacifica attività umana, laddove si volle seminare morte e distruzione sotto l’impulso dell’ ideologia del Terzo Reich” [14].

Ancora oggi, ogni 25 aprile, in tantissimi si recano presso il Parco Storico di Monte Sole dove, in occasione della Festa della Liberazione, vengono organizzati concerti, visite guidate e percorsi di memoria affinché i tragici fatti consumatisi nell’autunno del 1944 non vengano mai dimenticati.

FONTI:

Bibliografia:

Rovatti T., Sant’Anna di Stazzema – Storia e memoria della strage dell’agosto 1944, DeriveApprodi, 2004 

Arbizzani L., Antifascismo e lotta di Liberazione nel Bolognese comune per Comune, Bologna – ANPI, 1998 

Sitografia:

ANPI Ravenna, Marzabotto – L’inutile strage, https://www.anpiravenna.it/marzabotto-linutile-strage-29-settembre-5-ottobre-1944/ 

ANPI – Reggio Emilia, Strage di Marzabotto, https://www.anpireggioemilia.it/agenda-della-resistenza/1944-strage-di-marzabotto/

Atlante delle stragi naziste e fasciste in Italia, http://www.straginazifasciste.it x

Bologna online – Biblioteca Sala Borsa, Dichiarazione del presidente della Repubblica Einaudi, https://www.bibliotecasalaborsa.it/bolognaonline/cronologia-di-bologna/1949/medaglia_doro_al_valor_militare_per_marzabotto 

Comitato Regionale per le Onoranze ai Caduti di Marzabotto  https://www.martirimarzabotto.it 

Comitato Regionale per le Onoranze ai Caduti di Marzabotto, I luoghi del memoriale, https://www.martirimarzabotto.it/luoghi/ 

Comitato Regionale per le Onoranze ai Caduti di Marzabotto, Le cifre dell’Eccidio, https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&cad=rja&uact=8&ved=2ahUKEwieuITGpo73AhXVhP0HHfN4CX0QFnoECCAQAQ&url=https%3A%2F%2Fwww.martirimarzabotto.it%2Feccidio-di-marzabotto%2F&usg=AOvVaw0dreFy6SsTS2q46pOubxmZ

Enciclopedia Treccani https://www.treccani.it 

Enciclopedia Treccani, Eccidio di Marzabotto, https://www.google.com/search?client=safari&rls=en&q=treccani+marzabotto&ie=UTF-8&oe=UTF-8

Il resto del Carlino, 11 ottobre 1944, https://www.storiaememoriadibologna.it/files/monte-sole/carlinomontesole.pdf 

Legge Regionale n.19 del 27 maggio 1989, https://demetra.regione.emilia-romagna.it/al/articolo?urn=er:assemblealegislativa:legge:1989;19&dl_t=text/xml&dl_a=y&dl_id=10&pr=idx,0;artic,1;articparziale,0&ev=1

Sentenza della Corte Suprema di Cassazione- Prima Sezione Penale – n. 1362/07 del 06/08 novembre 2007 https://www.difesa.it/Giustizia_Militare/rassegna/Processi/Sommer_Schoneberg_Bruss/Pagine/SentenzaCorteSupremaCassazione.aspx 

Storia e memoria di Bologna https://www.storiaememoriadibologna.it 

Storia e Memoria di Bologna, Biografia di Elide Ruggeri, https://www.storiaememoriadibologna.it/files/vecchio_archivio/seconda-guerra/m/marzabotto_ruggeri.pdf 

Storia e memoria di Bologna, Brigata Stella Rossa Lupo, https://www.storiaememoriadibologna.it/brigata-stella-rossa-lupo-27-organizzazione

Storia e memoria di Bologna, Eccidio di Monte Sole, https://www.storiaememoriadibologna.it/eccidio-di-monte-sole-54-evento 

Storia e memoria di Bologna, I giorni della strage di Monte Sole, https://www.storiaememoriadibologna.it/montesol/giorni-strage/ 

Filmografia:  

Documentario 1944: silenzio sul Monte Sole di Lorenzo K. Stanzani, Italia, 2019, disponibile al link https://www.raiplay.it/video/2019/10/speciale-tg1-17954de1-1556-45d3-a2a2-3166c5672d82.html 


NOTE:

[1] 12 agosto 1944 in Toscana, provincia di Lucca.

[2] La Brigata Stella Rossa si distingueva dalle altre per la composizione politica non omogenea e per il grande spirito pratico dell’azione militare, fattori che generarono frequenti contrasti e difficili rapporti con il Comando unico militare Emilia Romagna (CUMER). Oltre ai contrasti con i gruppi esterni, non mancavano però quelli interni alla Brigata: emblematica la scissione di un centinaio di uomini che, a seguito della discussione tra il comandante Melchiorri e “Lupo” a proposito della dislocazione tattica delle forze e della distribuzione delle armi, si allontanarono dalla zona di Monte Sole, recandosi in quella di Montefiorino.

[3]Rovatti T., Sant’Anna di Stazzema – Storia e memoria della strage dell’agosto 1944, DeriveApprodi, 2004, pp. 119-121.

[4]Arbizzani L., Antifascismo e lotta di Liberazione nel Bolognese comune per Comune, Bologna – ANPI, 1998 pp. 142-149.

[5]Il resto del Carlino, 11 ottobre 1944, https://www.storiaememoriadibologna.it/files/monte-sole/carlinomontesole.pdf

[6]Comitato Regionale per le Onoranze ai Caduti di Marzabotto, Le cifre dell’Eccidio, https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&cad=rja&uact=8&ved=2ahUKEwieuITGpo73AhXVhP0HHfN4CX0QFnoECCAQAQ&url=https%3A%2F%2Fwww.martirimarzabotto.it%2Feccidio-di-marzabotto%2F&usg=AOvVaw0dreFy6SsTS2q46pOubxmZ

[7]Comitato Regionale per le Onoranze ai Caduti di Marzabotto, I luoghi del memoriale, https://www.martirimarzabotto.it/luoghi/

[8]Documentario 1944: silenzio sul Monte Sole di Lorenzo K. Stanzani, Italia, 2019, disponibile al link https://www.raiplay.it/video/2019/10/speciale-tg1-17954de1-1556-45d3-a2a2-3166c5672d82.html

[9]Storia e Memoria di Bologna, Biografia di Elide Ruggeri, https://www.storiaememoriadibologna.it/files/vecchio_archivio/seconda-guerra/m/marzabotto_ruggeri.pdf

[10]Documentario 1944: silenzio sul Monte Sole di Lorenzo K. Stanzani, Italia, 2019, disponibile al link https://www.raiplay.it/video/2019/10/speciale-tg1-17954de1-1556-45d3-a2a2-3166c5672d82.html

[11]Bologna online – Biblioteca Sala Borsa, Dichiarazione del presidente della Repubblica Einaudi, https://www.bibliotecasalaborsa.it/bolognaonline/cronologia-di-bologna/1949/medaglia_doro_al_valor_militare_per_marzabotto

[12]17 e il 19 agosto 1944

[13]Rovatti T., Sant’Anna di Stazzema – Storia e memoria della strage dell’agosto 1944, DeriveApprodi, 2004, pp. 100-103.

[14] Legge Regionale n.19 del 27 maggio 1989, https://demetra.regione.emilia-romagna.it/al/articolo?urn=er:assemblealegislativa:legge:1989;19&dl_t=text/xml&dl_a=y&dl_id=10&pr=idx,0;artic,1;articparziale,0&ev=1.